Des cas de naufrage récurrents d’embarcations de fortune à Ango (Bas-Uélé) et à Inongo (Maï-Ndombe) inquiètent de plus en plus les notables et ressortissants de toutes ces localités au nombre desquels, le député provincial Célestin Bekabisya qui a saisi le 1er ministre sur les drames du 05 décembre sur la rivière Uélé en territoire d’Ango (Bas-Uélé) et du 26 novembre 2019 survenu sur le lac Maï-Ndombe à Inongo.
Dans sa lettre au chef du gouvernement Sama Lukonde, l’élu de Buta déplore la mort par naufrage des enseignants et des infirmiers qui venaient de percevoir leurs salaires auprès de certaines banques situées loin de leurs lieux d’habitation et propose de confier à la Caisse d’épargne du Congo (CADECO) de payer les fonctionnaires dans tous ces coins de la République à travers des agences de proximité afin de leur éviter ce genre drames. Ci-dessous, la lettre du député provincial du Bas-Uélé à Sama Lukonde.
Concerne: Cri d’alarme et SOS.
Excellence Monsieur le Premier Ministre,
Votre honneur.
Permettez-moi, Excellence, d’approcher votre éminente Autorité en vue de vous exposer la situation critique qui prévaut gravement dans le Chef des Enseignants et du corps médical dans nos villages les plus reculés de la République, les cas du Bas-Uélé, ma Province natale et celle de Maï-Ndombe, prises en illustration parmi tant d’autres.
En effet, c’est en ma qualité de Député Provincial, élu de la circonscription électorale du territoire de Bambesa en Province du Bas-Uélé, que je vous adresse ce cri d’alarme après avoir constaté amèrement avec toute la Communauté riveraine du pays, ce qui suit:
Primo: un certain dimanche du 26 Novembre 2019, vers 17 heures, il y a eu naufrage d’une embarcation sur le Lac Mai-Ndombe, qui partait d’INONGO vers le village LOKANGA.
A bord de l’embarcation, il a été signalé plus de 100 passagers, l’équipage y compris.
A l’arrivée des Autorités, 45 corps sans vie ont été récupérés, dont 22 enseignants qui revenaient de la paie. Toujours dans ce même accident, 2 préfets des études ont perdu la vie.
Quant à ce, Son Excellence Monsieur le Gouverneur de province de l’époque, avait déclaré que la rentrée scolaire connaîtra un sérieux problème, vu les pertes enregistrées par les établissements concernés.
Secundo: Dimanche, le 05 Décembre 2021, dans la Province du Bas-Uélé en Territoire d’Ango sur la rivière Uélé à l’embouchure de la rivière BAMOKANDI, 13 infirmiers venus des CSR de BANDA et DAKWA du Territoire cité ci-haut, ont connu un accident de pirogue ayant entrainé la disparition de 8 infirmiers jusqu’à présent non retrouvés, dont 5 rescapés. Les accidentés partaient à BUTA pour toucher leurs primes.
Excellence Monsieur le Premier Ministre,
Cette situation alarmante est vraiment grave, parce qu’elle entraine les décès de nombreux cadres qui œuvrent dans nos villages où plusieurs compatriotes se refusent d’aller travailler, car les conditions de vie restent encore rudimentaires et surtout précaires.
Bien plus, je dirai que les méfaits de cette regrettable situation sont plus que la mort elle-même, car, lorsque 13 infirmiers et 22 enseignants se déplacent en effectuant une distance de plus de 760 kilomètres, aller et retour, pour aller à la Banque toucher leurs salaires, les malades et les écoliers sont abandonnés à leur triste sort et ce, aux conséquences inimaginables, et incalculables.
Cette situation criante est observée chaque mois pendant des années. Pis encore, pendant leurs déplacements, ils mettent 14 à 20 jours en attendant la paie mais, curieusement, certains d’entre-deux ne sont pas repris sur les listes de paie pendant des mois, voire des années.
Ces derniers, malgré leurs impaiements, sont obligés de rentrer chez eux, mais dommage, dans quelles conditions, étant donné qu’ils avaient contracté avant leur déplacement, des dettes en prenant des pirogues en location, les motos, les vélos et leurs conducteurs, leurs séjours autant que d’autres engagements liés à la survie des familles.
De retour aux villages, ils trouvent parfois les déboires, parce qu’ils sont allés à la paie où le cauchemar et la confusion de non-paiement des salaires les ont malheureusement surpris, bouleversant ainsi les prévisions des uns avec leurs familles en détresse indescriptible.
Excellence Monsieur le Premier Ministre,
Les efforts de la Bancarisation étaient salués de tous, et avaient suscité beaucoup d’espoirs dans les milliers des fonctionnaires et Agents de l’Etat qui se voyaient privés de leurs salaires qui prenaient d’autres destinations.
Au lieu que cet idéal salutaire devienne une réalité vivante partout, elle deviendra malheureusement un rêve dont la manne tarde à tomber dans les contrées reculées du pays, plongeant par contre, des familles en deuil. Les familles éprouvées n’ont jamais été consolées par la République. Bref, les pauvres paysans sont laissés pour compte.
Au demeurant, si la Bancarisation est favorable, magnifique et enfin, un succès dans les grands centres urbains, soit dans certains territoires privilégiés, considérant leurs réalités économiques et sociales, mais hélas, il n’en reste pas moins vrai que cet idéal est jusqu’à ce jour un calvaire qui martyrise et endeuille à coup sûr des familles depuis son institution par l’Etat en République Démocratique du Congo.
Par ailleurs, le phénomène créé par les banquiers qui vont dans les coins reculés payer les agents de l’Etat en se faisant entourer de policiers armés jusqu’ aux dents, laisse à désirer. Ces policiers sèment la terreur du fait des tortures, extorsions, menaces, humiliations des Chefs des Groupements devant leurs populations. La panique semée à dessein préjudicie les bénéficiaires des salaires qui se réservent de se rendre à la paie sous effet de la psychose.
Ces cas sont enregistrés dans les territoires de BAMBESA, POKO et ANGO en Province du Bas-Uélé.
Excellence Monsieur le Premier Ministre,
Considérant la situation amère décrite ci-haut, je m’en vais soumettre à votre très haute Autorité, quelques propositions qui contribueraient de façon significative et sensible à résoudre ce cas pendant dans nos territoires reculés, dépourvus des institutions financières.
- La CADECO étant la Banque de proximité, aurait pu installer ses agences dans tous les territoires enclavés de la République, pour palier au déficit criant.
Cette disposition pratique permettra une gestion saine des Finances Publiques, et facilitera la paie des agents de l’Etat de tous les secteurs travaillant dans les territoires enclavés d’être dignement payés, parce que les dégâts seront dans ce cas éradiqués. Les enseignants, les infirmiers et autres agents de l’Etat seront épargnées des fins apocalyptiques.
- Chaque agence de la CADECO disposerait de 3 à 4 Agents pour son fonctionnement. Si possible, il y aura création d’emplois pour les autochtones.
- La réorganisation de la CADECO permettra aux indigènes d’être pris en charge par l’Etat Congolais par le fait de l’implantation de ses agences en territoire reculés, car, elle a eu à prouver de quoi elle était capable dans ce domaine à l’époque coloniale, et voire après l’indépendance pendant la deuxième République dite du Zaïre.
- La Banque Centrale du Congo, «BCC», organise très bien le secteur privé, à savoir la SOFICOM, la SOLIDAIRE, etc. Pourquoi est-ce que l’Etat congolais n’organiserait-il pas la CADECO pour limiter les dégâts ?
- Le contrôle de gestion de ces agences pourra donc se faire régulièrement conformément aux normes de fonctionnement de la Banque Centrale du Congo pour son efficacité, autant que pour sa crédibilité.
- Comme je l’ai dit plus loin, les dispositions telles qu’arrêtées pour la Bancarisation de la paie des fonctionnaires et agents de l’Etat dans les grands centres urbains ainsi que dans les entités privilégiées, sont indiscutables.
Au cas où les propositions que dessus retiendraient votre particulière attention, vous résoudrez un sérieux problème qui intéresse toute la communauté humaine qui croupit dans la misère dans nos villages reculés en limitant les dégâts qui peuvent se produire prochainement, parce que les agents partiront toujours toucher leurs maigres salaires en confrontant ce danger permanent. Nonobstant, tant que cette situation ne sera pas prise à cœur par le Gouvernement de la République, il y aura toujours des pleurs dans nos villages profonds ou les enseignants et les infirmiers ne sont entendus par la très haute hiérarchie nationale et ce, malgré leur cri d’alarme.
Le Gouverneur de Bandundu à l’époque, n’avait-il pas plaidé la responsabilité des Autorités supérieures du pays afin d’éradiquer cette déplorable situation à répétition ?
Voici, enfin, la préoccupation majeure qui m’habite depuis des années, que je me dois de vous présenter à travers ces pages, dont je vous en souhaite bonne réception.
Ce courrier constitue à tout prix, mon S.O.S et celui de tout indigène congolais vivant dans les villages profonds des territoires enclavés du pays en général, et du Bas-Uélé en particulier.
Dans l’attente d’une attention particulière que vous aimeriez accorder à la présente supplication, je vous prie d’agréer, Excellence Monsieur le Premier Ministre, l’expression de mes sentiments les plus dévoués.
Honorable Célestin BEKABISYA ENKWENE-PAME