Entre l’église catholique de la RD Congo, tout au moins une partie de ses princes, les relations sont rentrées dans l’ordre … clérical. Le comité permanent de la Conférence Episcopale Nationale du Congo l’a déclaré à la faveur d’une émission radiodiffusée à laquelle participaient son président, Mgr Marcel Uthembi, flanqué de l’Abbé Donatien Nshole, le porte-parole des prélats. Le retournement, – parce qu’à il y a peu, les calottes sacrées catholiques étaient toutes cornes dressées contre l’élu à la présidentielle du 30 décembre 2018-, a été annoncé le 15 janvier 2019, 11 jours après que Félix-Antoine Tshilombo Tshisekedi eut solennellement prêté serment et pris ses fonctions. Ce n’était pas trop tôt, mais le temps de n’écoule pas à la même vitesse ni de la même manière pour Dieu, ses représentants terre des hommes, et les hommes eux-mêmes. ‘Mieux vaut tard que jamais’, assure un adage optimiste. Ainsi que Donatien Nshole, le porte-parole de leurs excellences les évêques catholiques : « Le Chef de l’Etat qui est là est reconnu officiellement et nous ne pouvons que composer avec lui », a-t-il expliqué en marge de la cérémonie de présentation des vœux au Président de la République. «Du moment que la Cour constitutionnelle s’est prononcée, la CENCO n’a dit mot, par respect pour les institutions de la République », a encore proclamé ce prêtre de l’archidiocèse de Kinshasa, qui héberge 12 millions d’âmes, dont 4 millions d’électeurs.
Seulement, les déclarations du Révérend Nshole ne furent pas conformes à la vérité. Pas tout à fait. Jusqu’au 23 janvier 2019, Nshole et ses évêques campaient sur leur position : les résultats publiés par la CENI et confirmés par la Cour constitutionnelle, la plus haute instance judiciaire du pays, ne correspondaient pas aux compilations cléricales. Et n’étaient donc pas vrais. A Kinshasa, l’archevêque métropolitain et vice-président de la CENCO, Mgr Fridolin Ambongo, livrait le point de vue de ses pairs à la presse qui l’interrogeait sur leur participation à la cérémonie de prestation de serment du nouveau Chef de l’Etat à laquelle ils avaient été formellement conviés : «une invitation n’est pas une convocation. Ce serait comme nous renier nous-mêmes » martelait-il. L’archevêque de Kinshasa faisait allusion aux travaux des observateurs électoraux de l’église catholique, au nombre de 40.000 selon la CENCO, pourtant contredite par la CENI qui ne reconnaissait que quelque 18.000 observateurs formellement accrédités pour le compte des catholiques. 18.000 personnes chargées d’observer quelques 80.000 bureaux de vote avant de rendre leurs rapports, qui ne pouvaient contenir des résultats électoraux, pour la bonne et simple raison que les observateurs n’y ont pas droit, conformément à la loi électorale en vigueur.
Mais des lois du pays, l’église catholique a habituée les rd congolais à les ignorer proprement, longtemps avant de contester la proclamation des résultats officiels par la cour constitutionnelle. De mission d’observation, l’armada catholique financée par des nébuleuses étrangères s’est muée en centrale électorale parallèle, effectuant sa propre compilation de résultats de la présidentielle obtenue on ne sait où, diffusant aux quatre vents de la planète des résultats qui donnaient Félix-Antoine Tshisekedi perdant au profit de Martin Fayulu, le candidat adoubé quelques mois plus tôt par des puissances occidentales dans un établissement cossu genevois.
C’en était trop, assurément, et des contestations ont fusé, y compris parmi les princes de l’église eux-mêmes. Au terme d’une session extraordinaires les 25 et 26 janvier à Kananga de l’Assemblée épiscopale provinciale (qui comprend les provinces du Grand Kasai), les prélats locaux se sont désolidarisés de la hiérarchie de la CENCO en se félicitant de l’élection de Félix Tshisekedi comme 5ème président de la RD Congo. Les démons de la division s’étaient emparé des âmes des princes de l’église. Aussi. Dans une déclaration, le 27 janvier, ces prélats écrivaient que « nous bénissons Dieu pour le nouveau président de notre pays, Monsieur Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo » dont l’élévation à la magistrature suprême était aussi le couronnement du long combat de son père, Etienne Tshisekedi, l’opposant historique, selon ces princes de l’église catholique dans les provinces kasaiennes dont le nouveau Chef de l’Etat est originaire. « Dans ce Congo nouveau, l’Eglise ne sera jamais distraite ni partisane. Conduite par le Saint-Esprit, elle doit demeurer une mère pleine de sollicitude pour tous ses fils … » ponctuaient les prélats. Le ton était net. Les prélats de l’Ouest auront courbé l’échine, face à la fermeté de leurs collègues du centre, et rangé l’artillerie déployée contre Fatshi. Reste à savoir pour combien de temps.
J.N.