«L’intervention du ministre Kankonde Gilbert sur TV5 monde m’a rendu malade», écrit sur twitter le défenseur des droits humains Jean Claude Katende pourtant proche de l’UDPS. Il réagissait à l’interview du vice-premier ministre congolais de l’Intérieur au journal Afrique de la télévision francophone le 5 octobre dernier. Gilbert Kankonde venait de confirmer à la face du monde les critiques de ceux qui pensent qu’il n’a pas la carapace suffisamment épaisse pour une mission aussi sensible que celle de garantir la sécurisation du territoire national.
Sa prestation était en effet comparable aux élucubrations militantes des parlementaires debout de son parti l’UDPS qui, à l’ombre des arbres de la 10ème rue/Limete, s’épanchent quotidiennement avec un langage amphigourique sur l’actualité sans que l’on ne puisse capter la quintessence de leurs communications à moins d’être un initié.
Ce dont tout le monde a pu s’apercevoir concernant ce travers du plénipotentiaire congolais est à l’image de la gestion catastrophique de ce secteur qui est véritablement un parent pauvre de ces premières années Fatshi.
Il appert clairement que le ministère de l’Intérieur et sécurité navigue tout simplement à vue au gré d’une gestion ponctuelle et épidermique des urgences. Tout porte à croire que le n° 2 du gouvernement Ilunga Ilunkamba n’est pas à la hauteur des missions hautement régaliennes qui sont les siennes et préfère se consacrer aux chamalleries politiciennes ambiantes.
UDPS d’abord, l’Etat après
La gestion du vice-premier ministre Kankonde prouve qu’il est davantage préoccupé par les intérêts partisans de son camp politique que par la mise en oeuvre de la politique sécuritaire du gouvernement dont la charge lui incombe. Conséquences : la déliquescence et l’effondrement de l’autorité de l’État ainsi que la recrudescence de l’insécurité dans presque toutes les provinces du pays. Gilbert Kankonde a en effet instauré une sorte de prime à l’impunité en faveur des moutons noirs de la territoriale et des services de sécurité à la condition qu’ils fassent allégeance à l’UDPS. «En faisant du militantisme le critère d’excellence pour ses collaborateurs à tous les niveaux, le ministre Kankonde tire peut être sans le savoir une balle dans le pied du président Tshisekedi. Son comportement est un appel d’air à tous les médiocres, flagorneurs, détouneurs de deniers publics et corrupteurs de tout genre qui pourrissent déjà le premier quinquennat du chef de l’Etat», estime un sécurocrate sous le sceau de l’anonymat.
L’analyse se vérifie au regard du bilan à mi-parcours des provinces dont les gouverneurs ont été ‘‘débauchés’’ par l’UDPS. L’ingouvernabilité y est devenue le maître mot du fait d’une instabilité politique chronique suscitée par le ministre lui-même. Au final, l’opinion retiendra qu’aucun progrès n’aura été possible dans ces entités à cause de la protection de responsables incompétents par le gouvernement central et le parti présidentiel comme au bon vieux temps du parti-Etat MPR de triste mémoire. On en veut pour preuve, le cas des provinces du Kongo Central et du Sankuru où le quotidien est rythmé depuis plusieurs mois par l’inadéquation entre les majorités parlementaires et les exécutifs qui en sont théoriquement l’émanation.
Concernant le Sankuru, le vice-premier ministre a tout simplement choisi de relayer au niveau du gouvernement central la rhétorique d’un gouverneur incapable de défendre son programme devant l’Assemblée provinciale comme l’y oblige la loi depuis 2 ans en déclarant, pince sans rire, que des hommes politiques du coin entretiendraient des ‘‘milices’’. Si on peut concéder au jeune restaurateur venu de Lille (France) pour tenter sa chance – eloko – pamba dans cette RDC où l’on se permet tout de confondre les communautés en conflit dans son entité avec des milices, l’on ne saurait expliquer que le patron du ministère de la Sécurité du gouvernement central s’amuse à utiliser la même terminologie galvaudée en plein conseil des ministres devant le chef de l’Etat et le 1er ministre.
De fait, malgré ses problèmes communautaires récurrents depuis Mathusalem, le Sankuru est parmi les provinces où aucune milice n’a été constituée à ce jour. Vouloir la dépeindre autrement pour complaire une nouvelle recrue politique frise l’aberration, l’irresponsabilité voire l’incompétence.
Au Kongo-Central, le ministre Kankonde a préféré boire le calice de la témérité jusqu’à la lie. Après y avoir protégé contre vents et marrées un gouverneur sommé de démissionner par la plus haute juridiction du pays en violation des dispositions constitutionnelles et légales en vigueur, il est considéré comme celui qui a orchestré avec ce dernier l’éjection du président de l’organe délibérant de cette province.
Le moins que l’on puisse dire est qu’à ce rythme, le président de la République aura bien du mal à justifier le passif qui s’accumule au ministère de l’Intérieur et de la Sécurité lorsque sonnera l’heure du bilan.
JBD