Serein et confiant face à la dépréciation du franc congolais sur le marché de change, le gouverneur de la Banque centrale du Congo, Déogratias Mutombo assure que la tendance peut être renversée, pour autant que tout le monde puisse s’impliquer, chacun à son niveau de responsabilité. Notamment, l’Institut d’émission, le gouvernement et ses services compétents ainsi que les opérateurs économiques.
Face à la presse mercredi 29 juillet, à l’issue d’une réunion extraordinaire du Comité de politique monétaire, il a dévoilé une recette répartie en trois étapes pour stabiliser la monnaie nationale à court terme :
D’abord, l’ajustement budgétaire qui consiste pour le gouvernement de suspendre tous les paiements non prioritaires de l’Etat jusqu’à la résorption du déficit. « C’est ce qu’on a fait en 2017. Si on n’est pas en mesure de le faire, on peut suspendre à des intervalles bien précis certains paiements…Il faut à tout prix arrêter avec les déficits supplémentaires. Par contre, il faut dégager des marges budgétaires. Il faut améliorer la qualité de la dépense. Pas de dépenses inutiles, aujourd’hui on ne peut pas se le permettre », a expliqué le gouverneur.
Ensuite l’amélioration de la mobilisation des recettes qui implique la suppression aussi bien de la multiplicité des taxes légales et illégales en tenant compte de la nécessité d’avoir une stratégie de concurrence fiscale par rapport aux neuf pays voisins. «Tout le monde sait que le pays souffre de la fraude fiscale depuis des années. Pour permettre l’amélioration des recettes, il faux commencer par supprimer la multiplicité des taxes légales qui sont perçues par plusieurs services publics. Il faut qu’on mette un terme à ça. Il y a toujours eu des résistances. Les services publics doivent être restructurés. On l’a dit depuis des années. Mais, il y a toujours une résistance dans le chef de ces services publics et des personnes qui soutiennent ces services publics. Il faut arrêter avec la fragmentation fiscale. Au niveau des postes frontières, il faut supprimer le bulletin de liquidation de la DGDA qui reprend beaucoup de taxes pour rien. On devrait avoir cette stratégie d’avoir une fiscalité compétitive parce qu’on est entouré de neuf voisins. Il nous faut la concurrence. Il faut aussi s’attaquer à la multiplicité des taxes illégales. Il y en a beaucoup. Au lieu de 4 services, il a plus d’une dizaine…On va continuer comme ça jusqu’à quand ?», a martelé Deogratias Mutombo pour qui, une rencontre pratique avec les services publics devrait précéder la mise en place de ces réformes.
Enfin, le gouverneur de la Banque centrale recommande le respect de la règlementation des changes et du rapatriement des recettes d’exportation des sociétés minières. « Vous savez qu’aujourd’hui, les miniers ont produit même un peu plus que l’année dernière en ce qui concerne le cuivre et le cobalt. Et les cours du cuivre ont même dépassé ceux de l’année passée. Nous sommes à plus ou moins 6400 USD la tonne. Il faut que le rapatriement de 60% soit conforme à la règlementation. Il faut aussi que certains opérateurs économiques, autres que les miniers, respectent aussi la règlementation des changes. Il faut qu’ils respectent aussi l’autorité de la règlementation du marché de change qu’est la banque centrale. Il y a même un certain mépris pour la Banque centrale. Ce n’est pas normal. C’est un mauvais service qu’on rend à la nation. Ici j’adresse un message aux opérateurs de télécommunication qui s’adonnent à la manipulation du taux de change. Ces entreprises affichent de taux de 2300 FC le dollar américain pour vendre leur service. Ce jeu spéculatif peut être suivi par d’autres personnes. La banque centrale est en train de leur adresser des lettres pour leur demander d’arrêter avec ce jeu de manipulation du taux de change. La Banque centrale se réserve le droit de sanctionner dorénavant, toute personne qui s’adonne à cette pratique. Pour ces sociétés de télécoms, la pénalité c’est 5% du chiffres d’affaires réalisé l’année précédente», a souligné Déogratias Mutombo.
Selon lui, toutes ces mesures sont à la portée des institutions de la République et devraient permettre au gouvernement de maximiser ses revenus afin de financer ses dépenses publiques et les investissements, moteur de croissance. Aussi, en appliquant ces mesures, l’Exécutif se dispenserait-il du financement monétaire de ses déficits budgétaires qui sont à la base de l’expansion monétaire sur le marché de change et donc de la dépréciation du franc Congolais.
JM