Deux semaines après son interpellation le 5 février 2022, François Beya Kasonga, le désormais ancien patron du Conseil national de sécurité et conseiller spécial de Félix Tshisekedi en matière de sécurité est toujours détenu dans les locaux de l’ANR à Kinshasa. Des interrogatoires auxquels il a été soumis, rien n’a filtré sauf qu’ils concernaient une présomption d’atteinte à la sécurité intérieure de l’Etat. Tout indique que le chemin de la croix pour l’ex-sécurocrate en chef est loin de se terminer, puisque mercredi 16 février encore, des médias rapportaient que ses bureaux privés au Sultani Hôtel de Kinshasa avaient été perquisitionnés en même temps qu’une de ses résidences sur les hauteurs de Binza, alimentant la thèse d’un complot ou d’une tentative de coup d’Etat. On note cependant qu’aucun complice d’une pareille forfaiture n’a été interpellé jusque-là.
L’affaire a dû certainement être évoquée samedi 12 février lors de la quadripartite d’Oyo (Congo Brazzaville) entre les présidents Sassou, Museveni, Faure Gnassimbe et Tshisekedi en marge de leurs échanges sur la situation sécuritaire en Afrique centrale et de l’Ouest, marquée ces derniers mois par des coups d’Etats militaires.
Sur la RDC, le sommet de Oyo s’est félicité des opérations conjointes UPDF-FARDC, en cours au Nord-Kivu et en Ituri, et encouragé la lutte contre les mouvements djihadistes, dont il faut enrayer l’influence sur le continent. Concernant la situation en Afrique de l’Ouest, les 4 chefs d’Etat se sont rangés derrière les organisations régionales qui toutes ont condamné les coups de force et initié des représailles contre les nouveaux pouvoirs militaires.
Les observateurs notent que Oyo aura donc été une rencontre des chefs d’Etat préoccupés par cette vague de pronunciamientos dans la région ouest-africaine à quelques jours de la tenue d’un sommet UE-Afrique devant plancher sur les matières sécuritaires dans la perspective d’un retour en force de l’Union européenne sur un continent qui a tendance à lui échapper au profit notamment de la Russie, pourvoyeuse d’une expertise militaire indéniable.
L’ombre de Wagner
Les Occidentaux ne sont vent debout contre ce nouveau rapport de force en Afrique. Mercredi 16 février, une dépêche de la Voice of America indiquait à cet effet que Bangui était devenu la plaque tournante pour les mercenaires russes de Wagner. «Une campagne cinématographique russe produite en RCA soutient le rôle de Wagner dans la lutte contre les insurgés au Mozambique», a-t-on appris. Ainsi que l’écrivait Le Maximum dans sa dernière livraison, François Beya, que plusieurs sources disent très proche du pouvoir centrafricain soutenu par les Russes, pourrait être en train de payer les frais de ses relations ‘‘coupables’’ outre Oubangui. Un communiqué de Wagner daté du 16 février 2022 rapporte que ce groupe fait l’objet de provocations qui tentent de l’entraîner dans des enjeux de politique internationale. «La plus scandaleuse a été la proposition de participer au coup d’Etat prétendument prévu en République Démocratique du Congo. Nous avons enregistré cette proposition et la semaine dernière, l’information a été transmise aux dirigeants du pays. Les mêmes propositions ont été faites à propos d’autres», écrit à ce sujet Alexandre Ivanov, chef de la communauté des officiers pour la sécurité internationale de Wagner.
Impossible de ne pas y déceler un parallélisme avec le dossier en cours de François Beya que d’aucuns pensent avoir été sacrifié par ses amis occidentaux qu’il ne rassurait plus suffisamment. Les Russes de Bangui, quant à eux, ne s’en cachent pas.
JN