Alors que les menaces de suspension de l’aide financière dont dépend largement son économie se multiplient, Kigali a voulu faire sensation, le 18 février 2025, en annonçant la suspension de sa coopération au développement avec le Royaume de Belgique. Le pays des mille collines reproche à Bruxelles d’avoir pris le parti de la RDC dans le conflit armé qui oppose les deux pays voisins. En RDC, les relais médiatiques du Rwanda ont tôt fait de présenter cette décision comme une sanction du quémandeur contre le donateur. «Le Rwanda sanctionne la Belgique», a-t-on lu ci et là.
En réalité, le gouvernement de Paul Kagame n’a renoncé qu’à une partie de l’aide belge. Celle qui reste du programme de financement 2024-2029, soit quelque 95 millions d’Euros. Sans pour autant se prémunir des conséquences des effets d’annonce de cette décision manifestement peu réfléchie.
Selon Bloomberg, le conflit entre le Rwanda et la Belgique au sujet de la guerre en RDC a fait chuter les obligations du pays de Paul Kagame, mercredi 19 février 2025. Encore qu’il reste à établir si les états financiers rwandais, généralement falsifiés et déformés, ainsi que les circulaires d’émission d’obligations, n’ont pas été falsifiés. «Depuis des années, le Rwanda fait de fausses déclarations sur ses richesses minières et sa croissance économique. Les déclarations économiques du Rwanda ne réflètent pas la réalité. Le Rwanda n’a pas produit les minéraux qu’il vend. Il a blanchi des minéraux du Congo», commente à ce sujet,Judi Rever, une journaliste canadienne spécialiste de la région des Grands Lacs.
Mardi 18 février, le ministère britannique des Affaires étrangères a convoqué Johnston Busingye, chargé d’Affaires rwandais à Londres, pour lui demander des explications au sujet de l’occupation de la ville congolaise de Bukavu par l’armée de son pays.
Londres exige des explications
24 heures après, le diplomate rwandais s’est fendu de deux pages de justification de l’attitude de son pays. Parce que de Londres, Kigali reçoit, notamment, 41,3 millions de livres sterling au titre de financement budgétaire annuel direct, en plus d’un financement extérieur du gouvernement. Périlleux de cracher dessus en osant une rupture de l’aide !
Dans la réponse du plénipotentiaire rwandais, la même rhétorique surannée, qui passe de moins en moins, même à Londres. «Les forces de défense rwandaises ont toujours maintenu des mesures défensives en réponse aux véritables menaces sécuritaires le long de notre frontière», écrit-il. Alors que tout le monde sait que ces mesures défensives sont déployées sur le territoire de la RDC où elles perturbent jusqu’aux vols aériens et opérations de la mission onusienne (MONUSCO). «Le Rwanda continue de faire face à une menace sécuritaire existentielle de la part de la milice génocidaire FDLR soutenue par la RDC, qui a été impliquée dans le bombardement du territoire rwandais en juin 2022, (…) les FDLR ont mené au moins 20 attaques sur le territoire rwandais sont désormais intégrées à l’armée congolaise en tant qu’allié stratégique», ment encore éhontément ce représentant de Paul Kagame à la Grande-Bretagne. Avant de caresser le pays hôte et la communauté internationale dans le sens du poil. Son pays «est un fier contributeur au maintien de la paix de l’ONU, avec une histoire avérée de conformité à toutes les normes, y compris en ce qui concerne les autres missions», écrit-il encore, accusant la MONUSCO de se mêler à la coalition de la RDC qui inclut et implique les FDLR génocidaires.
Un coup de bluff diplomatique
Selon nombre d’observateurs, la suspension de la coopération au développement avec la Belgique, annoncée par Kigali, n’est qu’un gros bluff diplomatique, une réponse préventive. En effet, la Belgique se préparait déjà à réduire son financement en faveur de ce pays en raison de son implication dans la guerre qui sévit à l’Est de la RDC. «Il s’agit d’une mesure stratégique de contrôle et de limitation de dégâts».
Néanmoins, Bruxelles y a donné suite. Gentiment mais fermement. Selon une réaction officielle publiée le 19 février 2025, la Belgique prend note de la décision du Rwanda de suspendre le programme de coopération bilatérale. «Suite à la violation par le Rwanda de l’intégrité territoriale de la RDC, nous étions en train de revoir notre coopération en vue de prendre des mesures décisives en réponse à cette situation. Nous sommes engagés dans un processus de suspension professionnel qui préserve les acquis de notre coopération de longue date au profit du peuple rwandais. Nous sommes déterminés à poursuivre nos efforts de sensibilisation et de mobilisation de la communauté internationale pour trouver une issue pacifique au conflit à l’Est de la RDC, fondée sur le droit international», précise la note.
J.N. AVEC LE MAXIMUM