Le ministre des finances du gouvernement provincial sortant de Kinshasa suspendu est mis à la disposition de la justice, avant le terme de la procédure parlementaire.
L’ancien argentier de la Ville-province de Kinshasa, Guy Matondo Kingolo, est attendu ce vendredi 10 mai à l’Assemblée provinciale de Kinshasa où il doit présenter ses moyens de défense au sujet des accusations de détournement qui pèsent sur lui, rapportent des médias. Selon le président FCC de la nouvelle assemblée provinciale de la capitale, et certains députés, le ministre de Kimbuta serait déjà mis à la disposition de la justice. Guy Matondo faisait l’objet d’une motion du député Tenge Te Litho, un ancien bourgmestre de la commune de Kintambo, pour détournement de deniers publics pour n’avoir pas justifié l’utilisation de 18 millions USD empruntés auprès des banques commerciales par l’Hôtel de Ville, selon son interpellateur.
Lundi 6 mai 2019, la plénière de l’Assemblée provinciale a mis en accusation le ministre provincial des finances sortant, ses explications n’ayant pas emporté la conviction des députés. Cette conclusion a été présentée comme un exploit de titan. Par le député UDPS/T Peter Kazadi notamment, qui a expliqué à la presse que « quatre questions ont été posées au ministre des finances de Kinshasa, il n’a pas su répondre correctement. Au lieu de justifier les dépenses faites par rapport aux sommes acquises auprès des banques commerciales de Kinshasa, il s’est mis à justifier les dépenses antérieures prenant ainsi les députés pour des vaut-rien … Il a trompé l’assemblée provinciale et cette dernière a décidé de le mettre en accusation pour qu’il justifie correctement devant la justice de notre pays ce qu’il a fait». Quant à la limite de l’action, «ce n’est que la loi qui peut nous limiter. L’assemblée provinciale a mis en place une commission chargée de faire l’état des lieux de la ville et nous allons en disséquer tous les aspects. Partout où nous trouverons les incohérences qui vont à l’encontre de la loi, l’assemblée provinciale actionnera des mécanismes de répression s’il le faut», s’est fièrement vanté cet élu de la commune de Lemba, lundi dernier. Néanmoins, il ne semble pas que la suite des événements annoncée se déroule comme ainsi décrit.
Certains observateurs notent une sorte d’amalgame mêlée d’effusion dans le chef de quelques nouveaux parlementaires de la capitale. La motion de défiance sollicitée par l’interpellateur de Matondo s’est avérée impossible à appliquer, compte tenu du statut de l’interpellé dont le gouvernement venait d’être déclaré démissionnaire au terme de la cérémonie officielle de remise et reprise intervenue mardi dernier entre les gouverneurs sortant et entrant de la ville-province de Kinshasa. « Une motion de défiance ne sera plus à l’ordre du jour, je décide de mettre en place une mise en accusation », a déclaré Godé Mpoyi, président de l’APKIN.
De l’amalgame aussi que cette suspension d’un ministre d’un gouvernement démissionnaire, décidée par le nouveau locataire de l’Hôtel de Ville (sur recommandation de l’Assemblée provinciale) mercredi 8 mai 2019. Au terme de la première réunion du gouvernement provincial, Gentiny Ngobila a en effet remplacé Guy Matondo par un autre membre du même gouvernement, Robert Luzolano.
Cependant, les griefs portés à charge de Guy Matondo demeuraient passablement vagues. Si Tenge Te Litho déplorait sans mettre de gants la gabegie financière caractéristique du gouvernement provincial sortant devant les médias, il restait à traduire ces accusations en infractions. Le speaker Godé Mpoyi s’y est essayé mercredi dernier: «Il y a eu d’abord abus de pouvoir. Le ministre n’a pas qualité de contracter une dette sans l’autorisation préalable de l’Assemblée provinciale. Le deuxième grief…C’est par rapport à l’argent pris à la banque au mois d’octobre, il a parlé des choses qui ne se sont jamais réalisées dans cette ville. Les informations en notre possession, attestent bel et bien qu’il y a eu détournement. Il sera poursuivi pour ces deux griefs parce que votre plénière nous a donné le pouvoir sur base de la résolution d’hier », a-t-il martelé.
Ce qui reste encore à prouver. Parce qu’en fait d’abus de pouvoir, des sources à l’Hôtel de Ville, confirmées par des médias kinois, renseignent que l’Assemblée provinciale avait bel et bien autorisé le gouvernement Kimbuta à contracter des emprunts bancaires de l’ordre de 60 millions USD, beaucoup plus que les 18 millions USD « détournés », pour faire face au budget d’investissement de la Ville province chiffrée à 100 millions USD/l’an. Le grief relatif à l’abus de pouvoir pourrait donc s’avérer nul. Reste le détournement des 18 millions USD retirés au mois d’octobre 2018. Et si l’argentier de « Haut Sommet », surnom accolé à l’ex-gouverneur Kimbuta, les a effectivement détournés. C’est ce que la dernière audition de l’interpellé, ce vendredi 10 mai par la plénière de l’Assemblée provinciale permettra de clarifier. Avant que la justice ne statue contradictoirement sur le dossier. D’ici-là, beaucoup d’eau aura coulé sous les ponts. Les élus kinois semblent être allés un peu vite en besogne.
POLD LEVI MAWEJA
PAS DE QUARTIER POUR KIMBUTA A L’ASSEMBLEE PROVINCIALE : Guy Matondo sur le gril
