Du cobalt et du cuivre en échange d’investissements dans les infrastructures. Quinze ans après la signature de l’accord entre la RDC et des entreprises minières chinoises, la promesse n’a pas été tenue.
Un «fiasco financier». «Un préjudice sans précédent dans l’histoire». Les autorités congolaises se sont-elles fait berner lors des négociations initiales ? Pourquoi les termes du «contrat du siècle» n’ont-il pas cessé d’évoluer au fil des ans ? Qui a profité des bénéfices engrangés ? Y a-t-il eu des tentatives de détournement ? Pour les Congolais, quinze ans après la signature de la convention, à l’époque où Joseph Kabila présidait aux destinées du pays, le constat est amer. Les infrastructures promises par la partie chinoise en échange de l’exploitation du cobalt et du cuivre congolais sont inexistantes, ou presque. Jules Alingete, patron de l’Inspection générale des finances (IGF), parle même de «colonisation économique».
Dans un rapport sans concession que Jeune Afrique décrypte en infographies, l’instance qu’il dirige réclame 20 milliards USD au Groupement d’entreprises chinoises (GEC) qui, avec la Gécamines, a signé en 2008 la convention donnant notamment naissance à la Sicomines.
À l’origine, cette joint-ventures entre le GEC et la Gécamines profitait de conditions très favorables dans l’exploitation des richesses du sous-sol congolais, en échange de forts investissements dans le secteur des infrastructures. Un vaste plan qui prévoyait notamment la construction de plus de 30 hôpitaux, deux aéroports, près de 3.000 Km de lignes de chemin de fer et plus de 7.000 km de routes. Tandis que la partie chinoise défend un «bel exemple de partenariat gagnant-gagnant» en affirmant que celui-ci a donné naissance à «de nombreuses réalisations palpables», l’IGF liste une trentaine de manquements graves, de mouvements financiers douteux et de promesses non tenues. Le rapport publié le 17 février dernier par l’institution rattachée à la présidence montre que la partie chinoise a engrangé 10 milliards USD – dont 1 milliard pour les seuls intérêts perçus par les banques chinoises – pour seulement 822 millions USD pour la partie congolaise. Une somme dont l’utilisation est, en outre, particulièrement opaque.
Contrats opaques et clauses léonines
Si Pékin a accusé le rapport d’être «plein de préjugés» et affirme que ses conclusions «ne correspondent pas à la réalité», la Sicomines n’en a pas moins, dans les jours qui ont suivi sa publication, annoncé le décaissement de 500 millions USD pour des projets d’infrastructures, en précisant que ce montant avait été négocié avant la parution dudit audit. Une manière de concéder des manquements?
Depuis que Félix Tshisekedi a annoncé son intention de réévaluer les contrats miniers signés par l’administration de son prédécesseur, pas moins de cinq rapports et audits ont tenté de faire la lumière sur les tenants et aboutissants de ces contrats nébuleux. Des travaux de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (Itie) à ceux menés par le ministère congolais des Mines et des Infrastructures, en passant par ceux de l’ONG Afrewatch ou encore l’enquête Congo Hold-Up réalisée par un consortium de journalistes d’investigation, le constat est le même : contrats opaques, chiffres incohérents et avenants aux clauses léonines.
BP