Exim Bank of China n’a jamais engagé quelque poursuite que ce soit contre l’Etat congolais pour défaut de remboursement d’un prêt de 555 millions comme l’avaient péremptoirement affirmé quelques sources dont l’inénarrable avocat lanceur d’alertes Georges Kapiamba. La précision en a été apportée par l’Ambassade de Chine qui a ainsi démenti l’information largement diffusée par Kapiamba concernant une sentence judiciaire condamnant Kinshasa à payer 57 millions USD à cette banque chinoise.
«Depuis sa création en 1994, Exim Bank of China n’a jamais porté plainte auprès d’une institution juridique contre le gouvernement de la RDC», peut-on lire dans le compte tweeter officiel de l’Ambassade de la République Populaire de Chine à Kinshasa.
Pourtant l’inamovible président de l’Association pour l’accès à la justice (ACAJ) citant le ministère de la Justice, avait déclaré qu’Exim Bank of China avait obtenu une décision judiciaire d’un tribunal new-yorkais en 2017 contraignant le gouvernement de la RDC à rembourser 21 millions USD d’un prêt datant de 1991 avec une maturité de 20 ans. Ajouté au principal, les dommages et intérêts portaient selon lui la somme à payer la RDC à 57 millions USD.
L’affaire a ému au sommet de l’Etat au point d’être évoquée au cours du dernier conseil des ministres. Le ministre de la Justice ayant été chargé d’enquêter là-dessus, la représentation diplomatique chinoise a mis les points sur les i. En réaction, le professeur Kikaya Bin Karoubi, député national est monté au créneau pour s’offusquer de l’amalgame qui n’honore ni ses auteurs, ni l’exécutif rd congolais. «Pour l’amour du ciel, qui au cabinet présidentiel a fait mettre dans la communication du chef de l’Etat le dossier Eximbank of China dans le conseil des Ministres du 29 Mai dernier ? », s’est-il interrogé. Rappelant que le chef de l’Etat avait, sur la foi d’informations totalement erronées, chargé le garde des Sceaux d’entreprendre des négociations avec la firme chinoise Eximbank au sujet d’une plainte à charge de la RDC devant des tribunaux de commerce internationaux de Paris et de New York concernant un montant de 555 millions USD destinés à l’érection des aéroports de N’Djili à Kinshasa et Luano à Lubumbashi. Kikaya constate que «deux personnalités réputées proches du président Tshisekedi le député national André-Claudel Lubaya et l’avocat activiste Georges Kapiamba sont montées au créneau pour présenter ‘’l’affaire Eximbank of China’’ comme la preuve du détournement, par les dirigeants du régime sortant, de la somme de 555 millions USD. Le 2 juin 2020 a affirmé Kapiamba que son organisation soupçonnait que la créance alléguée de Exim bank de 555.364.446 USD à la RVA comme une stratégie pour s’assurer un détournement des fonds publics provenant de go pass ce qui a poussé l’ambassadeur de Chine à clarifier la situation par un communiqué de presse publié le vendredi 5 juin 2020 alors que le ministre des Transports était en train d’être entendu au Sénat sur le même sujet».
Et de préciser que selon le représentant du gouvernement chinois en RDC, Eximbank of China n’a jamais porté plainte contre le gouvernement de la RDC depuis sa création en 1994 et que la construction de la nouvelle aérogare de l’Aéroport International de N’Djli sera financée par un crédit préférentiel accordé par elle et dont l’accord de prêt remboursable sur une période de 20 ans « n’est même pas encore entré en vigueur car il attend d’être ratifié par le gouvernement congolais». Cette mise au point a énervé Claudel Lubaya qui s’est cru en droit de rappeler dans un tweet au diplomate chinois qu’il n’avait pas à faire des mises au point sur des communications du gouvernement lequel devait lui-même corriger son erreur (sic !). L’ambassade de Chine avait pourtant fait observer qu’elle n’avait jamais été contactée ni par l’ACAJ, ni par personne d’autre à ce sujet.
Une bourde due à la haine et à la mauvaise foi
On croit rêver. Selon Kikaya, il existe bien une vieille histoire connue au ministère congolais des Affaires étrangères sur un prêt de la Chine nationaliste (Taïwan) consenti en 1991 au régime zaïrois du défunt président Mobutu Sese Seko alors que la République de Chine (Taïwan), et la République Populaire de Chine (Pékin), se livraient une guerre diplomatique sans merci pour une reconnaissance dans les instances internationales. «Le Zaire de Mobutu en quête de capitaux frais contracta une dette de 20 millions USD de Taïwan. Par la suite, Mobutu ayant jeté son dévolu sur la République Populaire de Chine (Pékin), Taïwan décida d’attraire son gouvernement devant un tribunal de commerce de New York aux USA où notre pays fut condamné par défaut à verser aux Taïwanais 57 millions USD, intérêts compris», signale Kikaya. «Que ceci ait échappé au cabinet présidentiel et que l’on fasse de l’amalgame jusqu’à inscrire cette créance au registre des ‘’détournements’’ du régime de Joseph Kabila, arrivé au pouvoir dans les conditions que l’on sait 10 ans plus tard démontre encore une fois le degré d’amateurisme qui a élu domicile au sommet de l’Etat», s’insurge l’élu de Kasongo (Maniema) en posant la question de savoir pourquoi Lubaya et Kapiamba ont ainsi délibérément créé la confusion dans l’opinion publique.
Confusion et dysfonctionnement du gouvernement
« Qui s’est permis d’insérer avec autant de légèreté ce point relatif à la créance purement imaginaire d’Eximbank of China dans la communication officielle du chef de l’Etat ? De par mon expérience comme ministre des Médias et porte parole du gouvernement, puis secrétaire particulier d’un président de la République, je sais que tout dossier à aborder au cours d’un conseil des ministres, particulièrement lorsqu’il engage le chef de l’Etat, doit au préalable être ficelé par son cabinet. Dès lors qu’il s’agit d’un dossier économique et financier, il revient au collège Ecofin de le mettre au point et d’obtenir le quitus du directeur de cabinet qui, à son tour, en discute avec le chef avant de le porter à la connaissance des membres du gouvernement au cours du conseil, voire d’en accepter l’évocation dans le compte rendu à publier. Faut il rappeler que tout ce qui se discute au cours d’une réunion du gouvernement n’a pas à être publié in extenso. Il y a des matières couvertes par le secret des délibérations du gouvernement qui sont des secrets d’Etat», explique-t-il. Et de faire observer que, autant au pays qu’à l’étranger, les points d’un conseil des ministres qui retiennent le plus l’attention des décideurs sont ceux relatifs aux interventions du chef de l’Etat ou du chef du Gouvernement. « Tous les mots que le chef de l’Etat prononce sont examinés et analysés minutieusement par les services compétents du monde entier».
Une consœur en ligne se demande plus crument par quelle alchimie Exim Bank of China, créée en 1994 aurait pu réclamer un prêt qu’elle aurait accordé au gouvernement zaïrois en 1991, soit trois ans avant sa création.
La crédibilité de l’Etat mise à mal
A l’évidence, l’image du pays est très malencontreusement malmenée par cette affaire ubuesque de l’instruction donnée par le chef de l’Etat au ministre de la Justice de «trouver des arrangements amiables avec Eximbank of China » pour une affaire qui n’a jamais existé car on se rend bien compte qu’il y a une confusion sur les relations questionnables que le Zaïre de Mobutu avait entretenu avec Taïwan et le projet de construction des aéroports de Ndjili et de la Luano négocié par le dernier gouvernement du président Joseph Kabila avec Exim Bank of China en 2018, près d’une trentaine d’années plus tard. Un projet pour lequel il s’avère que c’est plutôt la partie congolaise qui n’assume pas sa part de responsabilité consistant à procéder à la ratification de l’accord, chose que les autorités chinoises attendent avant de libérer le premier financement y relatif. En vain jusqu’à ce jour. D’où l’interpellation au Sénat du ministre des Transports et Voies de Communication par le sénateur José Makila Sumanda qui connaît bien le dossier pour avoir été à ce poste dans le gouvernement Tshibala.
En prenant la peine de s’informer à la source (ambassade de Chine en RDC, Exim bank of China, ministère congolais des Transports et RVA), le cabinet présidentiel aurait pu éviter cette bourde due à la paresse intellectuelle de certains lanceurs d’alertes mal intentionnés.
A bon escient, le député national Kikaya souhaite qu’à l’avenir le président de la République fera un peu plus attention aux saillies sensationnalistes des sources qui alimentent ses services.
JN
FINANCES PUBLIQUES : Kapiamba a encore menti
