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Les membres de l’UDPS sont descendus dans la rue le 9 juillet courant pour s’opposer à la désignation de Ronsard Malonda comme Président de la CENI. En tant que patriote, il est de mon devoir de contribuer à ouvrir les yeux de mes camarades sur la réalité de la situation afin qu’ils ne se tirent pas eux-mêmes une balle dans le pied.
A. La vérité sur l’affaire Malonda
L’affaire Malonda, c’est l’histoire de l’arroseur arrosé. Depuis 8 mois au moins, les confessions religieuses se réunissaient sous le patronage du Cardinal Ambongo en vue de désigner leur candidat Président de la CENI. Sur base de ses propres critères, le secrétariat technique mis en place à cette fin, et dirigé par l’Abbé Donatien Shole, avait enregistré 24 candidatures, parmi lesquelles celle de Ronsard Malonda. Un premier tri avait permis de retenir 6 candidatures. Faisant suite à l’exigence du Cardinal, trois candidats originaires du Kasaï sont éliminés puisque provenant de la même province que le Chef de l’Etat en exercice. Trois candidats demeurent dans la course : Messieurs Cyrille Ebotoko, Ronsard Malonda, et Eale Bosela. Le cardinal retire son candidat qui était Cyrille Ebotoko au profit du Pasteur Eale, présenté par l’ECC du Révérend Bokundoa. Il reste donc 2 candidats dans la course : Ronsard Malonda et le Pasteur Eale. Après investigations, il se révèle que le Pasteur Eale est membre du parti politique FCR (Front Citoyen pour la République que préside Jean-Bertrand Ewanga. Ce parti est membre du regroupement politique A.R. (Alternance pour la République) ; lui-même composante de la plateforme Lamuka dirigée par quatre personnalités politiques : Moïse Katumbi, Jean-Pierre Bemba, Adolphe Muzito, et Martin Fayulu. Le Pasteur Eale avait, en effet, été candidat aux scrutins électoraux de 2018 sur la liste de ce parti politique. Ainsi éclate la supercherie : le Cardinal avait depuis le début manœuvré pour installer un membre de LAMUKA à la tête de la CENI, en la personne du Pasteur Eale Bosela.
Un seul candidat étant resté en lice, Ronsard Malonda, le débat était logiquement clos. Six des huit confessions religieuses soutiennent la candidature de ce dernier ; tandis que le Cardinal Ambongo et le représentant de l’ECC se rebiffent. Devant la tentative du Cardinal Ambongo de bloquer la machine, un PV signé par les 6 confessions majoritaires est déposé à l’Assemblée. Et la Chambre basse d’entériner la candidature de Ronsard Malonda. Il est évident que toute cette agitation autour de Ronsard Malonda n’aurait jamais eu lieu si le coup fourré mijoté par le Cardinal Ambongo avait réussi et que le candidat de Lamuka, le Pasteur Eale Bosela, avait été désigné pour occuper la présidence de la CENI. Voilà la réalité.
B. L’enjeu politique
Comme chacun le sait, la plateforme LAMUKA est née à Genève, à l’issue d’une messe noire organisée par les puissances occidentales, et présidée par Monsieur Allan Doss, l’ancien patron de la MONUSCO en RDC.
Après la disqualification du candidat membre de Lamuka de la compétition pour la présidence de la CENI, le Cardinal se lance dans la bataille pour bloquer la machine et organise le soulèvement de la population, comme il avait menacé dans son « appel au jihad » en s’adressant aux catholiques à l’occasion de la commémoration du 60ième anniversaire de l’Indépendance, le 30 juin dernier. En fait, toutes ces marches d’aujourd’hui, au cœur desquelles se retrouve le Cardinal Ambongo, relèvent d’une stratégie de chaos minutieusement étudiée en vue de déboucher sur un dialogue politique devant remettre LAMUKA en selle. En effet, ceux qui tirent les ficelles, et qui financent ces marches, sont les mêmes qui avaient organisé le Conclave de Genval, en Belgique, ainsi que la messe noire de Genève, en Suisse. A Genval, il s’agissait de rassembler l’opposition autour d’Etienne Tshisekedi et d’en faire un Président de la République pour une courte période de transition étant donné son état de santé précaire ; avec Moïse Katumbi comme Premier Ministre. Ce dernier serait alors assuré du soutien de la base politique et sociologique de l’UDPS qui, in fine, l’accepterait plus facilement le moment venu comme Président de la République après la disparition physique attendue du Sphinx de Limete. Le parrainage du patron de Mazembe par Etienne Tshisekedi devait intervenir au cours du meeting organisé par le Rassemblement de l’Opposition en face du Stade des Martyrs de Kinshasa, le dimanche 31 juillet 2016. Et les marches des 19 et 20 septembre 2016 faisaient partie d’un plan insurrectionnel bien programmé. Les violences et autres turbulences devaient justifier l’intervention des troupes étrangères et l’entrée en jeu de la MONUSCO prépositionnée sur notre territoire. Joseph Kabila devait être arrêté ou mis en fuite. Et Etienne Tshisekedi allait être installé dans le fauteuil présidentiel pour un court moment, et ligoté par les maîtres du jeu.
A Genève, il s’agissait d’aligner tous les candidats de l’opposition derrière un seul homme que les impérialistes allaient soutenir avec leur puissance financière et médiatique. Moïse Katumbi hors course, le maillon le plus faible, et donc le plus malléable, puisque ne disposant d’aucune force politique propre sur terrain, fut ciblé en la personne de Martin Fayulu pour s’asseoir dans le fauteuil présidentiel ; juste le temps de réorganiser les élections au bénéfice du patron de Mazembe.
C. Les dessous des cartes d’un dialogue à tout prix
Ceux qui organisent les marches d’aujourd’hui, avec le financement des puissances étrangères, n’ont comme objectif final que de remettre Lamuka en selle. Cela passe par le dialogue politique et, éventuellement une anticipation des élections ; ce qui conduirait, au minimum, à affaiblir Félix Tshisekedi, en le plaçant dans une sorte de camisole de force politique, ou carrément, à le défenestrer de la Présidence de la République. La dégradation de la situation économique et sociale aggravée par l’intrusion du coronavirus vient donner des armes supplémentaires aux ennemis de notre pays. Comme en 1885, ils continuent à le considérer comme leur chasse gardée, un marché ouvert au libre commerce international. Ils tiennent à tout prix à placer à sa tête une marionnette à leur dévotion. Et cet homme n’a jamais été Félix Tshisekedi. Tout au plus cherchent-ils à instrumentaliser ce dernier pour, d’une part, anéantir l’UDPS en l’empêchant de se réorganiser et de se restructurer : pas de conclave, de Congrès, de Bureau Politique, de Convention Démocratique, de bureaux d’études, etc : tout ce qui fait d’une simple association un véritable parti politique. Ils cherchent, d’autre part, à s’en servir pour faire imploser la coalition FCC-CACH et pour fragiliser Joseph Kabila en vue de le faire disparaître de la scène politique congolaise politiquement ou, si possible, physiquement. Mais, selon toute vraisemblance, Joseph Kabila écarté, ou éliminé, Félix Tshisekedi sera aussitôt « croqué » comme un oiselet par les ogres qui vont ainsi reprendre entièrement les commandes de notre pays. Et la parenthèse de la passation pacifique et civilisée du pouvoir sera aussitôt refermée, les ambitions congolaises d’autodétermination stoppées, et le nouveau Code Minier jeté à la poubelle. C’est sans aucun doute là la principale mission de « notre ami, le très Congolais », Mike Hammer, ambassadeur des Etats-Unis en RDC, alias Mister Nzita.
D. Ouvrons donc les yeux
Félix Tshisekedi n’a pu être élu Président de la République que parce que un homme, Joseph Kabila, a su déjouer les stratégies des impérialistes. Il a, par exemple, décidé que les Congolais devaient eux-mêmes s’approprier leur processus électoral intégralement : le contrôler de bout en bout, refuser l’immixtion de l’ONU (la MONUSCO), c-à-d des puissances occidentales, faire financer le processus électoral par le Trésor public congolais seul, refuser l’interférence de l’Union Européenne par le biais de ses « observateurs » ; tant il est de notoriété publique que ceux-ci débarquent généralement dans le pays dont ils viennent observer le déroulement du processus électoral avec des résultats concoctés par eux dans leur mallette ; résultats qui sont aussitôt relayés par leurs médias puissants tels que RFI, TV5, France 24, BBC, DW, Voix de l’Amérique, notamment, prenant ainsi de court ceux à publier par les autorités compétentes du pays hôte.
E. La position du Cardinal Ambongo à l’endroit de Félix Tshisekedi et de la coalition FCC-CACH
La position du Cardinal Ambongo vis-à-vis de la présidence de Félix Tshisekedi est connue. Et elle n’a pas changé d’un iota depuis la publication des résultats électoraux.
A titre d’exemple, revenant d’un séjour de deux semaines aux États-Unis, où il s’est notamment entretenu avec J. Peter Pham, l’envoyé spécial des Etats-Unis dans la région des Grands Lacs, et après des rencontres au Ministère français des Affaires Etrangères, le Cardinal s’exprime en ces termes dans le Jeune Afrique du 27 mars 2019 : « …À l’issue des élections, on a proclamé la victoire d’un président qui n’a pas été élu. » Et de poursuivre : « … Il (le Président Tshisekedi) deviendra plus fort s’il s’appuie sur l’opposition avec laquelle il a travaillé par le passé. »
Plus récemment, revenant à la charge dans son homélie du 30 juin 2020,à l’occasion du 60ème anniversaire de l’Indépendance de la RD Congo, le Cardinal AMBONGO en rajoute : « …C’est de la responsabilité de ceux qui se sont coalisés, le Président et le Président sortant, de faire éclater cette coalition qui conditionne le développement de notre pays. Et aussi longtemps que cette coalition sera là, il n’y a rien à espérer de nos Gouvernants. C’est inacceptable. »
Et, parlant de Ronsard Malonda, le Cardinal tranche : « … ce Monsieur était le cerveau-moteur du système Naanga. Nous n’en voulons pas. » Et de poursuivre : « Les jours à venir seront difficiles. Et je tiens ici à demander au peuple de se tenir en ordre de marche. Lorsque le moment viendra, (…), il faudra qu’ils nous trouvent sur leur chemin. On ne peut pas continuer, après 60 ans de l’indépendance du pays, à gouverner par défi, par mépris du peuple, par mépris de l’Eglise Catholique et de l’Eglise Protestante. »
Après de tels propos, il ne fait l’ombre d’aucun doute que, si le complot actuellement en cours d’exécution réussit, l’actuel Président de la République sera rapidement neutralisé, et le premier parti à étrangler sera l’UDPS pour que les conjurés, internes et externes, aient les mains entièrement libres.
En effet, très largement majoritaire au Parlement, la coalition FCC-CACH les empêchent de faire exécuter leurs désidératas, et autres basses besognes par Félix Tshisekedi. Ils souhaitent le voir évoluer en électron libre ; donc plus facile à manipuler. Alors, il faut coûte que coûte dynamiter cette coalition. C’est ce que recherchent les puissances occidentales. C’est ce qu’a répété le Cardinal Ambongo dans son appel au Jihad du 30 Juin.
Nous devons nous ressaisir
Tenant compte de tout ce qui précède, qu’est-ce que l’UDPS est allé faire dans cette aventure rocambolesque de marches visant la destabilisation du pouvoir de Félix Tshisekedi ? L’UDPS peut-elle œuvrer contre la souveraineté de la RDC ? Ce serait trahir l’idéal du noble combat politique de notre parti, la mémoire de nos martyrs et celle des pères de notre Indépendance. Cela n’a aucun sens.
Félix Tshisekedi, qui jouit de la légitimité et de la légalité, doit plutôt tout mettre en œuvre pour recréer la cohésion nationale, redynamiser et s’assurer du soutien indéfectible de la coalition FCC-CACH. Avec cette coalition, il bénéficie d’une majorité de plus de 70 % au Parlement. Il doit donc la renforcer et la gérer au mieux des intérêts de peuple congolais. Ensemble, ils ont le devoir, et ils disposent pour cela de tous les moyens et de tous les atouts, de prendre des décisions et engager des réformes qui améliorent les conditions de vie de nos compatriotes. C’est pour cela que le peuple congolais leur a majoritairement accordé son suffrage.
C’est donc en RDC que le fils biologique d’Etienne Tshisekedi, et fils politique de l’UDPS, doit puiser les forces nécessaires pour diriger notre pays, et non chercher à s’appuyer sur ces puissances prédatrices qui maintiennent nos populations le nez sous l’eau. Si Félix Tshisekedi va chercher sa force à l’étranger, ceci constituerait un recul considérable sur la voie de l’émergence de notre pays, un affaiblissement de notre souveraineté après que nous ayons réussi des élections non-violentes et une première passation civilisée de pouvoir au sommet de l’Etat congolais.
D’autre part, Félix Tshisekedi a le devoir d’utiliser le prestige et l’autorité que lui confère sa fonction de Président de la République pour remettre l’UDPS debout. L’UDPS doit, en effet, nous survivre. Tel est l’engagement de ses Fondateurs qui doit être coûte que coûte pérennisé. Il doit peser de tout son poids pour que le Parti batte le rappel de ses troupes, se dote d’un Bureau Politique à même de faire face aux enjeux politiques, économiques, sociaux, sanitaires, et géostratégiques du moment, et cela à l’issue d’un conclave de remobilisation, de renforcement des capacités, et de réarmement morale et idéologique de ses cadres. Il doit déployer toute son énergie pour consolider la coalition FCC-CACH autour de quelques priorités clairement identifiées en termes de réformes et de lois susceptibles de redonner espoir aux populations congolaises afin de pouvoir continuer à mériter sa confiance, enraciner le pouvoir dans le pays, et donner à l’UDPS la chance de se présenter devant le peuple aux prochains scrutins électoraux tête haute.
Enfin, s’appuyer sur les puissances étrangères pour diriger le Congo, c’est se mettre en position de « gouverneur noir », et prendre le risque d’être jeté dans la poubelle de l’histoire comme un kleenex après avoir été pressé comme un citron. L’histoire nous a donné beaucoup d’exemples à ce sujet.
G. Le combat de l’UDPS
Ayant à sa disposition un gouvernement soutenu par une très confortable majorité au Parlement et un parti politique qui jouit d’une grande popularité au niveau national et d’une respectabilité certaine au niveau international du fait de sa longue lutte pour la démocratie et le bien-être de la population, le peuple congolais attend de Félix Tshisekedi des changements palpables dans leurs conditions de vie, la sécurisation du patrimoine national, la construction du pays. Le peuple a besoin d’un Président bâtisseur. Félix Tshisekedi doit en permanence garder à l’esprit qu’il a été élu par les Congolais, pour les Congolais ; et non pour servir les intérêts du capital international.
En conséquence, l’UDPS a le devoir de descendre dans la rue, certes ; mais pour défendre la cause du peuple congolais et soutenir les réformes et autres lois qui confortent les institutions de la République et améliorent les conditions de vie de nos compatriotes. L’UDPS peut descendre dans la rue pour exiger la réforme du système électoral, afin que nous ayons des élections qui ne coûtent pas au Trésor Public 1,5 milliard de dollars dans un pays où le Budget de l’Etat ne dépasse guère les 5 Milliards de dollars ; pour exiger un système qui mobilise tous les Congolais et produit des résultats plus fiables et permet des choix plus rigoureux des compatriotes appelés à prendre les commandes de notre pays. L’UDPS peut descendre dans la rue pour exiger la tenue des élections communales et locales. L’UDPS peut descendre dans la rue pour exiger l’organisation du recensement général et l’identification des Congolais. L’UDPS doit s’investir dans un choix judicieux de ses délégués au Bureaux de la CENI ; délégués qui doivent être des incorruptibles ; parce que la décision finale est collégiale ; même si c’est le Président qui l’exprime. Ainsi, cela n’a aucun sens que des Congolais meurent dans une manifestation convoquée par une UDPS instrumentalisée par des intérêts étrangers, sous prétexte de s’opposer à un Ronsard Malonda à qui il n’appartient aucunement de désigner le futur Président de la République Démocratique du Congo. Il est inacceptable que notre Parti apporte son soutien à ceux des Congolais qui préparent le chaos afin que ceux qui les ont mis en place reprennent les commandes de notre mère-patrie.
Ne nous trompons ni de combat, ni d’ennemi.
Corneille MULUMBA
Membre co-fondateur de l’UDPS