La cinquantaine d’agents de l’Institut de musée national congolais (IMNC) a fini, fin octobre, une formation sur le renforcement des capacités sur les techniques de conservation en matière de muséologie, dans leurs nouvelles installations de la Place Tembe na Tembe, devant le boulevard Triomphal. Pour le numéro un de l’IMNC, Henry Bandjoko, son institut devra relever les défis liés à la conservation et à la collection des objets et des œuvres d’arts en faveur de la population qui doit, elle, s’approprier sa culture en vue de pérenniser son histoire. Mais selon des observateurs, il sera difficile de convaincre les Kinois de porter un intérêt pour les statuettes, des amulettes et autres objets ancestraux : les églises de réveil ont opéré un véritable lavage des cerveaux et ont fini par convaincre la majorité des Kinois que la coutume, les traditions et leurs corollaires physiques (statuettes, masques, etc.,) ont un lien direct et de cause à effet avec le diable et ses démons….des esprits de mort, de blocage ancestral, des oncles et tantes, succubes et incubes, maris et femmes de nuit. Des photos des parents et autres ascendants défunts ont été brûleés ou déchirées en plein culte, rapporte-on, comme pour se débarrasser des «liens démoniaques» incarnés dans des images. En outre, pour symboliser une union, il n’est plus question de mettre deux statuettes, représentant un homme et une femme, au-dessus de la vitrine qui domine le salon. C’est désormais, la photo du pasteur et de sa conjointe. Par ailleurs, sous d’autres cieux, les musées rapportent au Trésor public des centaines de millions de dollars par an. Par exemple, le musée du Vatican génère en moyenne 235 millions d’euros par an. Chez nous, l’Institut de musée national congolais (IMNC), jadis répertorié comme entreprise publique, a été transformé en établissement public à la faveur de la réforme de 2009. Mais l’IMNC n’a jamais contribué au budget de l’État. Il est téméraire de compter sur les Kinois christianisés à la Hezbollah pour visiter un musée si étincellent soit-il. Toutefois, l’État a, en effet, prévu de construire 14 musées de proximité dans les provinces et un musée panafricain à Kinshasa. Le musée de Kinshasa, situé sur les hauteurs de Mont Ngaliema et voisin de l’état-major général des Forces armées de la République Démocratique du Congo (FARDC) et du ministère de la Défense nationale, ne dépasse pas mille visites l’an. Y a pas photo avec le Louvre, en France, avec en moyenne 9 millions de visites l’an, ou encore le petit musée du quai Branly, avec une moyenne de 1 million de visiteurs l’an.Tout proche de la RDC, il y a le musée de Kigali qui attire grand-monde, surtout durant le mois d’avril, période où le massacre à grande échelle des Tutsi et des familles Hutus a été perpétré en 1994. « Depuis toujours, les Congolais n’ont pas vraiment la culture de musée… Le rejet de la tradition ancestrale, de la coutume, par-delà des statues, bracelets et œuvres d’art de l’ancien temps, qualifiés de Bokoko, pratiques fétichistes, prêché dans les églises de réveil, les a davantage éloignés du musée », fait comprendre Adam Djedidja, professeur d’histoire. L’institut de musée national du Congo est en effet dépositaire du patrimoine culturel, matériel et immatériel de la RDC. Il gère des centaines d’objets, la plupart des statuettes, des amulettes et autres instruments musicaux de la diversité ethnolinguistique congolaise. Outre le musée du Mont-Ngaliema à Kinshasa, l’IMNC gère également le musée national d’art contemporain et de multimédia de l’Échangeur de Limete, des musées nationaux de Lubumbashi, Kananga, Butembo, Mbandaka, Boma, Kikwit… Le souci de l’État de conserver le patrimoine culturel national ne doit pas occulter le fait que le futur bâtiment de la place Tembe na Tembe doit être amorti et apporter son obole au budget de l’État. La principale source des revenus du Vatican est son musée. L’IMNC n’est actuellement d’aucun apport financier. À moins que l’État se décide d’un partenariat public-privé ou d’une autre formule de management pour sa rentabilité, sinon l’immeuble, don de la coopération sud-coréenne ne serait qu’un éléphant blanc. Pourtant, l’ex-siège de l’IMNC est tout un symbole. Le musée se situait à l’endroit où le grand chef coutumier Teke-Humbu du nom de Ngaliema avait érigé sa résidence. C’est en ce lieu qu’il a reçu le roi Makoko de l’autre bras du Pool Malebo, futur Brazzaville. C’est aussi à ce même endroit qu’on trouvait, à l’époque le bateau d’Henry Morton Stanley et qui est devenu actuellement Mont Ngaliema. Cet endroit a également servi de résidence au premier gouvernement belge et ensuite aux deux premiers présidents, Joseph Kasa-Vubu (de 1960 à 1965) et Joseph Désiré Mobutu (de 1965, à sa prise du pouvoir, jusqu’à la mort de sa première épouse en 1977).
POLD LEVI