Les faucons sont tenus en laisse et le calme revient entre les partenaires de la coalition FCC-CACH. Les avis de forte tempête dans les relations entre les deux, lancés par plusieurs observateurs, s’estompent. D’aucuns s’attendaient à voir les participants à la retraite du Front commun pour le Congo (FCC) se prononcer pour un divorce d’avec la plateforme Cap pour le changement (CACH) après les propos jugés outrageants à l’égard du président de la République honoraire et chef de file du Front Joseph Kabila par le député national Jean Marc Kabund, président a.i. de l’UDPS et 1er vice-président de l’Assemblée nationale. Il n’en a rien été. A l’issue de leurs 3 jours de cogitations, les sociétaires de la plateforme kabiliste ont au contraire résolu de soutenir les nouvelles institutions de la République et la coalition FCC-CACH. En dépit des passions qui avaient pris l’ascenseur de part et d’autre après les destructions réciproques des emblèmes et effigies des deux chefs de file, Kabila et Tshisekedi et la diatribe de Kabund, les têtes couronnées de la plateforme de Joseph Kabila ont prêté une oreille attentive aux conseils de modération et de pondération de leur autorité morale qui, de passage vers Boma, s’est arrêté à Kisantu pour échanger brièvement avec eux sur l’avenir de leur famille politique et du pays dans son ensemble.
Sus aux passions et à l’agitation
En attendant la restitution des recommandations des travaux à l’opinion, les participants à la retraite politique d’évaluation tenue à Mbwela Lodge à Kisantu du 26 au 28 novembre 2019, ont donc dans leurs résolutions finales, exprimé leur soutien aux institutions de la République et à la coalition FCC-CACH, au pouvoir, ainsi que leur solidarité aux populations douloureusement affectées aussi bien par les cataclysmes naturels provoqués par le dérèglement climatique, les accidents que par les offensives meurtrières des groupes terroristes et armés qui écument certaines contrées du pays. Ils ont dit leur solidarité et leur soutien aux forces de défense et de sécurité et ont appelé les institutions de la RDC à prendre, sans délai, les dispositions qui s’imposent pour arrêter les violences et apporter l’aide humanitaire aux Congolaises et Congolais qui sont dans le besoin, notamment dans les territoires de Beni au Nord-Kivu et d’Uvira au Sud-Kivu. Ainsi que cela avait été annoncé dans le message d’orientation des assises de Kisantu présenté au nom de Joseph Kabila, autorité morale du FCC par Néhémie Mwilanya, coordonnateur de la plateforme, le premier séminaire politique du FCC avait été convoqué pour permettre à ses membres de mettre à jour les voies et moyens de veiller au bon fonctionnement des institutions publiques ainsi qu’au renforcement de l’unité et de la concorde nationales. « Cette initiative trouve sa première justification dans le rôle prépondérant que joue notre plateforme politique au niveau des nombreuses institutions du pays dans le contexte de la majorité parlementaire et de la coalition politique, un rôle qui se fonde sur la responsabilité conférée à notre famille politique par le souverain primaire qui lui a confié la majorité dans les deux chambres parlementaires et dans la plupart des assemblées provinciales », a indiqué Mwilanya. « Bien que nous ayons perdu la bataille de l’élection présidentielle, cette confortable majorité traduit le soutien du peuple et nous n’avons pas le droit de prendre le risque de ne pas en tenir compte dans toutes nos initiatives car un échec serait contreproductif et fatal pour les échéances électorales à venir », a-t-il ajouté.
Savoir raison garder
Pour Néhémie Mwilanya, l’expertise du Front commun pour le Congo doit être mise à contribution pour promouvoir un climat sécuritaire stable sur toute l’étendue du territoire national, particulièrement à l’Est ainsi qu’une gestion saine des finances publiques. Pour lui, « il nous revient en outre le devoir de concrétiser, à travers le gouvernement de coalition auquel nous participons, notre projet de société sur le plan social et économique et cette retraite politique est le cadre approprié pour en élaborer le contenu ». Abordant les grandes problématiques de l’heure, le coordonnateur du FCC a évoqué le sujet de la gratuité de l’enseignement de base décrété par la constitution congolaise élaborée sous la première mandature de Kabila et mise en œuvre sans étapes par son successeur Félix-Antoine Tshisekedi pour recommander aux participants de réfléchir à une méthodologie efficace de son implémentation profitable à tous les enfants du Congo sans être court-circuitée par les intérêts partisans des uns et des autres au détriment du système éducatif dans son ensemble. Le calme dont a fait montre le président honoraire de la RDC et chef de file du FCC qui a enjoint ses partisans réunis à Kisantu de ne pas donner suite aux imprécations du président national a.i. de l’UDPS et 1er vice-président de l’Assemblée nationale a manifestement inspiré les faucons de ses partenaires de l’UDPS qui ont eux aussi appelé leurs « combattants » à l’apaisement dans l’intérêt supérieur du pays après une série d’échanges aigres-doux entre les cadres des deux plateformes politiques au pouvoir.
« Je suis en contact permanent avec tous les responsables de nos structures de base. Je n’ai reçu aucun mémo de la base demandant la rupture de la Coalition FCC-CACH », a déclaré à ce sujet Augustin Kabuya, le secrétaire général de l’UDPS sur les antennes de nos confrères de Top Congo FM au cours de la grande émission Le débat. « Sur 54 fédérations qui constituent la base de l’UDPS, avez-vous déjà lu un seul mémo contre la coalition? Quelle base exige le retrait de l’accord FCC-CACH ? », a-t-il rétorqué aux journalistes qui le titillaient sur l’avenir de la coalition FCC – CACH qui semblait prendre eaux de toutes parts.
Coalition pour l’intérêt général
A la question de savoir ce qu’il pensait de l’opinion répandue par certains de ses collègues du parti présidentiel selon laquelle le CACH de Tshisekedi n’avait rien à gagner à rester en coalition avec le FCC de son prédécesseur, le secrétaire général de l’UDPS a répondu qu’il était « convaincu, jusqu’à preuve du contraire, que le chef de l’État est sur la bonne voie avec cette sa coalition ». Et rappelé le fait historique que « Etienne Tshisekedi (père du président et fondateur de l’UDPS ndlr) avait été aussi en 1992 dans un gouvernement d’union nationale issu de CNS avec le dictateur Maréchal Mobutu. Si Félix Tshisekedi a accepté de coaliser avec le FCC, c’est par rapport au contexte. On s’est retrouvé devant une réalité ». Aux détracteurs de la coalition, il a posé la question de l’alternative : « Que proposent exactement ceux qui sont contre la coalition FCC-CACH ? Est-ce qu’ils sont conscients des torts qu’ils risquent de faire subir à la population ? Notre Constitution impose au chef de l’État d’avoir une majorité au Parlement pour pouvoir diriger. Comment le chef de l’État peut-il gérer s’il ne dispose pas d’une majorité parlementaire ? Nous n’avons que 10% à l’Assemblée nationale », a-t-il martelé. Un journaliste ayant fait état de la tenue de la retraite politique du Front commun pour le Congo (FCC) de Mbwela Lodge à Kisantu alors que le Cap pour le Changement (CACH) n’en fait rien, Kabuya recadre ces critiques : « Les gens veulent copier les choses. Quand nous nous réunissons, nous ne faisons pas beaucoup de bruit. Dire que le FCC s’organise et pas le CACH, c’est très bizarre » répond-il à ceux qui estiment que la coalition ayant porté la candidature de Félix Tshisekedi à la Présidence de la République dort alors que le FCC arrête des stratégies. Il révèle donc à ce sujet : « nous nous réunissons avec nos aliés comme Augustin Kibassa Maliba et faisons nos rapports auprès de notre autorité morale Félix Tshisekedi. On se réunit chez le Vieux Yezu Kitenge, Haut représentant du chef de l’État ». A l’évidence, quoiqu’aient pu dire les plus nerveux de leurs lieutenants, Joseph Kabila et Félix Tshisekedi semblent avoir pris la juste mesure des risques qu’encourrait la jeune démocratie congolaise en cas de conflit ouvert entre le Front commun pour le Congo et le Cap pour le changement. Ils ont donc décidé de raison garder et de maintenir le cap.
J.N