Les africains devraient se méfier des rapports de certaines ONG occidentales de défense des droits de l’homme dégoulinant d’une empathie apparente pour les victimes des violations des droits de l’homme sur le continent. Plusieurs analystes scrutent désormais le timing de ces rapports parfois politiquement motivés et y décèlent la volonté de groupes d’influence ou de gouvernements auxquels ces ONG servent de paravents. Le milliardaire hongrois-américain Georges Soros a, à ce sujet, fait l’objet de nombreuses publications sur ses accointances pour le moins incestueuses avec quelques défenseurs de droits de l’homme.
Cette astuce lui permet d’avoir toujours une longueur d’avance dans la spéculation boursière. Avec d’autres négriers des temps modernes, il a en Léopold II un illustre précurseur. En 1885, ce roi des belges s’était vu accorder la régence de l’État Indépendant du Congo par la conférence du bassin du Congo à Berlin. Le pays comptait alors plus de 20 millions d’habitants. À sa mort en 1909, après avoir cédé ‘‘sa’’ propriété à la Belgique, 10 millions d’indigènes manquaient à l’appel. La mission civilisatrice de ce souverain n’avait été en réalité qu’un génocide alors qu’il prétendait combattre les esclavagistes, convertir et ‘‘civiliser’’ les populations du cru. En fait, Léopold II avait réduit ces dernières à un esclavage à peine déguisé à coups de baïonnettes et de canons grâce notamment à une ingénierie très sofistiquée de la torture (chicotte et amputation de membres à la moindre incartade) pour s’appropier sans contre-partie l’ivoire, le bois, l’huile de palme et le caoutchouc.
La métropole belge lui emboîtera le pas par une colonisation parmi les plus cruelles de l’histoire. C’est au moment où, au Congo et en Belgique, des débats sur ce passé douloureux se corsent à la suite du crime raciste commis par un policier blanc de Minneapolis (USA) qu’Amesty International se fend d’un rapport sélectif, sous le titre spécieux: «République Démocratique du Congo. Sans suite ! Pas de justice pour les victimes de la répression brutale de 2015-2018». L’ONG britannique aurait voulu zapper le débat sur le racisme anti-noir qu’elle ne se serait pas prise autrement. La période de trois ans sortie du lot tend à opposer les Congolais les uns aux autres pour les empêcher de se joindre à cette campagne et à s’unir autour de leurs propres aspirations. En effet, Amnesty International fait l’impasse sur d’innombrables crimes de masse commis durant la colonisation belge, pendant les sécessions post-indépendance, ou encore des millions de morts causées par des guerres d’agressions soutenues par des multinationales occidentales au Congo. La ‘‘troisième guerre mondiale africaine’’ qui s’est déroulée au Congo faisant plus de 5 millions de morts est ainsi passée par pertes et profits. La RDC continue pourtant à souffrir de toutes ces tragédies du fait de la survivance des forces négatives qui continuent d’y semer la mort chaque jour.
Un rapport tiré par les cheveux
L’auteur de ce rapport suspect, Deprose Muchena, directeur du bureau régional pour l’Afrique de l’Est et l’Afrique australe d’Amnesty International fait état de 115 entretiens que son organisation aurait réalisés auprès des rescapés et membres de familles des victimes. Il évoque 320 personnes tuées lors de manifestations pacifiques. Et s’indigne en conséquence des «enquêtes grotesques» qui n’auraient donné lieu à «aucune poursuite judiciaire». Comme pour indiquer que les bourreaux agissaient avec des consignes et sous la protection du pouvoir de l’époque. D’où l’injonction aux dirigeants actuels jugés insensibles à la quête de justice des victimes : «le président Félix Tshisekedi et son gouvernement doivent reconnaître la douleur qu’endurent les victimes et leurs familles et s’engager publiquement à poursuivre efficacement et dans les plus brefs délais les responsables présumés de ces actes», fulmine Muchena. Sans quoi il serait établi que l’actuel chef de l’État «a renié ses promesses de renforcer l’État de droit, de lutter contre l’impunité et de garantir la justice, laissant dans le désespoir des centaines de familles dont les membres ont été tués lors de la crise préélectorale qu’a connue le pays». On se souvient qu’après seulement 9 mois de présidence, le nouveau chef de l’Etat congolais avait déclaré urbi et orbi qu’il ne souhaitait pas «fouiner dans le passé».
On se trouve face à la énième tentative d’une certaine «communauté internationale» d’obtenir une rupture entre les ténors du nouveau pouvoir qu’ils espèrent prendre sous leurs ailes et ceux de l’ancien régime voués aux gémonies. En parlant de 320 morts sans en préciser les identités et les auteurs, Amnesty International veut donner un visage monstrueux et infréquentable à l’ancien pouvoir qui aurait brillé par la violence pour ne pas organiser les élections. L’approche fallacieuse a pour objectif de jeter le discrédit sur un camp politique coupable d’indocilité face aux oukases de cette «communauté internationale» qui se gargarisait naguère dans le rôle de faiseurs de rois sous les tropiques africaines et que la diplomatie décomplexée de Joseph Kabila avait désarçonnée. Cerise sur le gâteau : le peuple congolais, tirant les leçons de l’histoire, a souverainement confié la majorité présidentielle à l’ancienne opposition radicale, et la majorité parlementaire à Kabila et ses partisans. Comble de déconvenue pour les pêcheurs en eaux troubles, l’ancien pouvoir et l’ancienne opposition radicale sont parvenus à surmonter leurs rivalités et à constituer une coalition gouvernementale afin de renforcer la cohésion nationale. Ce qui compromettait les chances des anciens colonisateurs et leurs affidés de maintenir leur main-mise sur les richesses naturelles du Congo.
À l’indépendance, ils avaient opposé le président Kasavubu au premier ministre Lumumba qui furent neutralisés au profit de l’homme de main pro-occidental Mobutu qui prit en mains le pays pendant 32 ans, avec les conséquences que l’on sait. Après le renversement de son régime, ils n’ont pas attendu longtemps pour se servir de leurs têtes de pont dans la région des Grands lacs pour diviser les Congolais sur fond de rébellions factices. C’est uniquement dans le but de diviser pour régner qu’ils essaient d’obtenir un affrontement entre Joseph Kabila et Félix Tshisekedi qu’ils poussent à cette éventualité pour des raisons qui n’ont rien à voir avec la morale et la justice.
Projecteurs sur les violences pré-électorales
On appelle violences préélectorales en RDC les manifestations téléguidées par des officines bien identifiées en vue de «dégager» Joseph Kabila et son régime dont le désamour avec les partenaires traditionnels était consommé depuis que ce dernier avait décidé de la diversification des partenariats économiques, faisant entrer en trombe dans la balance des pays émergents comme la Chine, l’Inde ou l’Afrique du Sud.
Surfant sur la vague des printemps arabes et des mouvements citoyens tels que «y en a marre» au Sénégal et le «ballai citoyen» du Burkina Faso, ces officines tentaient de reproduire l’exploit au pays de Kimbangu, pour peu qu’ils auraient circonvenu l’opposition de l’époque et la société civile. Des manifestations très violentes qui prenaient prétexte sur un refus imaginaire de Kabila d’organiser les élections se soldaient souvent par des bagarres entre manifestants chauffés à blanc et forces de l’ordre mal équipées et le plus souvent débordées. Il n’était pas rare de voir certains de ces manifestants utiliser des armes de guerre contre des forces de l’ordre qui ont payé un lourd tribu dont Amnesty International ne parle pas. Parmi les oubliés de ses rapports, figurent également des militants de partis de la majorité de l’époque surpris dans leurs différents QG vandalisés et incendiés. Le décor de la chienlit était tel qu’il était parfois difficile de comprendre qui pouvait avoir intérêt à abattre à bout portant une aspirante religieuse arpentant le perron de l’église Saint François de Salles dans la commune kinoise de Kintambo? À qui profitait réellement le crime de l’assassinat de Thérèse Kapangala dès lors que l’on connaît désormais ceux qui manœuvraient pour le chaos? Quant à des meurtres aussi «emblématiques» que celui de Rossy Mukendi à la paroisse Saint Benoît de Lemba, l’auteur formellement identifié, avait été jugé et condamné à la peine capitale. Il en a été de même lorsque la flagrance de l’usage excessif de la force publique a été constatée et portée à la connaissance des autorités judiciaires compétentes. Qu’Amnesty International n’en ait recensé que dans un camp, c’est son droit de faire la politique de ceux qui le financent, même si l’on peut regretter que l’opinion ne soit pas édifiée à dessein sur l’identification des 320 morts dont le chiffre effarant obéit manifestement à la logique sensationnelle.
Dictature révolue en RDC
Quoi que l’on dise sur la Conférence Nationale Souveraine (CNS), la RDC a atteint un point de non retour en matière de démocratie avec sa tenue. Elle fut en effet un sain exercice national de catharsis ayant largement contribué à tirer un trait définitif sur le totalitarisme. Ce n’est pas pour rien qu’à l’instar de son prédécesseur, Félix Tshisekedi ne rate jamais une occasion de demander aux zélateurs de ne pas faire de lui un dictateur. On doit lui savoir gré de vouloir
d’abord et avant tout respecter la Constitution qui n’a guère prévu de faire de la justice une prérogative du chef de l’Etat car les Congolais ont opté pour un État de droit qui suppose une séparation de pouvoirs entre l’exécutif, le législatif et le judiciaire. Il ne revient donc pas au président de la République de rendre justice à qui que ce soit comme le lui demande Amnesty International. Ces injonctions comminatoires d’une caisse de résonnance des puissances étrangères confinent à un racisme inacceptable. On n’imagine pas Amnesty International faire obligation au président américain Donald Trump par exemple de rendre justice à la famille de Geoge Floyd, victime de la bavure policière de Minneapolis. Pourquoi deux poids, deux mesures? De tels présupposés ethnologiques sous-tendent en fait un activisme anachronique. N’en déplaise aux esprits chagrins.
JBD