Les rédactions du Maximum ont mis plusieurs jours pour authentifier une note explicative adressée au chef de l’État par le gouverneur du Sankuru dont la mise en accusation devant la Cour de cassation a été décidée par l’Assemblée provinciale pour détournement de fonds publics alloués à la province notamment.
Écrite le 11 septembre 2020, la version originale de la note de sieur Mukumadi au chef de l’État circule en pdf sur les réseaux sociaux depuis quelques jours. Le scepticisme de nos fins limiers qui ont pris leur temps avant de se prononcer sur ce texte surréaliste est justifié par une certaine incrédulité.
En effet, on a du mal à imaginer qu’un gouverneur de province écrive au président de la République comme s’il s’adressait à un voisin de palier. Mukumadi écrit au chef de l’État sans réserver copie ni au 1er ministre, ni au ministre de l’Intérieur.
Le style pour le moins approximatif qu’il utilise dans une correspondance administrative à l’intention du garant de la nation laisse tellement à désirer que l’on se demande s’il ne s’agit pas d’une prise à partie délibérée de l’institution président de la République.
Les fautes d’orthographe, le manque de cohérence ainsi qu’une certaine outrecuidance débordante qui émaillent sa correspondance confinent à l’irrespect vis-à-vis de son destinataire.
L’état d’esprit de l’homme transparaît dans l’expression sommaire qui est la sienne. L’on s’aperçoit aussi que celui qui a été choisi par les députés provinciaux pour présider aux destinées de la province natale de Patrice Lumumba n’est pas à la hauteur des défis énormes liés à cette responsabilité.
Sur le fond, il n’est pas aisé de comprendre la langue dans laquelle Mukumadi s’adresse au président de la République dans sa ‘‘note explicative’’. Pour ceux qui ont des enfants en âge de scolarité, il faut tout simplement se contenter d’avoir la même affabilité que l’on déploie à l’égard des élèves des classes de recrutement pour capter son message. D’entrée de jeu, il informe le chef de l’État qu’il existerait au Sankuru un système «néocolonial» (sic !) entretenu par «les députés provinciaux, nationaux et sénateurs» (re-sic!) qui auraient tous «une pierre à la place du cœur».
Puis, passant du coq à l’âne, Mukumadi explique sans transition au chef de l’État comment lui dont la déchéance était juridiquement cristallisée, à en croire un arrêt de la Cour constitutionnelle, a pu défier les lois de la République pour reprendre de sa propre initiative les attributs de gouverneur de province. «Dès mon retour en province après plus de six mois passés en dehors du pays dont l’autorisation m’a été accordée par son excellence monsieur le vice-ministre, ministre de l’Intérieur et sécurité…», explique-t-il. C’est donc, comme il l’insinue ingénumment le vice-premier ministre, ministre l’Intérieur Gilbert Kankonde qui aurait passé outre la batterie des obstacles juridiques empêchant Mukumadi de porter le manteau de gouverneur, snobant ainsi carrément un arrêt de la plus haute juridiciton du pays et ce, au moment même où l’Etat de droit est scandé à tout bout de champ par lui.
Par la suite, Mukumadi passe aux aveux sur les graves accusations d’abus de pouvoir et d’incitation des militaires à comettre des actes contraires à leurs devoirs. «J’avais instruit le colonel FARDC de faire subir la rigueur de la loi à certains journalistes, et qu’à ma grande surprise, ce dernier a procédé à l’exécution avec un excès de zèle», se vante-t-il. Un aveu qui doit intéresser au plus haut point le parquet militaire dont l’office à Mbuji-Mayi ayant juridiction sur les provinces du Kasaï-oriental, de Lomami et du Sankuru lui avait adressé une invitation judiciaire concernant les faits ci-haut invoqués qu’il avait délibérément ignorée. Il semble ignorer qu’en droit positif congolais, les journalistes ou tout autre citoyen n’ont pas pour juge naturel un gouverneur de province en goguette ou un officier des FARDC et que les tortures, assassinats et autres traitements inhumains et dégradants sont prohibés.
Survient alors une autre révélation. Mukumadi rappelle au chef de l’État leur appartenance commune à «notre cher parti». Là encore, l’auteur de la missive ignorait qu’un président de la République en RDC est au-dessus de la mêlée et n’a pas de chapelle politique. «Excellence, tout en m’imprégnant de votre vision et de celle de notre parti qui a été relayée par le président ad-interim, j’ai décidé de poursuivre mon bon chemin…», écrit-il.
Une fumisterie lorsque l’on sait que Mukumadi avait été publiquement encarté dès après son élection à l’Union pour la nation congolaise (UNC) de Vital Kamerhe. Cette conversion de la 25ème heure à l’UDPS relève donc simplement d’un opportunisme aussi déroutant que dégoûtant…
Il reste à déplorer le fait que certains responsables politiques du Sankuru s’évertuent à figer dans le marbre leur mépris de la province du Héros national Patrice Emery Lumumba en continuant à imposer à sa tête un imposteur dont l’amateurisme et les limites intellectuelles sautent aux yeux.
Pourtant le Sankuru fait partie de la République Démocratique du Congo et a droit à la même considération que les autres provinces du pays.
JBD