Plus de deux ans après l’alternance, c’est le bureau d’une Commission électorale nationale indépendante (CENI), hors mandat et désavoué par tous qui est toujours en place. En début de la dernière rentrée parlementaire, Corneille Nangaa et ses collaborateurs avaient présenté le rapport de la reddition des comptes de leur institution à l’Assemblée nationale longtemps après les scrutins chaotiques combinés du 30 décembre 2018 qui avait failli précipiter le pays dans la tourmente. Le bureau Mabunda a été déchu pour avoir voulu accélérer le processus de renouvellement du bureau de la CENI en entérinant la désignation controversée de Ronsard Malonda par les confessions religieuses comme nouveau patron de la Centrale électorale. Vent debout, l’UDPS, LAMUKA et la société civile avaient bravé l’état d’urgence sanitaire alors en vigueur en organisant des manifestations à travers les principales villes du pays pour obtenir que des réformes de la loi électorale précèdent une désignation voulue consensuelle des membres de la CENI. Dans la foulée, un groupe de 13 parlementaires et personnalités tolérés par le pouvoir et manifestement portés à bout de bras par plusieurs chancelleries avait entrepris des démarches auprès des RÉFORMES ÉLECTORALES Nuages sur 2023 : où est passé le G13 ? forces politiques et sociales les plus significatives à l’effet d’amener le parlement à se pencher de toute urgence sur les réformes électorales afin d’éviter toute crise de légitimité et la forclusion des mandats électifs en 2023. Union sacrée : une fin en soi ? Favorables à l’avènement de l’Union sacrée de la nation qui domine la scène politique nationale depuis le début de cette année, les sociétaires du G13 semblent avoir mis sous le boisseau leurs revendications légitimes du départ. Leur solubilité dans la nouvelle majorité acquise au président de la République est telle que la plupart d’entre eux se sont vus confier des responsabilités d’État. C’est le cas de Daniel Mukoko Samba qui est membre du panel des sherpa du chef de l’État dans ses fonctions de président de la conférence des chefs d’États membres de l’Union africaine ou de Christophe Lutundula et Patrick Muyaya qui exercent des fonctions ministérielles phares dans le nouveau gouvernement. Outre l’emblématique Henry Thomas Lokondo qui a tiré sa révérence en début d’année, les autres membres du G13 semblent s’être évanouis dans la nature. Toutefois, les préoccupations dont ils étaient porteurs et qui leur avaient valu une certaine crédibilité au sein de l’opinion sont loin d’avoir trouvé un début de solution. Le pays continue toujours à naviguer à vue sans se préoccuper outre mesure de ce que sera le dead line de 2023. «C’est la preuve que plusieurs acteurs politiques se font mâcher les éléments de langage dans des officines occultes qui poursuivent des objectifs inavoués. La disparition du G13 de la circulation est la preuve qu’ils n’étaient que des porte-voix stipendiés des groupes d’influence tapis dans l’ombre», soutient un cadre de l’UDPS. 2023, horizon bouché ? De but en blanc, les réformes électorales tant réclamées ne semblent plus faire partie des urgences nationales à moins de trois ans de la fin de la législature en cours. Delly Sesanga, l’un des derniers des mohicans du G13 ne cache plus son dépit. «Au rythme nonchalant où se déroule la session de mars 2021, la réforme électorale est de plus en plus compromise par manque de volonté politique. Sur les 34 jours restants, il devient illusoire de penser terminer la loi de la CENI et procéder à sa mise en place. 2023 de plus en plus incertain», s’est-il lamenté. De l’avis de nombre d’analystes, la stratégie de pourrissement est loin d’être un fait du hasard. Il s’agirait pour d’aucuns d’une astuce bien huilée du pouvoir qui, à défaut de n’avoir pas pu faire avaler la couleuvre de la prolongation du mandat présidentiel, laisse faire pour constater à la dernière minute l’impossibilité d’organiser les élections dans les délais et placer tout le monde devant un fait accompli. C’est ce que pense notamment l’ancien candidat à l’élection présidentielle Seth Kikuni. «Pour nous distraire, le pouvoir de Kabila nous a fait croire jusqu’à la fin qu’il n’y aura pas élections qu’ils ont fini par organiser. Pour nous distraire, le pouvoir Fatshi nous fait croire qu’il y aura élections en 2023 qu’ils ne vont finalement pas organiser. Retenez cette date», a-t-il twetté. L’expérience du passé a jusqu’ici montré que le glissement a tendance à desservir ceux qui l’organisent. Il faudra réfléchir par deux fois avant de faire ce dangereux saut dans l’inconnu.
JBD