D’aucuns l’ont baptisé « Chance eloko pamba », en référence à une chanson de Shungu Wembadio, « Papa Wemba » dans laquelle l’artiste évoquait les opportunistes ou parvenus qui, sans mérites arrivent à se faire une place au soleil à force de manipulations immorales ou illégales. Joseph Stéphane Mukumadi, gouverneur élu de la province du Sankuru aura eu un des mandats les plus éphémères parmi les chefs d’exécutifs provinciaux de ces dernières années parce qu’il n’a même pas pu présenter son programme d’action devant l’Assemblée provinciale, une procédure préalable légale pour tout gouverneur avant d’entrer en fonction. Après deux rendez-vous ratés avec les élus qu’il a snobés en invoquant « une convocation du vice-premier ministre en charge de l’Intérieur », il était évident que le gouverneur Mukumadi louvoyait pour ne pas se soumettre à ce devoir constitutionnel. De guerre lasse, l’Assemblée s’est résolue à voter samedi 28 décembre une motion à 19/21 voix pour la destitution de ce semi-lettré français d’origine congolaise, qui, grâce au coaching d’un certain Yves Okota, cadre de l’UNC-CACH de Vital Kamerhe, avait jonglé avec les lois en vigueur pour « acheter » littéralement le strapontin de gouverneur du Sankuru au détriment du candidat CCU-FCC Lambert Mende Omalanga. Un peu comme pour son élection le 29 Juillet 2019, la nouvelle de la déchéance de Mukumadi a fait l’effet d’une bombe au Sankuru et sur les réseaux sociaux. Destitué pour incompétence avérée, outrage à l’Assemblée provinciale et mis en accusation devant la Cour de cassation pour malversations financières, Mukumadi avait cru jusqu’à la dernière minute pouvoir surfer sur le soutien du vice premier ministre de l’intérieur, le CACH Gilbert Kankonde pour échapper à la colère de l’organe délibérant de la province. Cet espoir vain transparaît à travers une lettre de demande de report de la plénière que Mukumadi a fait signer par le vice gouverneur Tchiabylo après avoir confirmé son rendez-vous avec les élus. Sans se gêner, Mukumadi y prétextait qu’il se trouvait « à Kinshasa avec le président de l’Assemblée provinciale, pour des questions très importantes sur invitation de Son Excellence SANKURU : INCOMPETENCE RECALEE Mukumadi joue et perd Monsieur le vice premier ministre ». Manque de pot : ledit président de l’Assemblée provinciale, le député Benoît Olamba, se trouvait bien à Lusambo, le chef-lieu de la province où devait se tenir la séance plénière d’audition de son programme d’action avant l’investiture de l’exécutif provincial. Pour le député provincial Justin Omokala qui s’est confié au Maximum, « Mukumadi est analphabète qui a cru qu’il pouvait narguer tout le monde. Il ne respecte aucune loi de notre pays. Je suis sûr qu’il n’est pas devenu gouverneur pour servir la population. Il est pris en otage par des mentors boulimiques et affairistes à Kinshasa. En témoigne l’important déploiement des dragues et autres matériels destinés à l’exploitation du diamant au Sankuru sans qu’aucune formalité légale relative à l’exploitation de tels engins n’ait été rempli depuis son élection en juillet dernier ». Un constat sévère mais qui n’est guère éloigné de la vérité quand on sait que malgré le fait que seule l’investiture de l’assemblée provinciale permet au gouverneur d’entrer en fonction, donc de disposer des fonds de la province, Mukumadi a, sans attendre ladite investiture, pratiquement vidé les comptes publics du Sankuru pour acheter la conscience des députés provinciaux. On rappelle que c’est au lendemain d’un feuilleton politico-judiciaire, avec des tergiversations de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) et d’incroyables errements de l’appareil judiciaire de la RDC, aussi bien à la Cour d’appel du Sankuru qu’au Conseil d’État et au Conseil supérieur de la magistrature que l’élection des gouverneur et vice gouverneur a eu lieu le 29 juillet 2019 pour faire élire par une assemblée composée à plus de 90% de députés FCC ce candidat « indépendant » qui s’identifiera ensuite comme membre de CACH au détriment du ticket FCC emmené par le député National Lambert Mende Omalanga. Arrivé au pouvoir, Mukumadi est devenu le symbole et le visage de la haine de quelques acteurs politiques du Sankuru contre l’honorable Lambert Mende, le meilleur élu de cette province et l’un des 5 meilleurs élus de la RDC aux législatives de 2018. Il n’a pas fallu quatre mois pour que la grande majorité des députés de l’assemblée provinciale du Sankuru se rebiffent après s’être rendus compte qu’ils avaient porté à la tête du Sankuru un imposteur qui se comportait plus comme un gouverneur par procuration. Un véritable gâchis ! Mukumadi ne peut s’en prendre qu’à son esprit aventureux et sa naïveté qui ont fait de lui une proie de prédilection pour ceux qui l’ont manipulé. Il doit maintenant répondre devant la justice des malversations financières qui ont, de toute évidence plus profité à ses insatiables parrains parmi lesquels on compte un ancien ministre, député national de la circonscription de Lodja. « Aveuglé par les promesses de protection de son principal mentor, Mukumadi avait fini par se convaincre qu’il n’avait de comptes à rendre qu’à ce dernier. Il ne s’est plus soucié même de ses autres maîtres à penser à Kinshasa et ces derniers, dégoûtés par son trop plein d’assurances et ses multiples bourdes, se sont détournés de lui », témoigne un notable du Sankuru qui rappelle son altercation avec son ex-homme à tout faire, l’avocat Armand Lokeka, humilié publiquement après de « bons et loyaux services ». Le clientélisme, le népotisme et l’amateurisme dans le choix des animateurs du gouvernement ou des responsabilités importantes au sein de la province ont fait le reste. Venu en politique par effraction, le dilettante Joseph Stéphane Mukumadi qui n’a jamais caché à qui voulait l’entendre que la politique n’était pour lui qu’un moyen comme un autre de gagner de l’argent et d’en faire gagner à ses amis va sûrement rentrer à sa carrière de barman-restaurateur à Lille (France) puis à Kinshasa lorsqu’il en aura fini avec les juges de l’austère Cour de cassation devant laquelle l’assemblée provinciale du Sankuru l’a attrait pour répondre de faits de détournement de deniers publics.