Le 19 mai dernier, les kinois et les internautes du monde entier ont vécu presque en direct l’arrestation manu militari du député le mieux élu du Sankuru, le très kabiliste Lambert Mende Omalanga, ancien ministre de la Communication et Médias et Porte-parole des gouvernements Gizenga, Muzito, Matata, Badibanga et Tshibala. Mende était déjà relaxé lorsque la nouvelle de la rocambolesque affaire a été confirmée par ses proches et par toute la presse qui en a fait ses choux gras.
Alors qu’il s’apprêtait à passer à table avec sa famille et deux autres convives, Lambert Mende est alerté par un indescriptible esclandre au niveau des policiers commis à sa garde. À partir de la baie vitrée de son salon, il aperçoit une meute de policiers et militaires armés jusqu’aux dents en train de s’affronter à ses gardes. Incrédule il s’avance vers les assaillants pour s’enquérir de la situation. À peine l’a-t-il aperçu que le commandant de l’opération ordonne à ses hommes de ‘‘cueillir’’ l’élu de Lodja qui s’entend dire qu’il est en état d’arrestation ‘‘sur ordre de la hiérarchie’’.
Mende exige un mandat et résiste en demandant où le commando voulait l’emmener. «Chez le président de la République», lui répond sarcastiquement un officier subalterne. La suite, ce sont des coups de crosses et autres brutalités sur le député national et ses proches qui tentent de s’interposer ; des violences filmées par des voisins accourus qui partagent aussitôt ces images d’une cruauté innommable. «M. Mende s’en est sorti sain et sauf grâce notamment à ses réflexes en auto-défense», témoigne un voisin interloqué. Ce ne sera pas le cas pour l’un de ses gardes toujours en soins intensifs et son secrétaire particulier, Frank Diefu, dont le bras droit a été fracturé par la soldatesque de Basile Olongo.
Opinion choquée
Personnage politique clivant en raison de son engagement politique aux côtés du président de la République honoraire Joseph Kabila, Lambert Mende ne compte pas que des amis au Congo et en Occident où certains lui reprochent son acharnement à défendre bec et ongles la RDC face aux griffes de la haute finance internationale. C’est donc avec délectation que les forces politiques acquises à l’impérialisme ont accueilli la nouvelle de cette humiliation gratuite de ce militant anti impérialiste devant l’Eternel. À l’instar de l’avocat de Moïse Katumbi Jean-Claude Muyambo, une certaine opinion a trouvé matière à railler l’attaquant de pointe de ce qu’ils appellent la «kabilie» regrettant cyniquement au passage que son supplice «n’ait pas duré plus longtemps».
Mais pour la plupart des Congolais, toutes tendances confondues, le sort réservé à Lambert Mende par son «frère» du Sankuru, du reste ouvrier de la onzième heure de la famille politique de Joseph Kabila, a sonné comme un appel à une solidarité générale. C’est le cas notamment de Sindika Dokolo, président de ‘‘Congolais debout’’ qui a condamné sans ambages cet acte de sauvagerie aux côtés des multiples autres ressortissants du pays de Lumumba.
Le timing choisi par Olongo pour tenter de désacraliser Lambert Mende n’est pas innocent. Selon des sources, les commanditaires tentaient ainsi de poser un geste symbolique d’émasculation du FCC de Joseph Kabila afin de rendre davantage glorieux le retour triomphal de l’opposant Moïse Katumbi comme en territoire conquis. Des sociétaires du FCC se prêtent ainsi à des stratégies suicidaires dans leur haine viscérale contre le candidat gouverneur du FCC au Sankuru.
Une affaire sankuroise
D’aucuns se demandent encore quelle mouche a pu piquer Basile Olongo pour qu’il sorte ainsi du bois. Le retour de la manivelle et le rapport de forces consécutifs à ce scandale tant à Kinshasa qu’au Sankuru ne tournent manifestement pas en faveur de ‘‘Ndeko Basile’’ qui a tout de même été jugé capable de faire partie du ghotta gouvernemental mais dont le comportement en l’espèce frise la démence.
La vérité est que Lambert Mende Omalanga, dont l’assise politique au Sankuru est estimée à près de 95 %, avait été préféré à d’autres candidats gouverneurs par le FCC. Plusieurs raisons objectives justifient ce choix de la plate-forme de Joseph Kabila, notamment le fait que Mende est le meilleur élu national dans cette province et qu’il y dispose du maillage territorial le plus épais grâce à l’implantation de son parti politique, la Convention des Congolais Unis (CCU), et aux alliances qu’il a su y tisser.
Force est de constater que dans le processus de désignation du candidat gouverneur du Sankuru, certains caciques n’ayant pas eu d’arguments à faire valoir ont préféré se cacher derrière la candidature d’un ‘‘indépendant’’ (que l’on dit membre d’une autre plateforme politique) pour torpiller le choix de l’autorité morale du FCC. Certains sociétaires de la plate-forme kabiliste ont multiplié en toute déloyauté des obstacles pour empêcher la tenue de l’élection du gouverneur dans leurs provinces en s’appuyant sur des faux fuyants.
Basile Olongo qui collabore avec ces traîtres a eu beau jeu d’évoquer d’obscures raisons d’insécurité pour leur donner le temps d’inverser le cours des choses en faisant renvoyer cette élection aux calendes grecques. Avec la perspective de la mise en place du nouveau gouvernement annoncée par le président Tshisekedi, Olongo voyait venir le jour où il allait perdre ce tremplin des stratégies anti-Mende. D’où la nécessité de jouer son va-tout de dimanche dernier.
Très peu avisé sur une arène politique dont il ne maîtrise manifestement pas les arcanes, Basile Olongo s’est donc lancé à corps perdu dans ce dernier baroud d’honneur à l’issue duquel il s’est littéralement fracassé. Ceux qui l’ont poussé à ce passage à l’acte fatal ne s’en tirent pas non plus à bon compte parce qu’il a par le fait même resserré les liens de solidarité des kabilistes autour de leur bête noire Lambert Mende Omalanga.
JBD