La ville de Kinshasa, plus de 10 millions d’habitants, est en proie à ce que les experts de la REGIDESO SA appellent, « stress hydrique ». En clair, des soucis d’eau. Par conséquent, la société a soumis au régime de « rationnement certains quartiers et communes. En même temps qu’elle mûrit l’un de plus ambitieux projets de ses 90 ans d’activités.
La Regideso SA compte, en effet, transférer une partie des eaux qu’elle traite dans son usine de Binza Ozone (Banlieue Ouest de Kinshasa) vers ses réservoirs de Makala, pour desservir les municipalités enclavées du Sud-Est de la capitale. D’imposants tuyaux traverseraient ainsi un pan de la ville de Kinshasa sur des centaines de mètres.
Voilà sans doute pourquoi la Régie de distribution d’eaux veut au préalable s’assurer de l’impact environnemental et social que ce projet pourrait causer d’autant plus que ses canaux devraient traverser des zones à forte densité démographique et un relief très complexe. Il serait hasardeux à ce stade d’estimer le coût du projet, fait remarquer un expert-maison. Depuis fin février 2019, l’entreprise a donc lancé un appel d’offre pour recruter une firme chargée d’élaborer l’étude d’impact environnemental et social (EIES) du projet de transfert d’eau traitée de l’usine d’Ozone vers les réservoirs de Makala.
Jadis, un gros village à l’instar de Mombele, Makala se situe sur une rupture de pente, entre la plaine alluviale du fleuve Congo et les collines du Sud de la capitale. Les collines se composent en effet des monts Ngaliema, Amba et Ngafula, qui ont une attitude comprise entre 350 et 675 m.
Comme les communes voisines de Ngaba, Bumbu et Selembao, aussi concernées par le projet de la REGIDESO SA, Makala a connu un début d’urbanisation dans les années 1957 et a été construit avec un plan dit en damier géométrique. Ce plan, certes pratique, mais adaptée sur des pentes des collines, entraine de l’avis des experts, des érosions surtout en période de pluies.
Travaux prévus non réalisés
Au dernier trimestre 2018, la REGIDESO SA avait d’ailleurs prévu des travaux de réhabilitation de ses deux réservoirs de Makala d’une capacité de 12.000m3 chacun, la fourniture et la pose des conduites sur les avenues Kikwit, Ndjoko, réseau Makala/Elengesa et Gombele-CNPP.
Le directeur général de la REGIDESO SA, Clément Mubiayi, s’est dit satisfait de l’évolution des travaux sur différents chantiers au terme de sa dernière visite fin 2018, en compagnie du représentant de la Banque mondiale, Pierre Boulanger.
Mais la REGIDESO SA se fait plus de soucis pour son usine d’Ozone dont les travaux de construction lambinent faute de financement. La Banque mondiale qui devrait financer les travaux, a gelé, sans raison, le décaissement. Il sied toutefois de rappeler que le représentant résident de la Banque mondiale à Kinshasa avait publiquement déploré le manque de volonté politique du gouvernement pour financer la REGIDESO SA. L’usine d’Ozone devrait avoir une capacité de 110.000m3, selon la présentation que la REGIDESO SA avait fait aux médias en novembre 2018.
Quelques mois plus tôt, sur les sites de Méteo et Djelo Binza, la REGIDESO SA s’est employée à recoller des pans de son réseau ouest, notamment en posant une nouvelle conduite de refoulement dite DN 900 FD reliant la station SP-HP-Ozone au réservoir de Météo, sur un linéaire de 4400 m. La REGIDESO SA avait aussi changé sa conduite de refoulement DN 700 FD reliant SP-HP-Météo au réservoir de Djelo-Binza, sur un linéaire de 4950 m…en vue de son projet pharaonique, Ozone-Makala.
L’entreprise n’en est pas à sa première expérience de transfèrement d’eau. En août 2015, au plus fort de l’étiage, la baisse du niveau des cours d’eaux, la REGIDESO SA avait résolu de détourner le lit de la rivière Kakanga afin de transférer ses eaux dans la rivière Murhundu où la société capte de l’eau pour desservir la ville de Bukavu, plus de 1 million d’habitants. La REGIDESO SA gagnerait ainsi quelque 700.000m3 d’eau au quotidien. L’entreprise a un réseau primaire, secondaire et tertiaire confondus de 9 998 km, pour quelque 3 567 km de branchements. De sources recoupées, le taux d’accès à l’eau dans la capitale est d’environ 35%.
POLD LEVI MAWEJA K.