Des sources proches de la Direction générale de la dette publique (DGDP) rapportent que le gouvernement a amorcé le paiement de la dette intérieure certifiée. Problème: l’opération se ferait sur une certaine sélectivité et des conditionnalités sujettes à caution. Des fournisseurs locaux éligibles seraient tenus de transférer leurs créances à un quidam contre un paiement de 50%. La pratique, répréhensible, n’est pas nouvelle. Elle a toujours survécu au ministère du Budget. Il y a encore quelques mois, sur Radio Okapi, un opérateur économique à qui l’Etat doit, voilà des lustres, quelque 404.000 USD certifiés, a crié son ras-le-bol car contraint à des négociations qu’il a jugées ténébreuses ayant pour finalité un paiement au rabais. «C’est à prendre ou à laisser», lui a-t-on fait comprendre. Pour l’exercice 2019, l’Etat avait prévu de payer la dette intérieure à hauteur de 75.292.156.000 FC soit un peu moins de 45 millions USD. Un expert de la DGDP contacté par Le Maximum, a expliqué qu’il y a un ‘‘lobbying politique’’ qui a toujours influé sur la dette intérieure au point qu’elle a souvent été payée largement au-delà des prévisions. Il y a 10 ans, en 2009, l’alors premier ministre, Adolphe Muzito, actuel chef de file de Lamuka, avait été durement secoué par le député Pius Muabilu (actuel ministre d’Etat à l’Urbanisme) qui tenait à faire toute la lumière sur le paiement de la dette intérieure à plus de 500 %. Un élu de la majorité fit publier à travers la presse la liste des bénéficiaires. Tous des politiques. Curieusement le stock de la dette ne diminue guère et titille les 1 milliard USD. En 1986, dix-neuf créanciers de l’Etat crée le Club de Kinshasa mais lors de l’atteinte du point d’achèvement de l’Initiative des pays pauvres très endettés (IPPTE) par la RDC en 2010, ce nombre passe à trente-quatre créanciers. Il s’agit notamment des privés et des entreprises bancaires non assurés en RDC, naguère victimes de la politique de la zaïrianisation (nationalisation à la Mobutu) entre 1973 et 1974. L’Etat leur doit 83.310.554.000 FC en 2019. Alors que la Fédération des entreprises du Congo (FEC), principale association patronale, estime que le gouvernement ne fait pas assez pour les dettes des fournisseurs locaux. Le gouvernement, sous Augustin Matata avait remis en doute le montant avancé par le patronat.
Rapports en dents de scie
Nos sources rapportent des brouilles entre Matata et le président de la FEC, Albert Yuma Mulimbi, dont la paie d’une livraison des drapeaux avait été gelée sur ordre de la primature. Toutefois, selon les estimations du ministère du Budget, la dette publique aurait été payée à fin décembre 2017, à 97.1 % des prévisions, soit 208.1 milliards de FC et des frais financiers qui englobent les intérêts sur la dette à plus de 123 milliards FC, soit un taux d’exécution de 100,5 %. En 2016, la dette intérieure a été payée à hauteur de 268 %, soit 53.603.821.485 FC versés aux fournisseurs locaux contre des prévisions de 20 milliards FC. Mais en marge de la traditionnelle cérémonie entre le gouvernement et le patronat, le numéro un de la FEC a été très critique contre le gouvernement, notamment sur la question de la dette intérieure. Au lieu de 9.7 milliards FC prévus, le gouvernement a décaissé 49.4 milliards FC pour honorer sa dette commerciale, soit un taux de réalisation de 507.7 %. Par ailleurs, les dettes dues au Club de Kinshasa (reprises dans la rubrique de la dette extérieure comme celles du Club de Londres et de Paris) ont été payées à 1.084,2 %, sur des prévisions de 1,8 milliard FC. L’exécution a été de 19,7 milliards FC, soit plus de 21 millions USD. Mais des analystes estiment que ces fonds ne sont pas reversés dans le secteur des biens et services. D’aucuns se demandent ce qui couve aujourd’hui sous la casquette de Club de Kinshasa. Nombre de victimes de la zaïrianisation étaient Belges, Grecs, Portugais et dans une moindre proportion, Italiens et Français. À la suite de la création de l’Office des biens mal acquis (OBMA), il a non seulement constaté de vrais faux biens zaïrianisés et de faux vrais immeubles, des usines et des plantations. De fausses vraies victimes de la nationalisation de Mobutu auraient également été décelées, rapporte-on. Hélas, l’OBMA a trempé dans des affaires de vente des biens immobiliers sous le label des biens sans maître à tel point que l’opinion a salué sa dissolution sous le régime de Transition dit de 1+4 après l’Accord de Sun City.
PLM