Le 2 avril 2025, le président américain, Donald Trump, a annoncé l’imposition de nouveaux tarifs douaniers, qualifiés de «réciproques», sur les importations en provenance de plusieurs pays, dont la RDC. Selon l’administration américaine, le taux de 11 % désormais appliqué aux produits congolais refléterait, comme pour d’autres pays, le niveau des barrières tarifaires que la RDC imposerait aux exportations américaines.
Cependant, cette justification repose sur une méthode de calcul particulière. Elle consiste à établir le déficit commercial des États-Unis avec un pays donné, à le diviser par la valeur totale des importations en provenance de ce pays, puis à diviser le résultat par deux pour obtenir le taux de douane appliqué. Si ce calcul donne un chiffre inférieur à 10 %, ou en cas d’excédent commercial, un taux plancher de 10 % est appliqué.
La RDC applique des droits de douane standards, conformes aux règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), sans mesures discriminatoires spécifiques à l’encontre des produits américains. Selon les données officielles, ces droits varient de 5 % à 20% de la valeur du produit hors frais de transport et d’assurance, en fonction de la nature des marchandises. À ces droits s’ajoutent diverses taxes, dont la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), qui peut porter le coût total du dédouanement à plus de 44,7 % de la valeur du produit.
Opportunités
Ainsi, le taux de 11 % finalement appliqué reste globalement avantageux pour la RDC. Le pays d’Afrique centrale échappe en réalité à une tarification plus lourde, en raison de la faible valeur des échanges commerciaux avec les États-Unis et d’un excédent commercial modeste (70 millions de dollars en 2024).
Les États-Unis ne figurent pas parmi les principaux clients de la RDC, bien que les échanges soient en progression. Selon le Bureau du représentant américain au Commerce, en 2024, les exportations congolaises vers les États-Unis ont atteint 323,1 millions USD, enregistrant une hausse de 17,5% par rapport à 2023. Ces exportations incluent principalement des minerais et des métaux, tels que le cobalt et le coltan, essentiels à l’industrie technologique américaine. Les exportations agricoles, notamment le café et le cacao, ont quant à elles généré 31,5 millions USD en 2022.
Dans ce contexte, l’imposition de droits de douane à 11 % pourrait même ouvrir de nouvelles opportunités pour la RDC, qui dispose d’importants atouts en matière de ressources naturelles.
Dans le secteur minier, qui représente la majeure partie des exportations congolaises, la RDC est soit moins taxée, soit soumise à un niveau similaire de taxation par rapport à ses concurrents. À titre de comparaison : le Chili et le Pérou sont soumis à un tarif de 10 %, la Chine à 54 %, l’Indonésie à 32 % et la Zambie à 17 %. Cette configuration pourrait permettre à la RDC de conserver sa position actuelle sur le marché américain, voire de gagner en compétitivité face à certains concurrents.
AGOA
Par ailleurs, certains minerais et métaux produits par la RDC ne sont pas concernés par ces nouveaux droits de douane. Selon la Maison-Blanche, les lingots d’or, les produits pharmaceutiques, les semi-conducteurs, le cuivre, le bois de construction, les produits énergétiques, ainsi que les minerais non disponibles sur le sol américain, sont exonérés de ces nouvelles mesures tarifaires.
Dans le secteur agroalimentaire, la décision de Donald Trump pourrait également ouvrir des perspectives pour le cacao congolais sur le marché américain. Ce produit pourrait concurrencer celui des deux leaders mondiaux, la Côte d’Ivoire et le Ghana, qui représentent à eux seuls 60% de l’offre mondiale. Ces deux pays sont désormais taxés respectivement à 21 % et 17 %, contre seulement 11 % pour la RDC.
Ces nouveaux droits de douane interviennent alors que la RDC, comme de nombreux pays africains, bénéficie encore des avantages de l’African Growth and Opportunity Act (AGOA), une loi américaine promulguée en 2000 visant à faciliter l’accès des produits africains au marché américain, en supprimant les droits d’importation sur plus de 6.800 produits.
Cependant, l’entrée en vigueur immédiate des nouveaux tarifs douaniers, prévue pour le 9 avril 2025, soulève des interrogations sur la survie de l’AGOA, dont l’échéance actuelle est fixée au 30 septembre 2025.
AVEC G. A. B et B. K.