Avec le verdict des urnes au terme des élections des gouverneurs et vice-gouverneurs de province au Nord-Kivu et au Maï-Ndombe, tombé jeudi 30 mai 2019 dans la journée, toutes les provinces de la RD Congo se sont dotées de nouvelles autorités gouvernementales, soit 25 sur 26. Reste donc la province du Sankuru où un arrêt querellé du conseil d’Etat en matière de candidatures aux élections provinciales, manifestement motivé par de fortes inerties politiques, retarde les échéances. Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts à ce sujet. A l’exemple de ce rapport ‘‘ultra-secret’’ du gouverneur a.i., Pierre Lokadi, à sa hiérarchie du PPRD, qui révèle toute l’étendue des combines, des passions et de la déraison qui entourent l’élection du nouveau gouverneur de province et son adjoint dans cette province parmi les plus enclavées et les moins développées du pays.
Pierre Lokadi Otete, médecin de son état et ancien secrétaire général à la santé, qui assume l’intérim du gouverneur du Sankuru depuis l’élection au Sénat du gouverneur titulaire, Berthold Ulungu, est entré dans la danse pour tisser sa petite toile, lui aussi, afin de demeurer en place dans un ‘‘intérim définitif’’ inédit. Envers et contre toutes les évidences légales sur la question.
Rapport subjectif
Dans ce courrier daté du 3 mai 2019, le gouverneur a.i. du Sankuru révèle comment il s’y prend pour planter ses pénates : il confectionne des rapports alarmants à l’intention de sa hiérarchie administrative (ministère de l’Intérieur) sur la situation sécuritaire, indiquant que la population de Lusambo «ne veut ni de la candidature de Lambert Mende, ni de celle du candidat indépendant invalidé par la CENI, Joseph-Stéphane Mukumadi», comme si la candidature à une fonction élective devait faire l’objet d’approbation d’une ’’population’’ qu’il traite par ailleurs de «dupe et naïve». Pour cet opportuniste toujours, «cette population (…) est totalement convaincue par mes initiatives qui ne visent qu’à mon maintien… ».
Dans le dossier sankurois donc, les nombreux rapports faisant état d’insécurité derrière lesquels les uns et les autres s’abritent pour renvoyer les scrutins aux calendes grecques sont donc sujettes à caution, parce que rédigés par des responsables provinciaux et nationaux eux-mêmes intéressés par les fonctions de gouverneur de province.
Rapporteurs intéressés
Parmi ces auteurs de rapports alarmants et accusateurs sur la situation sécuritaire au Sankuru, le vice-ministre et ministre a.i. de l’Intérieur, qui a révélé à l’opinion son incapacité à s’abstenir d’interférer dans ce qui se passe dans son Sankuru natal dans la désormais et tristement célèbre affaire du diamant de Lodja. Malgré l’expertise du CEEC, qui a formellement déclaré que cette pierre de 87 carats trouvée dans la région était un quartz et non un diamant, rien n’y fait. Du moment que les creuseurs avaient opté pour être assistés pendant leur séjour kinois par leur député national Lambert Mende, seul candidat éligible au poste de gouverneur du Sankuru, le vice-ministre Olongo n’y est pas allé par le dos de la cuillère.
Après avoir accusé le meilleur élu du Sankuru d’avoir «été impliqué dans une affaire de vol de diamant» sur Rfi, il a continué à s’acharner sur divers autres médias contre le leader de la CCU/ FCC : « Le vrai diamant se trouve entre les mains de Lambert Mende, la justice va le récupérer », martelait-il encore à la presse le 25 mai dernier, écumant d’une rage à peine contenue, ce qui a poussé Mende à déposer plainte pour imputations dommageables.
Qu’attendre d’un rapport rédigé par un tel responsable au sommet de l’Etat ? Beaucoup se posent la question désormais.
J.N.