En marge du Congrès American Israel Public Affairs Committee (AIPAC) tenu à Washington le 1er mars 2020, le 1er vice-président en exercice de l’Union Africaine et président de la RDC Félix-Antoine Tshisekedi a été reçu par la communauté juive des États-Unis d’Amérique le lundi dernier. Il a exprimé le soutien de son pays au plan de paix pour le proche orient dévoilé fin janvier par le président américain Donald Trump pour mettre fin au conflit israélo-palestinien. « Nous soutenons le plan du président Donald Trump en faveur du retour à une paix durable et à la coexistence pacifique entre les deux Etats : Israël et Palestine », a-t-il déclaré avant d’exprimer son souhait de voir se renforcer les relations bilatérales entre la RDC et Israël où il nommera dans les prochaines semaines un ambassadeur de plein exercice. Cette prise de position énerve quelque peu celle adoptée par l’Union Africaine qui, on se rappelle, avait rejeté lors de son dernier Sommet à Addis-Abeba le projet de Trump, estimant qu’il représentait « une énième violation de multiples résolutions des Nations-Unies et de l’UA ». Le nouveau président de l’UA, le chef de l’Etat sud-africain Cyril Ramaphosa, a même comparé le plan américain au régime d’apartheid. « Cela me rappelle la terrible histoire que nous avons traversée en Afrique du Sud », a-t-il déclaré alors que le président de la Commission de l’UA, Moussa Faki fustigeait pour sa part « un plan élaboré en dehors de toute consultation internationale ».
Malaise à Addis Abeba
Alors que l’opinion congolaise n’a pas fini d’épiloguer sur les prétentions de certains officiels américains à interférer dans les affaires congolaises, notamment au sujet de la saga du général Kahimbi, chef des renseignements militaires des FARDC, dont les officiels américains s’étaient bruyamment félicités des ennuis avant qu’il ne décède 24 heures après dans des conditions questionnables au nom d’une pseudo lutte contre l’impunité (sic !), on peut s’étonner de ce soutien affiché du numéro 1 congolais au plan proche-oriental de l’administration Trump.
Sur son compte twitter, Seth Kikuni, candidat malheureux à la dernière élection présidentielle de 2018 ne va pas avec le dos de la cuillère : « Il faut que quelqu’un ait finalement le courage de dire au président de laisser la politique étrangère aux diplomates. Il faut aussi lui rappeler que la politique étrangère des Etats faibles comme le nôtre tient compte des sensibilités et équilibres internationaux », écrit-il. Plus caustique, le chroniqueur de « Couleurs tropicales » sur RFI Claudy Siar trouve que « sur la question israélo-palestinienne, la position pro américaine de la RDC est un choc. Soutenir l’occupant n’est pas digne d’un pays ayant connu l’odeur et la violence de la colonisation. Netanyahu n’a pas assisté aux funérailles de Nelson Mandela parce que Madiba soutenait la Palestine».
Le Plan Trump
en question
Le plan de paix de Donald Trump est vicié car les Palestiniens n’y ont pas été associés, critique Kurier, un activiste palestinien : « Trump croit savoir ce qui est bon pour les Palestiniens. A savoir ce qui est bon pour Israël : un Etat nain et non viable, lacéré par des colonies juives et sous le joug d’Israël. Ce plan est une humiliation pour tous les Arabes. Les chances qu’il soit mis en œuvre sont quasi-nulles. Ce qu’il reste : une action de comm’ pour deux dirigeants aux abois – Trump en précampagne pour sa réélection à la suite d’une procédure de destitution évitée de justesse, le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, visé par un procès pour corruption. C’est vraiment dur à avaler. Car après 75 ans d’affrontements sanglants, les habitants de la région méritent enfin la paix.». Concocté par Benjamin Netanyahu, premier ministre israélien et le président américain Donald Trump, ce plan ressemble à une manœuvre de diversion. Un simple coup d’œil sur la carte suffit pour comprendre que ces propositions ne peuvent être mises en œuvre. Il ne s’agit pas d’un Etat palestinien, mais d’un archipel, d’îlots reliés entre eux par d’étroits corridors. … Netanyahou peut maintenant engager l’annexion [des territoires occupés]. Jusqu’à maintenant, le premier ministre israélien avait toujours rechigné à le faire par crainte de sanctions internationales ou d’une procédure devant la Cour pénale internationale de La Haye. Mais un mois avant les élections, il s’agit de son ultime bouée de sauvetage. Il a déjà la première victoire en poche : en Israël, plus personne ne parle de son procès pour corruption. Grâce à Trump, qui, en dépit de ses belles paroles, livre les Palestiniens en pâture aux loups.
Une solution
« à deux Etats »
Le président Trump a évoqué lors de la présentation de son plan à la Maison blanche une solution réaliste à deux Etats. « Ma vision présente une occasion gagnant-gagnant pour les deux parties, une solution réaliste à deux Etats qui résout le risque que représente un Etat palestinien pour la sécurité d’Israël », a-t-il dit. Le «futur Etat palestinien » ne verrait le jour que sous plusieurs « conditions », dont le rejet clair du terrorisme. Benyamin Nétanyahou s’est également dit prêt à négocier avec les Palestiniens pour leur accorder « un chemin vers un futur Etat », mais a posé comme condition qu’ils reconnaissent Israël comme un « Etat juif ».
M. Trump a souligné que Jérusalem restera «la capitale indivisible d’Israël». Le président américain a cependant suggéré «une capitale palestinienne dans l’Est de Jérusalem », partie de la ville occupée depuis 1967 par Israël puis annexée, dont les Palestiniens veulent faire la capitale de l’Etat auquel ils aspirent. Une affaire à suivre.
A.M