L’information a fait l’effet d’une bombe dimanche 19 mai 2019, et provoqué un véritable buzz sur les réseaux sociaux en même temps qu’elle se répandait comme une traînée de poudre. En milieu d’après-midi, Lambert Mende Omalanga venait d’être brutalement arrêté, apprenait-on. Ministre de la Communication et Médias et porte-parole du gouvernement sortant, l’homme est un député national élu de la circonscription de Lodja au Sankuru, et candidat gouverneur de cette province. Mais c’est encore peu dire de cet acteur politique nationaliste-lumumbiste dont la réputation et l’aura ont franchi les frontières nationales. Dans la plupart des capitales progressistes d’Afrique, ceux qui sont portés sur l’indépendance et la souveraineté effective de leurs Etats, Mende est perçu comme le meilleur, si non un des meilleurs défenseurs de la cause anti-impérialiste sur le continent. Cela n’a pas empêché une trentaine de policiers et militaires mandés par le général Awashango et le colonel Mopepe de s’introduire de force dans sa résidence. Ils y désarment ses gardes et l’arrêtent sans autre forme de procès. Molesté, selon ses propres termes, l’ancien porte-voix de Joseph Kabila a été embarqué sans ménagements dans un véhicule de la police vers le QG d’Awashango à la Gombe avant d’être relâché sans explications plausibles sur une intervention de François Beya, conseiller spécial en matière de sécurité de Félix Tshisekedi.
Un coup signé Basile Olongo
Le coup fourré empestait à mille lieux à la ronde, et Lambert Mende lui-même l’a aussitôt dénoncé en désignant le vice-ministre de l’Intérieur et Sécurité, Basile Olongo Pongo, faisant l’intérim du ministre, comme l’instigateur principal de ce chef-d’œuvre d’instrumentalisation des services de police à des fins de vengeance personnelle et de règlement de comptes. Une affaire qui remonte à plusieurs mois, depuis que l’élu SET (Soutien à Etienne Tshisekedi) en 2011 s’était mis en tête de se ménager un pied-à-terre au Sankuru après avoir perdu la confiance de ses électeurs kinois de 2011 en alignant une liste de son minuscule parti à Lodja dans son Sankuru natal, une circonscription tenue de main de maître par Lambert Mende. Basile Olongo fera choux blanc n’ayant pas réussi à faire capter par sa liste les suffrages de ses frères de tribu au Sankuru (dont il s’est soudain souvenu après 40 ans d’absence) qui ont préféré donner deux sièges sur cinq à la CCU de l’ancien ministre de la Communication et médias. L’homme fait preuve depuis la proclamation des résultats des législatives du 30 décembre 2018 d’une haine viscérale contre Lambert Mende dont il a combattu notamment avec acharnement la candidature à la tête de la province du Sankuru. On doit en effet à Olongo les motivations saugrenues d’insécurité avancées à l’appui du report constant de l’élection de gouverneur de province dans cette contrée enclavée du centre du pays.
Le buzz parfait
Jusque lundi 20 mai 2019 dans la journée, la désormais tristement célèbre ‘‘affaire Mende’’ défrayait encore la chronique, au point de concurrencer l’actualité politique pourtant très fournie en ce début de semaine par, notamment, la nomination d’un nouveau premier ministre et le retour au pays de Moïse Katumbi. Le scandale a été quasi unanimement dénoncé par quiconque, y compris dans les rangs de l’opposition politique, soucieuse de l’instauration d’un Etat de droit en RD Congo. Député national élu, Lambert Mende est couvert par l’immunité parlementaire et ne pouvait, en aucun cas, être interpellé sans l’aval de l’Assemblée Nationale dont il relève. Basile Olongo et ses sbires assurément formés sur le tas ont franchi le rubicon et mal leur en a pris. Selon les informations parvenues au Maximum au milieu de la journée, lundi 20 mai 2019, le général Awashango, réputé pour sa brutalité, a été suspendu pour raisons d’enquêtes. Son adjoint, le colonel Mopepe, étant mis aux arrêts, ainsi que toute l’escouade de policiers et militaires PM qui ont pris part à la sale besogne.
Officiers sanctionnés
Quant à Basile Olongo, l’ancien animateur d’émissions télévisées converti en acteur politique aura passé une journée dont il se souviendra longtemps. Convoqué au parlement par Jeanine Mabunda, il a été soumis à un interrogatoire serré par le bureau de la chambre basse du parlement lundi dans la journée. Au sortir de l’entrevue qui avait duré plusieurs minutes, Olongo, visiblement mal à l’aise, déclarait piteusement devant la presse que les services de police, ce bras séculier du ministère dont il assurait l’intérim, avaient mal procédé vis-à-vis d’un député couvert par l’immunité parlementaire.
Il n’en était pas pour autant au bout de ses peines car, une motion de défiance contre lui initiée par une élue FCC révoltée par tant d’incurie avait déjà récolté près de 70 signatures, soit 20 de plus que le nombre requis pour mettre en branle le processus pouvant aboutir à le dégager par la petite porte. Ne restait à régler que le problème administratif que pose l’interpellation d’un ministre dont le gouvernement est démissionnaire depuis lundi.
Quoi qu’il en soit, Basile Olongo n’échappera pas à la justice rd congolaise déjà saisie pour abus du pouvoir et incitation des policiers et militaires à commettre des actes contraires à la discipline et au devoir, renseigne-t-on.
J.N.