Alors qu’il avait personnellement conduit ses escouades de ‘’combattants’’ à préparer la mise hors circuit de Vital Kamerhe à travers les «visites d’inspection du parti sur les travaux d’infrastructures des chantiers des 100 jours» (sic !) et fait monter certains de ses cadres dans l’administration présidentiel comme Marcellin Bilomba pour témoigner à charge contre l’élu de Bukavu condamné depuis lors à 20 ans de servitude pénale principale à l’issue du procès dit des 100 jours, Augustin Kabuya, secrétaire général de l’UDPS a amorcé un curieux rétropédalage en désignant Kamerhe comme «victime politique du FCC».
La dégradation de la santé de Vital Kamerhe semble avoir provoqué la panique parmi les responsables actuels du parti présidentiel qui avaient pourtant activement préparé sa défénestration puis sa condamnation par une justice dont les partisans du leader de l’UNC n’ont eu de cesse de questionner l’indépendance et l’impartialité.
Alors que le Libanais Samih Jammal condamné avec lui dans le même dossier a bénéficié d’une évacuation sanitaire, Kamerhe attend toujours l’autorisation du président Tshisekedi. Condamné à 20 ans de travaux forcés, VK va bientôt totaliser 8 mois en prison et serait entre la vie et la mort au centre hospitalier Nganda de Kinshasa. Selon la journaliste Belge Colette Braeckman, la vie de Vital Kamerhe, un homme politique toujours très populaire dans l’Est du pays, ne tiendrait plus qu’à un fil. Notre consœur croit savoir que celui qui est encore officiellement le directeur de cabinet du président aurait perdu 18 kilos. Sa tension serait tombée à 8,5 et il aurait été placé sous assistance respiratoire. Une évacuation sanitaire urgente s’impose donc. Le gouvernement congolais en étudie les mécanismes à en croire le vice-ministre UDPS Takaishe qui assure l’intérim de Garde des sceaux depuis la démission de Me Tunda ya Kasende.
Cette décision dépend directement du chef de l’Etat Félix Tshisekedi, écrit Colette Braeckman qui revient sur des cas similaires de différentes évacuations du genre du vivant d’Étienne Tshisekedi, père de l’actuel président. «Autres temps autres mœurs : alors que jadis Etienne Tshisekedi, opposant farouche au président Mobutu, bénéficia plusieurs fois d’évacuations sanitaires autorisées, sinon financées par le chef de l’Etat, il apparaît que son fils serait trop occupé par la fin des consultations nationales pour autoriser une telle mesure», rappelle Braeckman.
Malgré plusieurs mouvements de militants et sympathisants de Kamerhe clamant son innocence, son sort semble être hermétiquement scellé.
Plusieurs cadres de l’UNC et d’autres proches de Kamerhe sont d’avis qu’en réalité son procès fut «aussi politique que judiciaire». Rémy Kasindi pense que pour le sauver, la population du Sud-Kivu doit prendre conscience en se mobilisant comme un seul homme.
Face à la montée de ce mécontentement, Kabuya a effectué un virage à 180 degré en tenant des propos laissant croire que pour lui, Vital Kamerhe ne méritait pas d’être condamné. Profitant de ce que le ministre de la Justice et Garde des sceaux en place au moment de la mise en accusation de VK était le FCC Célestin Tunda ya Kasende, Kabuya laisse entendre que c’est cette plateforme qui a embastillé l’enfant chéri de Bukavu. Sur Top Congo FM, Kabuya a carrément accusé la famille politique de Joseph Kabila d’avoir orchestré l’arrestation du leader de l’UNC. Oubliées les virées de centaines de ‘’combattants’’ conduits par lui-même dans les différents chantiers des sauts de moutons de Kinshasa et les chahuts des mêmes ‘’combattants’’ qui accompagnaient toutes les apparitions publiques du dircab du chef de l’Etat jusqu’à son interpellation rocambolesque par la justice.
De son côté, le FCC pointe du doigt l’UDPS dans l’embastillement du n°1 de l’UNC et rejette en bloc toutes ces accusations. «C’est l’UDPS qui a décidé d’enterrer Kamerhe pour l’empêcher de faire respecter l’accord de Naïrobi qui prévoit expressis verbis qu’il soit soutenu à la présidentielle de 2023 par l’UDPS», explique un haut cadre de la plateforme de JKK qui rappelle de quelle manière l’ancien Garde des sceaux lui-même avait été peu après «traîné comme un vulgaire voleur de poulet devant la même justice aux ordres puis forcé de démissionner pour avoir manqué de respect au chef de l’Etat après qu’une intervention vigoureuse du 1er ministre eut permis sa relaxe. Il faut que les amis de l’UDPS arrêtent de prendre les Congolais pour des idiots». Et de citer les propos menaçants à l’égard du directeur de cabinet de Fatshi proférés par un certain pasteur Guily, mobilisateur attitré du parti présidentiel qui, au cours d’une émission largement diffusée sur You tube expliquait aux ‘’parlementaires debout’’ de l’UDPS que Kamerhe était devenu gênant et devait être éliminé car il allait contrarier les ambitions présidentielles de leur parti en 2023.
Me Olivier Tshilumbu constate que de toute évidence, «l’aura et la notoriété de Kamerhe dérangent». Il ajoute que «depuis le début de son procès jusqu’à sa condamnation au premier degré, le ministère public a été incapable de prouver sa culpabilité. Sur injonction des mêmes mains noires, il a été condamné au maximum des peines. Une monstruosité alors que certains accusés dans le dossier des sauts-de-mouton, ont été condamnés à moins de cinq ans de prison alors que d’autres ont bénéficié de la requalification de leurs peines.
C’est une justice à double vitesse. Pas question de trop réfléchir. La justice a été instrumentalisée pour écarter Kamerhe de la course à la présidentielle de 2023».
Tshilumbu en veut pour preuve le fait que «bizarrement, les faits pour lesquels VK a été injustement condamné, ont été remis en cause par le gouvernement qui, lors d’une réunion présidée par le 1er ministre, Sylvestre Ilunga, avait reconnu que les conteneurs de maisons préfabriquées traînaient à Dar-es-Salaam (Tanzanie) et Lobito (Angola) où respectivement 167 et 180 conteneurs sont menacés de saisie. Tout démontre que Kamerhe est un prisonnier politique. Où est la justice dans tout ça? La conclusion est simple. Ce simulacre de procès est une honte pour l’État de droit tant vanté. Maintenant que l’UDPS et le PPRD reconnaissent qu’ils ont jeté arbitrairement Kamerhe en prison, cette justice manipulée doit le libérer».
Quoiqu’il en soit, il devient de plus en plus évident que le meilleur élu de la République aux législatives de décembre 2018 a été victime d’un complot destiné à faire voler en éclats ses espoirs pour le ‘’top job’’ en 2023.
Il est inacceptable que l’on continue à faire croupir ainsi un acteur politique dans le déshonneur et à le priver de sa liberté pendant de si longues années uniquement pour ne pas tenir un engagement pris avec lui.
J.N