Y a-t-il eu un usage excessif de la force par les éléments de police nationale lors d’une manifestation jeudi 10 octobre à Isiro, chef-lieu de la province du Haut-Uélé ?
Dans un communiqué signé le vendredi 11 octobre, le ministre des Droits Humains du Gouvernement Ilunga Ilunkamba a exprimé sa préoccupation face aux présomptions de comportements illégaux de certains agents des forces de l’ordre d’Isiro qui auraient infligé des traitements inhumains et dégradants à des membres de l’ancien gouvernement provincial Lola Kisanga alors que ces derniers marchaient pour réclamer leurs arriérés de salaire et indemnités de sortie. «Le ministère des Droits Humains condamne fermement l’usage excessif de la force par les forces de l’ordre à Isiro en marge de la manifestation de ce jeudi 10 octobre 2019 », peut-on lire dans ce communiqué du ministre CCU & Alliés Me André Lite Asebea, qui martèle que «la liberté de manifester est garantie par la constitution de la République et doit être par conséquent de stricte observance».
En réaction à cette sortie du ministre national en charge des Droits Humains, le Conseil des ministres et le Comité provincial de sécurité du Haut-Uélé présidés par le gouverneur Christophe Baseane Nangaa a accusé le numéro 1 des Droits humains de faire de la récupération politicienne. «Les membres du Conseil des ministres et du Comité provincial de sécurité élargi ont condamné avec la dernière énergie les manifestations illégales commanditées par des officines politiques bien connues…», ont déclaré ces deux organes qui reprochent, mezo vocce au ministre de vouloir remuer les séquelles des querelles électoralistes passées.
Une source rappelle à ce sujet que, natif de Wamba comme le gouverneur Nangaa, mais également membre du FCC comme lui, André Lite n’a jamais caché que sa préférence lors de l’élection début 2019 des gouverneur et vice-gouverneur du Haut-Uélé allait plutôt vers le candidat Jean-Pierre Lola Kisanga, adoubé par le FCC, lequel avait été battu par son challenger Baseane Nangaa.
Samedi 12 octobre, le porte-parole du gouvernement provincial du Haut-Uélé a remis une couche en fustigeant l’intervention du ministre accusé d’avoir proféré des allégations ‘’gratuites’’ ne reposant sur aucune source fiable contre les autorités provinciales. «Eu égard à ce qui précède, le Gouvernement provincial considère qu’une telle position s’apparente tout simplement à une récupération politicienne qui ne dit pas son nom », écrit Ngelia Abusa qui regrette que André Lite n’ait pas attendu les conclusions des investigations telles que suggérées par lui-même et ne s’est pas donné la peine de s’informer auprès des autorités compétentes avant d’insinuer qu’on se trouvait en face d’un règlement de «comptes » aux dépens de l’ADRP Christophe Nangaa.
Une vive polémique s’en est suivie, certains observateurs accusant le jeune ministre CCU & Alliés de n’avoir pas digéré les litiges post-électoraux l’ayant opposé à l’actuel gouverneur du Haut-Uélé tandis que d’autres estimaient que si il y a eu des brutalités policières à l’encontre de citoyens revendiquant leurs droits, rien ne justifie que l’on accuse Lite de s’être écarté de son devoir en réagissant, comme ministre national des Droits humains et non comme cadre de la CCU & Alliés. « Pourquoi accuser le ministre Lite d’avoir réagi maladroitement avec précipitation si on ne remet pas en cause l’accusation selon laquelle des membres de l’ancien gouvernement provincial du Haut-Uélé ont été l’objet de violentes brimades au lieu d’être encadrés dans leur manifestation de revendication ? Lui serait-il interdit de s’opposer aux violations des Droits de l’Homme qui surviendraient dans sa province d’origine?», s’interroge un activiste de la société civile d’Isiro qui ajoute que «les acteurs politiques congolais ont la mauvaise habitude, même lorsque quelqu’un est dans son droit de se chercher mille et un prétextes pour discréditer et diaboliser toute revendication afin d’éluder la vérité ».
Un député national du Haut-Uélé contacté par Le Maximum estime que l’enquête diligentée par l’actuel gouvernement provincial, duquel ces Forces de l’ordre aurait reçu l’ordre de sévir contre cette manifestation pacifique « ne sera pas crédible car non impartiale. Elle n’a aucune chance d’aboutir à des conclusions objectives car en l’espèce, le N°1 du Haut-Uélé est à la fois juge et partie ».
LE MAXIMUM