A Kinshasa, la capitale de la RD Congo, et sans doute dans toutes les provinces au profond, les contours de la gratuité de l’enseignement de base décrétée par le président Félix Tshisekedi demeuraient floues, 6 jours avant la reprise des cours. Certes, à la clôture de la table ronde sur la gratuité de l’enseignement fondamental qui s’est tenue au Kempisky Fleuve Congo Hôtel de Kinshasa, du 22 au 24, le principe de cette gratuité a été réaffirmé. Les délégués de la présidence de la République, au premier rang desquels le directeur de cabinet adjoint du chef de l’Etat, des membres du gouvernement sortant concernés par la question de la gratuité de l’enseignement, les délégués de la société civile, les syndicats des enseignants, les délégués des confessions religieuses, ainsi que les partenaires techniques et financiers ont convenu du fait que l’éducation est un service public et un droit fondamental stipulé par la constitution de la République, la loi-cadre de l’Enseignement national ainsi que les instruments internationaux et africains dont les Objectifs du Développement Durable (ODD4) et l’Agenda 2063 pour l’Afrique.
La déclaration finale des travaux de Kempisky Fleuve Congo Hôtel précise le contenu de la gratuité décrétée, qui consiste en l’amélioration et au paiement des salaires des enseignants ; l’accroissement et le paiement des frais de fonctionnement ; la fourniture des manuels scolaires et des kits pédagogiques; la construction et la réhabilitation des infrastructures ; le recrutement des enseignants et des inspecteurs. Bref, tous les ingrédients pour délester les parents de la prise en charge des enseignants et des enseignements, qui ne peuvent être financés avec les 7 millions USD prévus au budget de l’enseignement en 2019.
Le contenu de la gratuité
Pas une mince affaire. La table ronde sur l’opérationnalisation de la gratuité de l’enseignement de base a recommandé la prise en charge de tous les enseignants du secteur public ainsi que les nouvelles unités. Les participants ont également suggéré, en plus de l’amélioration des salaires de tous les enseignants, l’octroi d’une prime de diplôme aux enseignants pédagogues et d’une prime de technicité aux enseignants des écoles techniques et professionnelles. Autant que la valorisation de la prime d’itinérance pour les inspecteurs et la restauration d’une prime des brousses au profit des enseignants des milieux ruraux. Mais de ce crucial problème budgétaire, Emery Okundji, le ministre a.i. de l’EPSP fait un problème politique que la volonté du nouveau président de la République suffirait à résoudre. Un budget, ça peut se modifier. On peut concevoir un collectif budgétaire, c’est une question de volonté politique, assure-t-il. Des propos en droite ligne de ceux du représentant du chef de l’Etat à la table ronde sur la gratuité de l’enseignement de base. A l’ouverture des travaux, le 24 août à Kinshasa, le directeur de cabinet adjoint du président de la République avait en effet avancé que la prise en charge de la gratuité de l’enseignement coûterait 28 millions USD/mois au Trésor, soit quelques 336 millions USD à décaisser annuellement pour l’enseignement de base. Une enveloppe y relative aurait été mise de côté sur ordre du chef de l’Etat, selon Okundji. Mais on est encore loin des 2 milliards USD par an avancés par certaines organisations de la société civile.
Les participants aux travaux semblaient en avoir pleine conscience. La gratuité de l’enseignement de base a un caractère progressif, stipule la déclaration finale de la table ronde, tout en étant effective dès le 2 septembre prochain, date de la rentrée scolaire.
Gratuité progressive
Pour faire face à l’énorme défi du financement de la gratuité, des ressources extrabudgétaires ont été proposées. Notamment, le recours à la parafiscalité. Les participants aux travaux ont ainsi recommandé parmi les mécanismes de financement de l’enseignement de base, l’instauration d’une taxe ou d’un impôt de solidarité en faveur de l’éducation. Il pourrait, manifestement, remplacer la contribution parentale, trop fluctuante selon les écoles et les provinces.
Mais en fin de compte, il faut attendre, pour apprécier la portée de la gratuité de l’enseignement de base cette année scolaire, les financements de départ qui auront été consentis fin septembre par l’autorité budgétaire (Parlement). « Jusque-là, tout ce qui a été dit n’est qu’un discours, des réflexions, des termes de référence etc. Maintenant nous attendons de voir le gouvernement de la République à l’œuvre. Que les bénéficiaires de la gratuité que sont les enseignants, les parents, les élèves pour que tous ceux qui font partie du système éducatif puissent en goûter le fruit.. C’est ce qui est important », déclarait un syndicaliste à l’issue de la table ronde du Kempisky Fleuve Congo Hôtel.
H.O.