KoBold Metals souhaite reprendre une partie du projet de lithium de Manono, situé dans la province du Tanganyika en République démocratique du Congo, actuellement au cœur d’un litige juridique entre la société publique Cominière et le groupe australien AVZ. Selon l’agence Bloomberg, la compagnie minière américaine, soutenue notamment par les milliardaires Bill Gates et Jeff Bezos, a adressé le 21 janvier 2025 une lettre au chef de cabinet du président congolais, Félix Tshisekedi, en ce sens.
D’après les informations relayées le 21 mars dernier par le média américain, KoBold propose un arrangement dans lequel AVZ recevrait une «compensation appropriée» en échange de l’abandon de ses prétentions sur le projet. Dans ce scénario, le groupe chinois Zijin conserverait la partie nord du gisement, tandis que KoBold prendrait en charge le développement de la partie sud. L’entreprise américaine suggère également que la participation minoritaire au projet soit directement assurée par l’État congolais, plutôt que par Cominière.
Depuis 2023, AVZ conteste la décision des autorités congolaises de lui retirer ses droits sur le projet Manono et de scinder le permis d’exploitation, dont une partie a été attribuée au groupe chinois Zijin Mining. Le tribunal arbitral de la Chambre de commerce internationale (CCI) a récemment condamné la société publique cominière à verser 39,1 millions d’euros de pénalités pour non-respect d’injonctions. Toutefois, la juridiction ne s’est pas encore prononcée sur le fond de l’affaire.
AVZ, Zijin Mining et Suzhou Cath Energy
Outre Zijin Mining, partenaire de Cominière, un autre acteur chinois est impliqué dans ce dossier : Suzhou CATH Energy Technologies. En janvier 2025, cette société a mobilisé une facilité de crédit de 20 millions USD pour soutenir AVZ dans sa bataille juridique.
Pour l’heure, aucune des parties concernées n’a officiellement réagi aux récents développements. Le 14 mars, cependant, AVZ a confirmé chercher du soutien aux États-Unis pour faire avancer le développement du projet Manono, comme rapporté par le journal The Australian. La société a précisé avoir « rencontré diverses parties qui ont exprimé leur intérêt pour le projet Manono », sans toutefois révéler l’identité des interlocuteurs ni les objectifs précis des discussions engagées.
Ces développements s’inscrivent également dans un contexte géopolitique plus large. La RDC et les États-Unis discutent depuis quelque temps d’un accord sur les minerais critiques. Kinshasa cherche à obtenir le soutien de Washington dans sa lutte contre les groupes rebelles actifs dans l’Est du pays, en échange d’un accès privilégié des entreprises américaines aux ressources minières congolaises.
Premier grand mouvement américain
KoBold est une jeune compagnie minière qui s’est fait connaître en 2022 en investissant dans le développement d’un gisement de cuivre en Zambie. L’entreprise ambitionne de mettre les nouvelles technologies, en particulier l’intelligence artificielle, au service de l’exploration des minerais stratégiques nécessaires à la transition énergétique. En 2023, son PDG, Kurt House, affirmait que la RDC est probablement « le meilleur endroit au monde » pour les matériaux que recherche sa société.
Dans le contexte géopolitique de la région des Grands Lacs africains, le projet Kobold n’est pas un projet parmi tant d’autres. Il s’agit du tout premier grand mouvement d’un géant minier américain vers la RDC, depuis que le pays de Félix Tshisekedi s’est lancé dans des discussions, que l’on dit avancées, avec Washington sur un partenariat stratégique portant sur un échange minerais critiques contre appuis sécuritaires. Le signal est d’autant plus fort que la Chine, comme on le sait contrôle déjà une grande partie des chaînes d’approvisionnement en Afrique.
J.N. AVEC AGENCES