Le président Félix Tshisekedi a élevé, le 28 janvier 2025, le général de Brigade Evariste Somo Kakule au grade de général-major, avant de le nommer gouverneur militaire de la désormais province martyre du Nord-Kivu. L’officier général de 50 ans (né le 7 août 1973) succède au général-major Peter Cirimwami, qui avait succombé au tir d’un sniper de l’armée rwandaise alors qu’il inspectait les troupes engagées au front dans la périphérie de Goma, jeudi 23 janvier 2025. En le nommant, quelques heures après que les forces armées rwandaises et leurs supplétifs du M23 eurent attaqué et occupé Goma, le chef-lieu de la province du Nord-Kivu, le commandant suprême des FARDC indique qu’il n’a pas l’intention de renoncer à la solution armée pour régler le problème de l’Est rd congolais. Evariste Somo a reçu mission de «renforcer la coordination des opérations militaires et de restaurer l’autorité de l’Etat», ainsi qu’il l’a déclaré dans le message à la nation lu mercredi 29 janvier 2025 dans la soirée.
Dans une province en guerre, dont plusieurs agglomérations et localités sont occupées par les forces ennemies, marquées par d’incessants mouvements de populations affectées par les affrontements, la tâche du nouveau gouverneur ne sera pas facile. Mais l’homme semble plutôt avoir les reins solides, la tête bien faite et traîne une expérience avérée.
Commandant de la 31ème Brigade d’intervention rapide
Avant d’être propulsé à la tête du Nord-Kivu, le général-major Evariste Somo dirigeait depuis quelques mois, dans la région de Lubero investie par les terroristes du M23 et les troupes de l’armée rwandaise, la 31ème Brigade d’intervention des FARDC. Il s’agit de ces troupes d’élite formées par l’armée belge à Lukando dans le Maniema, que des observateurs rangent parmi les meilleures de la RDC. Dans la région, on doit à cette brigade la fin de la progression des troupes ennemies qui visaient depuis plusieurs mois les villes commerciales et administratives de Butembo et de Beni dans le Grand Nord-Kivu. Même si le parcours de cet excellent officier général pourtant apprécié, ne fut pas toujours un long fleuve tranquille.
Avant d’être replacé à la tête de la brigade d’intervention rapide des FARDC, Evariste Kakule s’était vu affecté à la tête de l’administration militaire dans la lointaine province du Haut-Katanga, sur un ordre de l’Etat-major général FARDC diversement interprété par les spécialistes. A l’instar de ceux du Blog Afridesk, qui écrivaient en juillet 2020 que «sans exiger du chef de l’État de créer une nouvelle armée et de nommer ses propres généraux, il existe pourtant de bons officiers, commandants d’unités au sein des FARDC. Malheureusement, on constate avec étonnement qu’ils sont déplacés de leurs unités où ils évoluaient avec efficacité pour être nommés à des postes administratifs alors que des généraux suspectés de collusion avec les rebelles sont nommés dans des zones des massacres. C’est le cas du général de Brigade Evariste Somo Kakule, l’ancien commandant de la 31ème brigade de réaction rapide basée à Kindu».
L’oiseau rare ?
Tout porte donc à croire qu’au Nord-Kivu, Félix Tshisekedi a peut-être trouvé l’oiseau rare qui faisait défaut pour réaliser ses desseins de résilience et de grandeur de son pays. Ses armes, le nouveau gouverneur militaire les prend d’abord au sein de l’Armée du Peuple Congolais (APC), cette branche armée du RCD-K-ML d’Antipas Mbusa Nyamwisi, mais il n’a jamais arrêté de les affuter, multipliant formation sur formation depuis l’intégration des troupes de l’ancienne rébellion pro-Kinshasa au sein des FARDC au milieu des années ‘2000. Natif de Goma, «Eva» qui pratique de nombreuses langues de la région en plus de l’anglais et du français, décroche ainsi un diplôme de licence en droit public avant de se former au Collège des Hautes Etudes de Stratégie de Défense à Kinshasa (CHESD O2), à l’Ecole Royale militaire Belge (ERM) ainsi qu’à l’Ecole Supérieur d’Etat-major de Kinshasa.
Le général-major Evariste Somo est ainsi un commando breveté et parachutiste formé à Schaffen en Belgique ; expert en opérations psychologiques, renseignements et instruction militaire ; et instructeur commando.
Expérience militaire avérée
Sur le terrain des opérations militaires en RDC, le nouveau gouverneur militaire du Nord-Kivu a récemment été commandant troupes de l’Axe Sud comprenant les régions du Grand Nord Kivu et de Lubero, après avoir dirigé la 31ème brigade de réaction rapide des FARDC. Fonctions et postes qui lui ont donné l’occasion de s’illustrer dans les affrontements contre les rebelles ougandais de l’ADF et du M23 au Nord-Kivu ; les Malaïka au Maniema (2018-2019) ; les Bakata-Katanga du Triangle de la mort dans l’ancienne province du Katanga ainsi que les insurgés Enyele dans l’ex-province de l’Equateur.
Dans son Nord-Kivu natal, Evariste Somo, ancien cadre politico-militaire du RCD-K-ML, a eu l’occasion de diriger les renseignements militaires, de représenter le mouvement rebelle aux pourparlers de Lusaka en Zambie, d’affronter les rebelles de l’ADF/Nalu et de superviser l’intégration de ses compagnons d’armes au sein de l’armée nationale.
Selon des sources dans la région, le nouveau gouverneur militaire du Nord-Kivu pourrait s’installer à Beni, faute de pouvoir résider dans Goma soumis aux assauts de l’armée rwandaise et ses supplétifs terroristes du M23. La capitale administrative du Grand Nord-Kivu présente, à cet effet, l’avantage de disposer de l’aéroport de Mavivi, stratégique pour préparer la contre-offensive attendue pour bouter les agresseurs hors du territoire national.
En attendant, l’homme se trouvait encore, au moment où Le Maximum mettait sous presse, sur le terrain des opérations dans la région de Lubero. Mercredi 29 janvier 2025, le général-major Evariste Somo a dirigé sa première réunion en qualité de gouverneur à travers un entretien avec le général-major Bruno Mandevu, commandant du secteur opérationnel Sukola I Grand Nord et Front Nord, qu’entouraient tous les officiers engagés dans les opérations militaires contre les l’armée rwandaise et ses supplétifs au Sud du territoire de Lubero. Même si les secrets des délibérations des galonnés n’ont pas filtré, comme de coutume, il reste que le nouveau gouverneur militaire du Nord-Kivu n’aura pas tardé à se mettre au travail.
J.N. AVEC LE MAXIMUM