Au Nord et au Sud- Kivu, les avancées enregistrées dans les négociations entre Kinshasa et Kigali, d’une part, et entre Kinshasa et les renégats de l’AFC/M23, d’autre part, n’ont encore aucun impact notable sur la situation militaire. Les armées congolaises et rwandaises s’affrontent, directement ou indirectement, par supplétifs congolais et forces d’autodéfense interposées.
Même si on ne peut affirmer de manière certaine que les affrontements tournent à l’avantage des forces loyalistes congolaises qui étaient sur la défensive depuis l’occupation des villes symboliques et stratégiques de Goma et de Bukavu début 2025, il semble que les forces assaillantes de la coalition RDF-AFC-M23 enregistrent un net ralentissement dans leurs ambitions d’expansion territoriale.
Mercredi 12 novembre 2025, il a ainsi été rapporté d’intenses affrontements entre rebelles de l’AFC/M23 et les résistants Wazalendo dans le secteur de Namaboko (groupement Osso-Banyungu) dans le territoire de Masisi (Nord-Kivu). Les localités de Ngululu et Katandwa ont cristallisé ces affrontements qui ont culminé avec l’occupation du village de Mulema par les Wazalendo, tandis que les rebelles et leurs mentors rwandais prenaient le contrôle du village de Karere à 3 km du centre de Kazinga, selon des sources locales.
Après une nuit agitée, un calme précaire s’observait dans la cité de Mwesso, le même mercredi matin, après une nuit trouée par des détonations d’armes légères. Selon des sources locales, les rebelles de l’AFC/M23 tiraient des salves en l’air pour manifester leurs colère et dépit après le décès d’un de leurs officiers, tué au cours d’une embuscade tendue par les Wazalendo sur l’axe Mokoto-Kibarizo. D’autres sources dans la région indiquent que des frappes de drones à Masisi et à Mwesso seraient à la base de la débandade et de la panique observée dans les rangs rebelles qui auraient perdu quelques compagnies de combattants, dont des éléments des Rwanda Defense Forces.
Kivuye déserté par ses habitants
Dans le même territoire de Masisi, Kivuye, un village de la chefferie des Bashali, a été complètement déserté par ses habitants en raison d’affrontements à répétition entre les rebelles de l’AFC/M23 et les Wazalendo. Des centaines d’hommes, femmes et enfants se sont dirigés vers Busumba, Mpati, Rogogwe, Kalengera et Kibarizo. Les sources locales renseignent, néanmoins, que Kivuye est, militairement, divisé en deux parties occupées par chaque groupe belligérant. Dans ce village, les affrontements qui remontent à jeudi 6 novembre 2025 ont provoqué la paralysie de toutes les activités économiques.
Dans le territoire voisin de Rutshuru, des affrontements opposant les renégats de l’AFC/M23 aux Wazalendo du groupe CMCM-FDP ont été signalés dans la nuit du dimanche à lundi 10 novembre dernier à la suite d’une attaque des rebelles contre les positions des forces de l’autodéfense paysanne. Jusque lundi matin, des détonations d’armes lourdes étaient entendu à une quinzaine de km du centre de Kitchanga, empêchant l’accès des paysans à leurs champs sur l’axe Bukombo et à Kyahemba.
Dans un communiqué publié le 8 novembre dernier, les FARDC avaient confirmé ces affrontements en dénonçant et en accusant les renégats de l’AFC/M23 d’intensifier les attaques contre leurs positions. Au Nord-Kivu, ces attaques ont ciblé Kasopo et Kajinga dans le groupement Nyamaboko 1, secteur d’Osso-Banyungu (Masisi), ainsi qu’une tentative d’occupation du Mont Irimwi vers Bunyatenge dans le territoire de Lubero.
Au Sud-Kivu, les FARDC ont fait état d’attaque rebelles à Bulambula et Kibanda Mangobo sur l’axe Walungu-Shabunda, au Pont sur la rivière Mudugwe sur l’axe Walungu-Mwenga ainsi qu’à Tuwetuwe, attaqué par les rebelles Twirwaneho sur l’axe Fizi-Minembwe (Sud-Kivu).
Selon la société civile du Sud Kivu, les récents affrontements entre Wazalendo et Twirwaneho dans les villages des territoires de Fizi et de Mwenga ont provoqué le déplacement de près de 552 ménages comptant environ 3.425 habitants. Parmi ces villages, Tuwe Tuwe, Kitasha, Ngezi, Bilalo-Mbili et Point Zéro sont les plus touchés par les combats.
Plus 500 redditions
Ceci explique-t-il cela ? Cette intensification des affrontements sur le terrain s’accompagne de mouvements de plus en plus fréquents de redditions ou de défections dans les rangs des renégats.
Le 6 novembre à Beni, chef-lieu provisoire de la province du Nord-Kivu, une quarantaine de policiers et militaires recrutés de force après la prise de Goma par les forces armées rwandaises et leurs supplétifs congolais ont été présentés aux autorités en charge de l’administration militaire.
Le 10 novembre, c’est une vague de 77 combattants cantonnés à Walikale en attendant l’évacuation vers Kisangani qui avait été présentée aux autorités et à l’opinion. Les combattants avaient d’abord rejoint les positions des Wazalendo dans la région avant d’être remis aux FARDC. Parmi eux, d’anciens policiers et des militaires en provenance de Masisi, de Rutshuru, de Walikale (Nord-Kivu et de Kalehe (Sud-Kivu). Cette vague de défections porte à 577 le nombre de rendus acheminés à Kisangani en l’espace de deux mois.
J.N.