Le vendredi 17 juillet 2020, le Président de la République, a signé et publié, en une seule journée et à l’insu du Premier Ministre, Chef du Gouvernement, cent cinquante-trois (153) Ordonnances portant nomination à la Cour Constitutionnelle, dans la Magistrature civile et militaire, au sein des Forces Armées de la République Démocratique du Congo, FARDC en sigle, et dans le Portefeuille de l’Etat.
Parmi ces Ordonnances, figure celle n°20/116 portant nomination comme Membres de la Cour Constitutionnelle, des Magistrats Dieudonné Kamulete Badibanga, Alphonsine Kalume Asengo et Dieudonné Kaluba Dibwa, sans respect des dispositions constitutionnelles en la matière, notamment celles relatives à la composition de la Cour, à la provenance des Membres de la Cour, à la durée et au renouvellement du mandat des Membres de la Cour constitutionnelle.
Cette Ordonnance anticonstitutionnelle a aussi violé les dispositions prévues par la Loi organique n°13/026 du 15 octobre 2013, portant organisation et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle, notamment en ses Articles 2, 28 et 31, et par conséquent, conformément à l’Article 4 de la même Loi organique, les nominations dont elle est porteuse sont purement et simplement nulles de plein droit, car, le Président de la République a nommé, de sa propre initiative, 2 membres issus du même groupe, celui du Conseil Supérieur de la Magistrature alors que par ailleurs l’Assemblée générale du CSM ne s’était pas réunie pour faire ces propositions et n’a donc pas donné mandat à son Bureau pour ce faire. En outre, l’Ordonnance n°20/116, du 17 juillet 2020, portant nomination des Membres de la Cour Constitutionnelle précise la date du Procès-verbal de prise d’Acte par la plénière de la Cour Constitutionnelle de la démission d’un membre de ladite Cour, désigné sur initiative propre du Président de la République, mais l’Ordonnance querellée ne signale aucune date du Procès-verbal constatant la désignation de 2 autres membres issus toujours du groupe CSM, ce qui ne permet pas de constater le respect du délai fixé par l’article 2, en son alinéa 3, de la Loi organique n°13 /026 du 15 octobre 2013, portant organisation et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle qui stipule que « Les Procès verbaux constatant la désignation des membres de la Cour autres que ceux désignés par le Président de la République sont transmis à ce dernier dans les quarante-huit heures aux fins de leur nomination ».
L’absence de tels procès-verbaux rendent donc impossible l’application de cette importante disposition légale.
Par ailleurs, l’Ordonnance n°20/116 du 17 juillet 2020, portant nomination des 3 nouveaux Membres de la Cour Constitutionnelle signée et publiée par le Président de la République, indique clairement, dans son 11ème Visa, qu’elle est prise en vue du remplacement du membre démissionnaire (le Président Benoit Lwamba) mais dans la même série de Visas, en violation des dispositions de l’article 28 de la loi organique précitée, la même Ordonnance se réfère curieusement aux Ordonnances n°14/021 du 7 juillet 2014, concernant uniquement le Juge Noël Kilomba et n°18/038 du 14 mai 2018, concernant uniquement le Juge Jean UBULU, qui n’ont, pourtant, jamais démissionné, et dont le mandat est toujours en cours ; avec cette conséquence que la Cour constitutionnelle se retrouve aujourd’hui avec une composition de 11 Membres au lieu des 9 prévus.
Le Président de la République a programmé, d’autorité et en toute illégalité, la cérémonie de prestation de serment de ces 3 nouveaux Membres de la Cour constitutionnelle, en dépit de toutes ces violations intentionnelles et manifestes de la Constitution qui ont entouré leur désignation et leur nomination, et qui avaient été dûment portées à la connaissance du Président de la République, notamment :
– Par sa Déclaration publique et solennelle du 21 juillet 2020, le Premier Ministre, Chef du Gouvernement a affirmé n’avoir jamais été associé ni de près ni de loin à l’élaboration desdites Ordonnances et a dénoncé le contreseing inconstitutionnel y apposé par une personne sans qualité ni mandat ;
– Par sa Déclaration du 21 juillet 2020, la Conférence des Présidents des Regroupements politiques membres du FCC, plate-forme politique majoritaire à l’Assemblée Nationale, a affirmé e que toutes les Ordonnances présidentielles du 17 juillet 2020, ont été prises en violation flagrante et manifeste de la Constitution ;
– Par la lettre n° TN/A/NKNM/JUP/JC/RDC/568/20, du 21 août 2020, de l’Avocat-Conseil de deux membres de la Cour constitutionnelle illégalement et arbitrairement remplacés, Maître Théodore Ngoy, adressée au Président de la République ;
– Lors de sa Conférence de presse tenue le 8 septembre 2020 au Centre CEPAS de la Gombe/ Kinshasa, le Professeur Emérite Raphaël Nyabirungu, de l’Université de Kinshasa a inventorié toutes les violations constitutionnelles intentionnelles commises par le Président de la République ;
– Par sa lettre ouverte datée du 17 septembre 2020 et dont l’objet est le « Rappel du strict devoir du respect de la Constitution » adressée à leurs Excellences Félix-Antoine Tshisekedi et Joseph Kabila, le Professeur Gabriel Banza Malale de l’Université de Lubumbashi, s’est livré au même exercice que son Collègue Nyabirungu ;
– Par la lettre du 14 octobre 2020 du Professeur José Ngoto Ngalingi de m’Université de Kisangani adressée au Député national Etienne Masanga Kisigay, élu du Territoire d’Ubundu, dans la Province de la Tshopo, en réponse à sa demande d’avis juridique sur la validité des Ordonnances du 17 juillet 2020, lequel avis ayant conclu que les 3 textes étaient frappés de « nullité de plein droit » a été largement diffusée dans les médias audiovisuels, les médias en ligne et dans la presse écrite ;
– Lors de l’audience accordée par le Président de la République Tshisekedi à la Présidente de l’Assemblée Nationale et au Président du Sénat en ses bureaux de la Cité de l’Union Africaine, mardi 13 octobre 2020, les deux speakers des chambres législatives lui ont clairement expliqué, que les 3 Membres de la Cour Constitutionnelle avaient été nommés en violation de la Constitution et des Lois de la République ;
– Par une Requête en interprétation de l’article 158 de la Constitution, déposée le lundi 19 octobre 2020, 21 Sénateurs, soit plus d’un dixième des Membres du Sénat, ont saisi, sur pied de l’article 161, alinéa 1er de la Constitution, la Cour constitutionnelle à ce même sujet ;
– Le mardi 20 octobre 2020, 201 Députés Nationaux ont à leur tour introduit une requête en interprétation des articles 79 et 158 de la Constitution dans le même sens ;
– Par leur lettre conjointe N/Réf. : RDC-P/ASS.NAT-SENAT/45/2020 du 20 octobre 2020, les Présidents des deux Chambres du Parlement accusant réception de la lettre n° 2087/10/2020 du 19 octobre 2020 du Directeur de cabinet a.i du Président de la République, leur demandant de mettre à disposition le siège du parlement pour la prestation de serment de trois (3) nouveaux Membres de la Cour Constitutionnelle, dans laquelle ont signifié au Président de la République leur position de ne pas organiser ladite cérémonie de prestation de Serment de trois nouveaux juges, ni d’en être parties prenantes, pour cause de non-respect de la Constitution, en exprimant leur surprise devant le fait accompli du Président de la République, qui ne cadrait pas avec les principes essentiels de collaboration et de courtoisie institutionnelles ;
– Par une Requête en interprétation des articles 79, 81, 82, 158 et 192 de la Constitution, déposée le mercredi 21 octobre 2020, le Premier Ministre, Chef du Gouvernement a saisi aussi, sur pied de l’article 161, alinéa 1er de la Constitution, la Cour constitutionnelle ;
– Par une Etude intitulée « Constats des Experts sur les 153 Ordonnances anticonstitutionnelles et frauduleuses du Président de la République, du 17 juillet 2020, prétendument signées, contresignées et certifiées conformes aux originales, le même jour », un Panel d’Experts multidisciplinaires et indépendants composé de Juristes académiciens, d’Avocats et de Magistrats, a établi qu’à travers ces Ordonnances présidentielles :
1) La Constitution a été massivement violée de manière intentionnelle, délibérée, manifeste et flagrante (16 Articles de la Constitution violés : 1er, 12, 62, 64, 69, 74, 79, 81, 82, 91, 92, 149, 150, 152, 158 et 165) ;
2) Il y a eu Fraude à la Constitution, par le fait du Président de la République, pour usurpation des prérogatives constitutionnelles d’autres Institutions et Instances, le tout, dans un contexte de Coalition politique (12 Articles de la Constitution violés : 1er, 62, 64, 69, 74, 79, 81, 82, 91, 92, 149 et 152) ;
3) Le remplacement et la nomination de deux (2) Membres de la Cour Constitutionnelle, en cours de Mandat, à la Cour de Cassation (Noël Kilomba et Jean Ubulu), sont intentionnellement et manifestement inconstitutionnels (10 Articles de la Constitution violés : 1er, 12, 62, 64, 69, 74, 82, 149, 152 et 158) ;
4) La nomination de 3 nouveaux Membres à la Cour constitutionnelle est nulle de plein droit (9 Articles de la Constitution violés : 62, 64, 69, 74, 82, 149, 152, 158 et 169) ;
5) La Cour constitutionnelle est paralysée, faute de quorum, avec impact négatif et préjudiciable au fonctionnement régulier des autres Institutions de la République, (8 Articles de la Constitution violés : 1er, 62, 64, 69, 74, 149, 158 et 169) ;
6) La Cour Constitutionnelle de la RDC est devenue ILLEGITIME du fait notamment de la présence en son sein de 3 nouveaux Membres nommés en violation intentionnelle et flagrante de la Constitution (1 article de la Constitution violé : 158) ;
7) Il y a Anéantissement de l’Etat de droit en RDC et tentative de renversement du régime constitutionnel, constitutive d’infraction imprescriptible contre la Nation et l’Etat, notamment pour exercice du pouvoir en violation de la constitution (16 Articles de la Constitution violés : 1er, 12, 62, 64, 69, 74, 79, 81, 82, 91, 92, 149, 150, 152, 158 et 165) ;
8) Il y a eu FAUX en écritures et USAGE DE FAUX dans
l’élaboration, la signature et la publication de ces Ordonnances présidentielles (Voir les articles 21, 124, 125 et 126 du Code Pénal Congolais) ;
9) Toutes ces violations intentionnelles de la Constitution constituent, dans le chef du Président de la République, un crime de HAUTE TRAHISON 1 Article de la Constitution violé : 165).
Ce Constat d’Experts multidisciplinaires et indépendants a été largement diffusé dans les médias audiovisuels, les médias en ligne et dans la presse écrite tant nationale qu’internationale. C’est dans ces conditions que le Président de la République, a fait prendre d’assaut le Palais du Peuple le 21 octobre 2020, sans l’accord préalable des Présidents de deux Chambres du Parlement, pour organiser la cérémonie de prestation de serment des 3 nouveaux Membres de la Cour Constitutionnelle, en l’absence notamment de l’Assemblée Nationale et du Sénat.
Le jeudi, 22 octobre 2020, la Conférence des Présidents des Regroupements politiques membres du FCC, plate-forme politique majoritaire à l’Assemblée Nationale, réunie en session extraordinaire, a publié un Communiqué par lequel il portait à la connaissance du Public qu’il a fait le tour d’horizon de la situation politique du Pays, et constaté que le choix délibéré de violer la Constitution a été consommé par le Président de la République jusqu’au bout, allant jusqu’à laisser profaner les symboles et les rites de la République, à travers un passage en force, en violation flagrante de la Constitution.
Par le même Communiqué, le FCC a fait savoir qu’il ne reconnaît pas les 3 nouveaux Juges constitutionnels nommés en violation de la Constitution et des lois de la République, et que ses membres ne se sentiraient pas liés par aucun des actes qu’ils poseront, étant donné que leurs nominations sont nulles de plein droit, conformément à l’article 4 de la loi organique n°13/026 du 15 octobre 2013, portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle.
Discussion en droit
Il importe de relever, de prime abord, que les nominations décrétées par l’Ordonnance présidentielle anticonstitutionnelle n°20/116 du 17 juillet 2020 étant nulles de plein droit, en ce qu’elles ont été faites en violation de l’Article 158, alinéa 1er de la Constitution et des Articles 2 et 28 de la Loi organique n°13/026 du 15 octobre 2013, portant organisation et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle, celle-ci devient illégitime, car composée arbitrairement, en violation flagrante des textes constitutionnels et légaux aujourd’hui en vigueur en RDC.
Composée en violation de la Constitution, la Cour constitutionnelle, en l’état actuel des choses, ne saurait en être légitimement le Gardien.
Bien plus, au désastre juridique ainsi constaté, s’ajoutent l’imbroglio et le chaos qui ont entouré la prestation de Serment des 3 nouveaux Membres de la Cour constitutionnelle, voulue et organisée au forceps par le Président de la République, en violation de l’Article 10 de la loi organique n°13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle.
– Violation de l’Article 158, alinéa 1er de la Constitution et de l’Article 2, alinéa 1er de la Loi organique n°13/026 du 15 octobre 2013. L’Article 158, alinéa 1er de la Constitution et l’Article 2, alinéa 1er de la Loi organique disposent, dans les mêmes termes que « La Cour constitutionnelle, ci-après la Cour, comprend neuf (9) membres nommés par le Président de la République, dont trois (3) sur sa propre initiative, trois (3) désignés par le Parlement réuni en congrès et trois (3) autres par le Conseil Supérieur de la Magistrature ».
Or, par l’Ordonnance n°20/116 du 17 juillet 2020, le Président de la République a nommé de sa propre initiative, deux (2) membres issus du groupe du CSM, alors que l’Assemblée générale du CSM ne s’est jamais réunie pour faire les propositions dont question dans cette Ordonnance et n’a jamais donné mandat à son Bureau pour ce faire. Donc, l’Ordonnance sus-évoquée du Président de la République constitue une violation intentionnelle, manifeste et flagrante de l’Article 158, alinéa 1er de la Constitution et de l’article 2, alinéa 1er de la loi organique n°13/026 du 15 octobre 2013, portant organisation et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle, en ce que le Président de la République a nommé, de sa propre initiative, deux (2) membres issus du même groupe qui n’est pas le sien, à savoir le CSM. En conséquence, sont nulles de plein droit toutes ces nominations intervenues par l’Ordonnance n°20/116 du 17 juillet 2020, conformément à l’Article 4 de la même Loi organique.
Dès lors, une telle Cour constitutionnelle, dont la composition et les nominations énervent les règles posées par la Constitution et la Loi organique pertinente en la matière, est illégale, et en conséquence, a perdu toute sa légitimité pour prétendre fonctionner en tant que juridiction qui a en charge le contrôle de la constitutionnalité des lois, des actes ayant force de loi et des actes règlementaires, et le contentieux électoral.
– Violation de l’article 2, alinéa 3, de la Loi organique n°13/026 du 15 octobre 2013, portant organisation et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle. L’article 2, alinéa 3 de la Loi organique dispose que « les procès-verbaux constatant la désignation des Membres de la Cour autres que ceux désignés par le Président de la République sont transmis à ce dernier dans les quarante-huit heures aux fins de leur nomination ».
Or, l’Ordonnance n°20/116 du 17 juillet 2020, du Président de la République, a renvoyé, dans ses Visas, à un prétendu procès-verbal constatant la désignation des Membres de la Cour Constitutionnelle par le Conseil Supérieur de la Magistrature, alors que celui-ci ne s’est jamais réuni depuis l’avènement du Président Félix Antoine Tshisekedi au pouvoir, pour lui transmettre ledit procès-verbal dans les quarante-huit heures, aux fins de leur nomination à la Cour constitutionnelle. Il ne peut s’agir, dans le cas d’espèce, que d’un FAUX en écritures dans son chef.
En outre, l’Ordonnance n°20/116, du 17 juillet 2020, portant nomination des Membres de la Cour Constitutionnelle, précise la date du Procès-verbal de prise d’Acte par la plénière de la Cour Constitutionnelle de la démission d’un Membre de ladite Cour, désigné sur initiative propre du Président de la République, mais curieusement, cette même Ordonnance ne donne aucunement la date du Procès-verbal constatant la désignation de 2 autres Membres issus toujours du groupe Conseil Supérieur de la Magistrature, ce qui ne permet pas d’en constater le respect du délai de 48 heures fixé par l’article 2, en son alinéa 3, de la Loi organique n°13 /026 du 15 octobre 2013, portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle.
Donc, l’Ordonnance n°20/116 du 17 juillet 2020, du Président de la République, outre qu’elle est, en réalité, sans propositions préalables du Conseil Supérieur de la Magistrature et dépourvue du contreseing constitutionnel du Premier Ministre, Chef du Gouvernement, constitue autant de violations intentionnelles, délibérées, manifestes, systématiques et flagrantes de la Constitution, en ce que le Président de la République s’est basé sur un procès-verbal fictif et imaginaire, inventé de toutes pièces, par ailleurs dépourvu de date, violant ainsi, de manière intentionnelle, manifeste et flagrante, la Constitution et la loi organique précitées.
Bien plus, l’Assemblée Générale du Conseil Supérieur de la Magistrature, seul organe légal habilité à faire, notamment, des Propositions de nomination, de promotion ou de permutation, ne s’est jamais réunie depuis l’investiture du nouveau Président de République, pour proposer la nomination des Magistrats Dieudonné Kamulete Badibanga et Alphonsine Kalume Asengo, à la Cour constitutionnelle, et n’a jamais donné de mandat à son Bureau pour ce faire.
Les 2 Juges ont été anticonstitutionnellement nommés, le 17 juillet 2020, et puisés dans le même groupe du Conseil Supérieur de la Magistrature, au lieu d’un seul, qui devait l’être, par tirage au sort, en avril 2021 et l’Ordonnance n° 20/116 du 17 juillet 2020, portant leur nomination à la Cour, ne donne pas la date du Procès-verbal constatant leur désignation par le Conseil Supérieur de la Magistrature.
Faut-il rappeler que la Loi organique n°13 /026 du 15 octobre 2013, portant organisation et fonctionnement de la Cour constitutionnelle, spécialement en son article 4, prise en exécution de l’article 169 de la Constitution, dispose impérativement et expressément qu’est nulle de plein droit, toute nomination intervenue en violation des articles 2 et 3 de cette Loi organique.
De ce fait, leur nomination par Ordonnance du Président de la République n°20/116 du 17 juillet 2020 est nulle de plein droit, conformément à l’article 4 de la Loi organique régissant l’Organisation et le Fonctionnement de la Cour constitutionnelle. Bien plus, le contreseing vanté du Vice-Premier Ministre, Ministre de l’Intérieur et Sécurité, a été apposé sans droit ni qualité, mais plutôt par ruse, dol, malice et fraude et a été ainsi réalisé au moyen du non-respect de la Loi pénale et de la commission des crimes de droit commun, à savoir : le Faux en écritures et l’Usage de Faux.
Dès lors, une telle Cour constitutionnelle, composée des membres nommés en violation de la Constitution, de la Loi organique n°13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle et du Code Pénal, est illégale, et en conséquence, a perdu toute sa légitimité pour prétendre fonctionner en tant que juridiction qui a en charge le contrôle de la constitutionnalité des lois, des actes ayant force de loi et des actes règlementaires, et le contentieux électoral.
– Violation de l’article 28 de la Loi organique n°13/026 du 15 octobre 2013, portant organisation et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle.
L’article 28 de la Loi organique n°13/026 du 15 octobre 2013, dispose que « tout Membre de la Cour peut librement démissionner. A cette fin, il adresse une lettre à la Cour qui en apprécie l’opportunité. Le Président de la Cour en informe le Président de la République, l’Assemblée Nationale, le Sénat et le Conseil Supérieur de la Magistrature. Il est pourvu au remplacement du Membre démissionnaire conformément aux dispositions des articles 2 à 8 de la présente Loi organique. »
Or, l’Ordonnance n°20/116 du 17 juillet 2020, portant nomination des 3 Membres de la Cour constitutionnelle remplaçants (Dieudonné Kaluba Dibwa, Dieudonné Kamulete Badibanga et publiée par le président de la République, indique clairement, dans ses Visas, qu’elle est prise en remplacement d’un membre démissionnaire, mais dans la même série de Visas, la même Ordonnance se réfère curieusement aux Ordonnances n°14/021 du 7 juillet 2014, concernant uniquement le Juge Noël Kilomba, et n°18/038 du 14 mai 2018, concernant uniquement le Juge Jean Ubulu, qui n’ont, pourtant, jamais démissionné, en violation des dispositions de l’article 28 de la loi organique précitée.
Donc, le fait, pour le Président de la République, d’avoir signé et publié l’Ordonnance n°20/116 du 17 juillet 2020, portant nomination de 3 Membres à la Cour constitutionnelle, au lieu d’un 1 seul, pour remplacer le Membre démissionnaire de son groupe (Benoit Lwamba), constitue autant de violations intentionnelles, délibérées, manifestes, systématiques et flagrantes de la Constitution, en ce qu’il a nommé 2 membres à la Cour constitutionnelle, pour remplacer deux autres membres de la Cour, qui n’ont jamais démissionné, et dont les mandats sont toujours en cours, viole l’article 28 de cette loi organique, promulguée en application de l’Article 169 de la Constitution, viole les articles 2 à 8 de la même Loi organique, relatifs aux modalités de remplacement des Membres de la Cour constitutionnelle et, en conséquence, est nulle de plein droit, en application de l’Article 4 toujours de la même Loi organique.
Dès lors, une telle Cour constitutionnelle, au sein de laquelle 3 nouveaux membres ont été nommés en violation de la Constitution, de la Loi organique n°13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle et du Code Pénal, sous prétexte de remplacer deux autres qui n’ont pourtant jamais démissionné et dont le mandat est toujours en cours, portant ainsi la composition à 11 membres au lieu de neuf (9) constitutionnellement prévus, est illégale, et en conséquence, a perdu toute sa légitimité pour prétendre fonctionner en tant que juridiction qui a en charge le contrôle de la constitutionnalité des lois, des actes ayant force de loi et des actes règlementaires, et le contentieux électoral.
– Violation de l’article 10 de la Loi organique n°13/026 du 15 octobre 2013, portant organisation et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle.
L’article 10 de la Loi organique n°13/026 du 15 octobre 2013, dispose que « Avant d’entrer en fonction, les membres de la Cour sont présentés à la Nation, devant le Président de la République, l’Assemblée Nationale, le Sénat et le Conseil Supérieur de la Magistrature représenté par son Bureau. Ils prêtent (Serment) devant le Président de la République….
Le Président de la République leur en donne acte ».
Or, la présentation, mercredi 21 octobre 2020, dans la salle de Congrès du Palais du Peuple, de trois (3) nouveaux membres de la Cour constitutionnelle à la Nation s’est faite dans des conditions illégales. En effet, il n’y avait ni l’Assemblée Nationale ni le Sénat, cette absence ayant été préalablement notifiée au Président de la République par les Présidents de deux Chambres dans leur lettre conjointe et motivée N/Réf. : RDC P/ASS.NAT-SENAT/45/2020 du 20 octobre 2020. La présentation des Membres de la Cour Constitutionnelle à la Nation est une condition légale préalable à la prestation de Serment. Par contre, l’opinion a assisté à une mascarade de cérémonie de prestation de Serment devant le Président de la République en présence des cadres et militants de son parti politique, parmi lesquels quelques Députés et Sénateurs venus à titre personnel, au Palais du Peuple envahi par les Combattants de l’UDPS/ Tshisekedi et les « parlementaires debout », dont certains avec costumes et écharpes, étaient déguisés en Députés nationaux et Sénateurs, dansant et chantant à la gloire du Président de la République, tandis qu’après l’hymne national, les militants de l’UDPS/ Tshisekedi ont entonné, à tue-tête et en plein Hémicycle du Parlement, dans une cérémonie censée être officielle, l’hymne de leur parti politique.
Donc, la cérémonie qui a eu lieu le mercredi 21 octobre 2020 dans la salle de Congrès du Palais du Peuple, siège du Parlement, pris d’assaut et de force par le Président de la République et ses invités, viole l’article 10 de la Loi organique précitée et, de ce fait, ne constitue nullement une cérémonie de prestation de Serment au sens de la Loi et en conséquence, les Juges constitutionnels, qui ont été soumis à une telle procédure, ne sont pas encore revêtus d’une telle qualité ni habilités à remplir leurs fonctions à la Cour Constitutionnelle.
Ainsi, à l’illégitimité de la Cour due à l’inconstitutionnalité et à l’illégalité de sa composition, s’ajoute l’illégitimité due à l’absence du serment exigé de tout membre de la Cour constitutionnelle, conformément à la Loi organique n°13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle, en son Article 10.
Par conséquent,
Au regard des dispositions pertinentes de l’article 158 de la Constitution et des articles 2 et 28 de la Loi organique n°13/026 du 15 octobre 2013, portant organisation et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle, qui ont été toutes littéralement violées par le Président de la République, dans son Ordonnance n°20/116 du 17 juillet 2020, portant nomination des trois (3) nouveaux Membres de la Cour Constitutionnelle, cette nomination tombe sous le coup de l’article 4 de la même Loi organique, qui dispose impérativement et expressément qu’est nulle de plein droit, toute nomination intervenue en violation des articles 2 et 3 de cette Loi organique.
Dès lors, le rejet de ces Ordonnances par les autres Institutions de la République, les observations critiques émanant de toutes les couches sociales et de tous les coins de la République, et finalement la clameur publique qui ne cesse de s’amplifier autour de ces violations constitutionnelles par les Ordonnances présidentielles du 17 juillet 2020, concourent et convergent, tous, gravement vers l’affirmation sans équivoque de l’illégitimité manifeste de la Cour constitutionnelle, dans la mesure où, notamment sa composition est inconstitutionnelle en violation de l’article 158 de la Constitution et où certains de ses Membres ont été nommés en violation des articles 2 et 28 de la Loi organique n°13/026 du 15 octobre 2013, portant organisation et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle, sans perdre de vue l’imbroglio et le chaos qui ont caractérisé la sombre et pénible organisation de la prestation de Serment, le mercredi 21 octobre 2020, des 3 nouveaux Membres de la Cour Constitutionnelle.
C’est suite à cette clameur publique persistante que la presse locale s’en est faite l’écho pour réclamer, d’une part, l’implication des structures internes telles que les confessions religieuses ou internationales comme la MONUSCO, et l’Union africaine (UA) et d’autres organisations sous régionales telles que la SADC,… afin de ramener à la raison les violateurs bien identifiés de la constitution et de prévenir ainsi des crises et des conflits aux conséquences imprévisibles, incalculables et, en tout état de cause, gravement préjudiciables au développement et à la paix en RDC.
Cependant, avant d’en arriver là, rien n’est encore perdu, et la première Institution, à savoir le Président de la République, peut mettre fin à cette illégitimité de la Cour, qu’il a délibérément créée.
Pour conduire à nouveau la Cour constitutionnelle sur la voie de la légitimité, mettre fin à sa paralysie et ramener l’équilibre et l’harmonie dans le fonctionnement des Institutions, il est encore temps, pour le Président de la République, de rapporter ses Ordonnances, particulièrement celle n°20/116 du 17 juillet 2020, portant nomination des 3 nouveaux membres de la Cour Constitutionnelle.
A défaut, pour le président de la République, et dans un esprit d’apaisement, de rapporter ses Ordonnances, il ne serait pas trop d’attendre des 3 nouveaux Membres de la Cour Constitutionnelle qui, à leur niveau, ne manquent ni le sens de l’intérêt de l’Etat, ni la conscience de leurs responsabilités, de démissionner volontairement de leurs fonctions illégalement attribuées, compte tenu de la tempête et de la clameur publique qui n’ont cessé d’accompagner leur nomination.
Malheureusement et pour le moment, ayant placé délibérément la Nation devant une telle impasse, le Président de la République est susceptible d’être poursuivi pour tentative de renversement du régime constitutionnel, qualifiée de crime imprescriptible contre l’Etat et la Nation par l’Article 64, et d’exercice du pouvoir par les violations intentionnelles multiples et répétées de la Constitution, qualifiées de haute trahison par l’Article 165 de la même Constitution.
Fait à Kinshasa, le 4 novembre 2020