Bérets par ci, effigies du président de la République par là, la vie au sein des partis politiques en RDC est de plus en plus rythmée par l’activisme des jeunes désœuvrés caractérisé par la violence verbale et physique. Ils font parler d’eux dans la rue en villes et dans les campagnes au mépris des lois de la République et du principe de la cohabitation pacifique. Tout se passe comme si un parti qui n’a pas en son sein une brigade de casseurs capables d’intimider ses adversaires ne devrait pas exister en tant que tel. Les formations politiques dites policées comme le Parti lumumbiste unifié (PALU) qui refusent de s’adonner à ce jeu donnent l’impression d’avoir carrément disparu du paysage politique.
À cette compétition du militantisme violent, la palme semble revenir à l’UDPS, parti présidentiel.
Jadis, on reconnaissait l’opposition radicale par la capacité de ses combattants à semer du désordre ou la zizanie en bravant les forces de l’ordre. La violence était pour ainsi dire l’argument permettant à certains partis politiques de faire respecter les mots d’ordre de villes mortes en caillassant les automobilistes «contrevenants» ou de brûler des sièges des partis politiques au pouvoir. C’est toute une culture de la violence qui a été ainsi institutionnalisée et qui est toujours d’actualité à l’UDPS malgré sa conquête du top job. On dirait même que ces ‘‘soldats de la rue’’ du parti au pouvoir se sont endurcis depuis l’accession de leur leader à la magistrature suprême. Ce n’est pas pour rien qu’ils ont choisi de se faire appelés du nom de terroristes afghans «talibans».
Depuis qu’à la faveur de l’exode rural de hordes des mineurs artisanaux du Kasaï se sont déversés dans la capitale et se sont convertis en taxi-moto, les kinois, pour la plupart, se sentent piégés par cette «milice tribale motorisée» qui opère à ciel ouvert avec une effarante mobilité dans la commission des crimes de droit commun.
Au moindre mot d’ordre de la hiérarchie du parti présidentiel, les «wewa talibans», un de leurs surnoms ne manquent pas d’enfreindre les lois en vigueur, y compris en instance d’état d’urgence. Ils ont même empêché le parlement de fonctionner, ce saint des saint du pouvoir législatif (palais du peuple) qu’ils ont pris d’assaut deux jours durant pour s’opposer à la tenue des débats parlementaires sur la motion de défiance visant le président a.i. de l’UDPS et premier vice-président de l’assemblée nationale Jean Marc Kabund.
Dans les provinces du Haut-Katanga, Haut-Lomami et Lwalaba, certains «talibans» n’hésitent pas à se transformer en coupeurs des routes flanqués des effigies du chef de l’État. Ils rançonnent, raquettent, tracassent et contrôlent les identités des passants au nom du «parti au pouvoir» même si certains d’entre eux ont été interpellés et mis hors d’état de nuire par les forces de l’ordre. Mais à Kasumbalesa, ville douanière située à la frontière avec la Zambie, les «combattants» de l’UDPS et de l’UNAFEC de Kyungu continuent à s’affronter pour le contrôle des postes douaniers parallèles, causant parfois mort d’homme.
À l’allure où vont les choses, il y a à craindre que le danger qui risque d’avoir raison des acquis démocratiques ne vienne plus de l’extérieur que de la violence domestiquée et légitimée au sein des ligues des jeunes des partis politiques.
L’exemple venant d’en haut, beaucoup estiment que le parti présidentiel devrait être le premier à démobiliser ses milices à travers le territoire national de peur que la chienlit ne s’installe durablement.
JBD