On espère que cette fois-ci sera la bonne. Le gouverneur du Sankuru Joseph-Stéphane Mukumadi et le speaker de l’Assemblée de cette province entouré de la quasi-totalité de ses collègues ont convenu de mettre fin à la crise qui opposait depuis 2019 l’Assemblée provinciale à l’exécutif. Réunis dimanche 28 mars 2021 au village Miketa, à Binza-Pigeon (Ngaliema) à Kinshasa, sous la direction du haut représentant du président de la République, Kitenge Yezu, ils ont signé un compromis politique en présence des principales notabilités du Sankuru invitées comme témoins et garants de bonne fin dudit compromis.
Le gouverneur Mukumadi d’une part et le président de l’Assemblée provinciale Olamba avec ses collègues députés provinciaux d’autre part se sont mutuellement neutralisés au cours de ces deux dernières années en multipliant les déclarations et les procédures politico-judiciaires à partir de Kinshasa, à plus de 2000 Km de la province d’origine du Héros National Patrice-Emery Lumumba qui a sombré dans un chaos indescriptible.
Tous ont finalement reconnu, et on espère qu’ils sont sincères, «la nécessité et l’urgence de créer les conditions de reprise du fonctionnement régulier des institutions provinciales et du travail dans les administrations publiques afin d’amorcer le développement de la province en prenant en compte les réalités politiques et sociologiques locales, les aspects juridiques de la crise et l’impératif d’une solution durable qui, non seulement marie la légalité républicaine et la légitimité démocratique mais aussi, est favorable au leadership du président de la République, sur fond d’une réconciliation sincère», selon le compromis signé dimanche en fin de soirée.
Signe que le négociateur Kitenge Yezu a fait preuve d’impartialité : les deux parties se sont faits des concessions mutuelles et non des moindres.
Ainsi, le gouverneur Mukumadi s’est engagé à «retirer les actes de nomination, révocation, suspension et mutation des agents de l’État ainsi que des autorités territoriales posés en violation des conditions de fond et de forme prescrites par la loi, le règlement d’administration et les instructions administratives des autorités centrales compétentes». A cet effet, il a été convenu la mise sur pied d’une commission technique ad hoc Assemblée provinciale-gouvernement pour examiner chaque cas. Mukumadi a pris en outre l’engagement de «nommer un nouveau gouvernement provincial plus représentatif des 6 territoires composant la province et des forces politiques représentées à l’Assemblée provinciale à soumettre à l’investiture de l’organe délibérant de la province au plus tard dans les 30 jours de la signature du compromis politique».
Les quatre autres engagements pris par le gouverneur du Sankuru sont relatifs au paiement aux députés provinciaux des frais locaux légaux dûs depuis le début de la législature selon un calendrier d’apurement à convenir; à la libération régulière et sans retenues des fonds versés par le gouvernement central aux Entités territoriales décentralisées et au respect des prérogatives constitutionnelles et légales de l’Assemblée provinciale. Il s’est enfin engagé à «ne rien entreprendre ou susciter qui puisse déstabiliser le bureau de l’Assemblée provinciale».
Quant aux députés provinciaux dont plus de 16 sur les 21 que compte actuellement l’Assemblée provinciale du Sankuru exigeaient la démission du gouverneur, ils ont pris l’engagement de «considérer comme nulle la résolution de mise en accusation du gouverneur et le reconnaître comme tel; investir le gouvernement provincial aussitôt qu’il sera présenté par le gouverneur; respecter les compétences du gouvernement provincial et exercer le contrôle parlementaire dans le strict respect de la Constitution et de la loi n°08/012 du 31 juillet 2008 portant principes fondamentaux relatifs à la libre administration des provinces; s’abstenir, sans préjudice du contrôle parlementaire, de toute initiative de déstabilisation du gouverneur de province et des membres de son gouvernement et enfin s’abstenir de toutes interférences dans la gestion gouvernementale notamment par substitution d’action, trafic d’influence, chantage et menaces à l’endroit des membres du gouvernement, prélèvement ou ponctions sur les recettes de la province auprès des régies financières, menaces et injonctions aux administrations et agents publics ainsi qu’aux autorités territoriales».
Les deux parties ont en outre pris des engagements communs, en consentant réciproquement à «maintenir le bureau actuel de l’Assemblée provinciale; retirer les pétitions et motions réciproques initiées les uns contre les autres et à s’abstenir de tout ce qui peut replonger les institutions provinciales dans la crise».
Ils ont en outre pris de commun accord l’engagement de «mettre fin à la campagne de dénigrement réciproque dans les médias audiovisuels et sociaux et à l’endroit des acteurs politiques du Sankuru».
Ces attaques et insultes qu’elles essuyaient sur les réseaux sociaux de la part d’une jeunesse sankuroise désœuvrée et manipulée par les uns et les autres ont fait très mal aux notabilités du Sankuru qui ont exigé et obtenu du gouverneur Mukumadi et des députés provinciaux l’engagement à s’abstenir de tout soutien direct et indirect à toute personne qui s’y livrerait.
Le gouverneur Mukumadi et les députés provinciaux du Sankuru, parties prenantes au compromis politique du 28 mars 2021, le haut représentant du président de la République et les notabilités du Sankuru ont paraphé ce texte. Parmi les notabilités signataires, on pouvait noter la présence du sénateur Léonard She Okitundu, des députés nationaux Christophe Lutundula Apala, Lambert Mende Omalanga, Emery Okundji Ndjovu, Jean Charles Okoto Lolakombe, Alexis Luwundji et Alphonse Ngoy Kasanji (dont le parti compte 3 députés à l’Assemblée provinciale du Sankuru). Les anciens députés nationaux Michel Lokola Elembe et Franck Diongo ont également pris part à la cérémonie.
Tous les députés provinciaux du Sankuru ont tenu par ailleurs à réitérer leur adhésion formelle à l’Union sacrée de la nation prônée par le chef de l’Etat Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo contrairement aux allégations mensognères de certaines mauvaises langues qui accusaient certains d’entre eux d’en vouloir au gouverneur avec lequel ils se sont réconciliés au motif que celui-ci en faisait partie.
Reste à savoir si le gouverneur Mukumadi et le président de l’Assemblée provinciale Benoît Olamba vont désormais comprendre la nécessité de rester dans leur province où ils ont plus à faire qu’à Kinshasa.
LM