Les pays africains et la Russie pourront mettre en œuvre un nouvel ordre mondial et déconstruire les restes de l’approche néocolonialiste prônée par l’Occident. C’est le point de l’influence et activiste panafricaine, Nathalie Yamb, qui a pris part à la conférence Russie-Afrique préparatoire au sommet prévu à Saint Pétersbourg à l’été prochain. Elle évoque les atouts de la dédollarisation et du commerce en monnaies locales.
Présente à Moscou à la deuxième conférence parlementaire Russie-Afrique, elle analyse le contexte géopolitique actuel qui met en valeur le rôle croissant de la Russie et des pays africains et qui témoigne de «la mort inéluctable de l’hégémonie occidentale» pour nos confrères de Sputnik.
«Un système hégémonique est en train de mourir, il se débat et ça part de tous les côtés: il y a des sanctions, il y a des menaces, il y a des conflits. On essaie de tordre le bras aux uns, on essaie de casser le moral et l’économie aux autres. Ça, ce sont les soubresauts d’un ordre mondial qui est en train d’agoniser et de mourir», soutient-elle.
À l’inverse, le continent africain et la Russie verront leurs rôles transformés: «Aussi bien la Russie que les pays africains ont une chance de réécrire un ordre mondial multipolaire auquel tout le monde aspire».
Perspectives du sommet Russie-Afrique
La conférence parlementaire Russie-Afrique qui s’est tenue le 20 mars a pour but de renforcer le dialogue russo-africain en vue du sommet Russie-Afrique, programmé pour juillet.
D’après Nathalie Yamb, «ce sommet va permettre de réaliser certaines décisions et certains contrats qui avaient été signés en 2019 et que les circonstances ont mis en suspens, surtout dans cette période géopolitique où les uns comme les autres sont très ostracisés».
Un néocolonialisme à déconstruire
L’activiste pointe l’optique néocolonialiste des organisations internationales. «Nous faisons partie d’organisations comme l’ONU qui ont été créées en 1945 alors que nos États africains n’existaient pas dans leur forme actuelle. Les organisations internationales comme l’ONU, comme la Banque mondiale, comme le FMI […] reconnaissent à ces puissances coloniales un droit de parole nous concernant. C’est tout ça qu’il nous faut déconstruire et le moment géopolitique actuel nous donne l’occasion de casser ce qui existe et de reconstruire quelque chose qui reflète mieux l’état du monde actuel», considère-t-elle.
Actuellement, la France et d’autres ex-puissances coloniales «considèrent toujours que l’Afrique est leur propriété», selon l’activiste.
«Devenir nos propres maîtres»
Sur le volet économique, Nathalie Yamb prône la dédollarisation des économies africaines. «Dès lors que vous utilisez le dollar, vous êtes soumis l’extraterritorialité de la loi américaine. Le moment actuel nous encourage tous à devenir nos propres maîtres, les maîtres de nos économies», poursuit-elle.
RDC : «potentiel d’émergence important» avec Moscou et les BRICS
La Russie et les autres membres des BRICS ont l’expérience dont pourrait profiter la RDC, a estimé pour sa part le sénateur Léonard She Okitundu en marge de la 2e conférence parlementaire Russie-Afrique sur les avantages des relations russo-africaines en général, et principalement russo-congolaises.
La RDC a «un potentiel d’émergence important» avec la Russie et les autres pays des BRICS, a déclaré dimanche 19 mars Léonard She Okitundu, membre de la commission des relations extérieures au Sénat et ex-ministre des Affaires étrangères de la RDC. «Il y a moyen de coopérer avec la Russie sur beaucoup de domaines qui peuvent aider l’Afrique à rattraper son retard en matière de développement. Nous partageons avec la Russie le fait de disposer de presque toutes les matières premières. La RDC a des matières premières mais n’a pas d’expertise pour les développer. Mais la Russie a les matières premières et a l’expertise», a souligné She Okitundu en marge de la 2e conférence parlementaire Russie-Afrique qui se déroule à Moscou.
La Russie fait partie des BRICS, ces pays émergents dont «l’expertise peut servir au continent africain», note le sénateur à la sortie d’une table ronde avec les hommes d’affaires.
Domaines de coopération prioritaires Afrique-Russie
L’Afrique a des liens historiques avec la Russie qui a aidé les pays de ce continent à conquérir leur indépendance et leur souveraineté, a rappelé Okintundu. À présent, Moscou peut aider les pays africains à acquérir la souveraineté alimentaire, grâce aux projets conjoints dans le secteur des hydrocarbures et l’agriculture. «La RDC a un potentiel agricole important, mais nous voulons industrialiser notre agriculture pour la sécurité alimentaire, la souveraineté alimentaire. Et là, encore une fois, la Russie peut effectivement accompagner la République démocratique du Congo pour conquérir cette souveraineté alimentaire», a-t-il martelé.
La Russie est loin d’être isolée
À l’approche du sommet Russie-Afrique programmé en juillet à Saint-Pétersbourg, l’Occident essaie tant bien que mal d’isoler la Russie. Le parlementaire congolais pense que la Russie est loin d’être isolée, argumentant la proximité existante entre l’Afrique et la Russie. «Sur le plan diplomatique, comme vous l’avez remarqué, presque toute l’Afrique est ici présente. Donc la Russie n’est pas aussi isolée que les gens le croient et le continent africain est très proche de la Fédération de Russie. Et c’est ce qui m’a beaucoup réjoui de constater que presque tous les pays africains sont présents ici. Ça montre l’importance que nous attachons à la coopération avec la Russie», a conclu le sénateur congolais.
JP