Le cabinet de conseil britannique Control Risks a derechef placé la RDC sur la liste des Etats à risque politique. C’est-à-dire un pays où à tout moment une étincelle peut tout embraser. Kinshasa a trembloté mais n’a pas cédé à la panique. Ces 72 dernières heures, des éléments de la police ont été impliqués dans des cas de meurtre dont celui d’un moto-taximan dit ‘‘wewa’’ et- sans doute, le plus flagrant – celui de l’administrateur-gérant de l’hôpital Vijana, non loin de la RTNC. Certes, une autorité politique a été citée dans cet assassinat, mais c’est un acteur de seconde zone, ministre provincial de l’Intérieur de Kinshasa, Dolly Makambo. Il n’est donc pas à confondre avec le VPM de l’Intérieur, l’UDPS Gilbert Kakonde Malamba, qui a du mal à se faire obéir par les gouverneurs des provinces, tous ou presque FCC, à l’exception de celui du Kasaï-oriental, l’UDPS Maweja.
Ancien premier ministre, actuellement parlementaire, Augustin Matata Ponyo, a dit redouter qu’une crise interne de nature politique ne brise l’élan économique enclenché par la RDC depuis une dizaine d’années. Mais un effet domino n’est pas à écarter. Chili, Hong-Kong, Liban, Turquie, Algérie…France, il est une ambiance de révolte populaire qui a effet boule-de-neige. Premier vice-président du Sénat, Samy Badibanga Ntita a, lors de la dernière session de l’union interparlementaire mondial, convié les gouvernements du monde à « éviter à tout prix que ne se construisent des murs entre la société civile et la classe politique dans sa globalité. Nos parlements doivent être des forces de proposition, de production et de mise en œuvre de nouveaux instruments de droit international au service du développement durable de nos sociétés ».
En RDC, la météo politique augure plutôt des jours ombrageux et même ténébreux au sein du couple FCC-CACH, au sommet de l’Etat. Les ordonnances du chef de l’Etat sur une nouvelle mise en place à la SNCC et à la Gécamines sont toujours en souffrance. Comme son prédécesseur, Mme Wivine Mumba Matipa, le nouveau ministre du Portefeuille, le FCC Clément Kuete Nymi Bemuna n’en a cure. Pour le Cap pour le changement, le FCC pose, à travers son ministre, un acte d’irrévérence de trop vis-à-vis du président Tshisekedi. Concerné, Gabriel Kyungu, qui devrait prendre le poste du président du Conseil d’administration de la Société nationale de chemin de fer, a repris à haranguer ses troupes qui se recrutent dans les communes coupe-gorges périurbaines de Lubumbashi. Baba, comme il se fait appeler, n’a pas hésité à décocher des pics contre le FCC. «Si, c’était à Kinshasa, nous allions nous-mêmes installer ces mandataires! », a craché un combattant de l’UDPS. Plutôt tempéré, ce cadre de l’UNC, parti cher à Vital Kamerhe, dircab du chef de l’Etat, soutient « qu’un chef, ça s’obéit au doigt et à l’œil. Un ministre, ça la ferme ou ça démissionne, comme disait Chevènement, chaque fois qu’il optait pour la démission au lieu d’exécuter ou d’acquiescer une décision du chef de l’Etat contraire à ses convictions». A la dixième rue Limete résidentiel, les fameux combattants que d’aucuns qualifient des talibans pour leur vestimentaire tout blanc, ont repris à s’amasser et à proclamer des fatwa, comme du temps où l’UDPS était dans l’opposition. Les combattants ou talibans, c’est selon, jurent qu’ils s’opposeront opiniâtrement à ceux qui redoutent le succès de Fatshi et tentent vainement de le présenter comme un factotum ou lui coller l’image d’un roi fainéant. La tension reste perceptible le long du boulevard Lumumba, entre la 7ème et la 12ème rue. Non loin de là, à la sixième rue Limete industriel, un important dispositif policier monte la garde en permanence au siège secondaire du PPRD. Début octobre, à la suite du crash de l’Antonov AN72 affecté par la présidence de la République, ce siège du PPRD a été visité par des présumés partisans de l’UDPS qui ont tout renversé sens dessus dessous au motif que l’ex-chef de l’Etat serait derrière cet accident. Depuis la dernière sortie médiatique du secrétaire général permanent du PPRD Ramazani Shadary, si ce n’est pas encore le divorce, c’est la bouderie mutuelle envenimé par des propos agressifs, au sein du couple FCC-CACH : je te hais, moi aussi. L’un et l’autre camp s’entraccusent d’agendas cachés. Et le train-train de l’Etat en fait les frais : point de liquidités, des cabinets de différents ministères ne sont pas payés, même ceux des cabinets des membres des bureaux du Sénat et de l’Assemblée nationale. Certains analystes vaticinent un bras de fer entre le vice-premier ministre en charge du Budget, le CACH/UNC Jean Baudouin Mayo et son collègue des Finances, le FCC Sele Yaghuli. Comme du temps où Matata était aux Finances et Lokola Elamba au Budget. Lors d’une réunion de conseil des ministres, le premier ministre, Sylvestre Ilunga Ilunkamba, avait solennellement appelé son gouvernement à l’esprit d’équipe et de convivialité. Plus d’une fois la Monusco a appelé les alliés FCC-CACH à sauvegarder le fragile équilibre sociopolitique en RDC.
POLD LEVI