La rencontre était attendue depuis des semaines. Des élus et ‘‘notables’’ du Sankuru ont été reçus en audience mardi 7 mai 2019 à la Cité de l’Union Africaine à Kinshasa. A l’ordre du jour, l’élection du gouverneur de la province, suspendue en avril dernier à l’initiative du ministre a.i. de l’Intérieur invoquant un ordre du chef de l’Etat «pour des raisons de sécurité».
Ressortissant lui-même de cette province et partie prenante à la compétition politique par sa formation politique sortie bredouille des dernières élections, Basile Olongo est depuis lors au four et au moulin pour régler ses comptes selon nombre d’observateurs qui attribuent au transfuge du SET (Soutien à Etienne Tshisekedi) et actuel sociétaire du CODE-FCC, la chienlit sankuroise.
Des sources à la présidence de la République rapportent que les hôtes de Félix Tshisekedi, triés par Olongo, ont tous indiqué que le Sankuru attendait impatiemment la tenue de l’élection du gouverneur de province et de son ad- joint. Et que « la délégation s’est déclarée très confiante quant à la tenue très pro- chaine des élections au San- kuru grâce à la sagesse du chef de l’Etat qui privilégie le respect de la constitution ».
L’audience de mardi dernier à la Cité de l’UA a, néanmoins, révélé une face hideuse de cette saga de l’élection gouvernorale du Sankuru. Pour régler ce problème crucial créé par le vice-ministre sortant de l’Intérieur, juché sur son intérim, Félix Tshisekedi s’est retrouvé en face de députés provinciaux et des notables convoqués par l’inénarrable ministre sortant du gouvernement Tshibala en charge de la sécurité selon des critères propres à lui. En témoigne, l’absence notable du premier intéressé, le député national de Lodja, candidat unique à l’élection disputée, le FCC/CCU Lambert Mende Omalanga, pourtant considéré comme le nœud de ce problème politique.
Le protagoniste principal zappé
Selon les sources du Maximum, le ministre de la Communication et Médias et porte-parole du gouvernement sortant aurait été soigneusement évité, par Basile Olongo, le membre du gouvernement chargé par le chef de l’Etat de la matérialisation de la rencontre de la Cité de l’UA. Tout le monde aurait été ainsi prévenu et convié à la réception du chef de l’Etat la veille de celle-ci sauf le député le mieux élu de la province et de surcroît, candidat à l’élection gouvernorale et la plupart des élus et notables qui lui sont peu ou prou favorables. « C’est une véritable forfaiture de la part de cet acteur politique originaire du Sankuru qui ne parvient pas à dissimuler sa détestation de Lambert Mende Omalanga qu’il accuse de tous les péchés d’Israël, et notamment de prétendus problèmes sécuritaires depuis la proclamation des résultats des législatives qui ont vu Mende rafler deux sièges des députés nationaux sur cinq dans la circonscription de Lodja dont ils sont tous deux originaires», explique-t-on au Maximum.
Le coup fourré de Basile Olongo semble être confirmé par Lambert Mende lui-même qui a déclaré sur Top Congo n’avoir pas été mis au courant de la rencontre par le ministre. Un communiqué de son regroupement politique l’Alliance CCU & Alliés, rendu public 24 heures après l’audience de la Cité de l’UA révélait par ailleurs que ceux des élus de cette plateforme qui ont pu rallier le mont-Ngaliema in extremis « n’avaient été mis au courant de cette rencontre qu’à une heure du début de la réunion», alors qu’ils étaient bel et bien joignables dans la ville. On aurait voulu que les partisans de l’autotité morale de l’Alliance CCu & Alliés ne participent pas à cette rencontre où ils se sont retrouvés en portion ultracongrue que l’organisateur ne s’y serait pas pris autrement. La plupart d’entre eux comme le député national Jean-Marc Lombaku, informé … cinq minutes avant l’audience préféra s’abstenir plutôt que d’arriver au lieu de l’audience en brûlant la règle protocolaire et de politesse élémentaire due à la première institution du pays qu’est le président de la République.
Quant à Lambert Mende lui-même, il pointe carrément un doigt accusateur sur le vice-premier ministre intérimaire de l’Intérieur et Sécurité. « Imaginez que la réunion avec le président était prévue à 13 h 30. Je ne serai averti qu’aux alentours de 13 h 25 par un collaborateur qui venait de recevoir l’appel d’une dame Carine, secrétaire de Monsieur Olongo me demandant de me trouver à la Cité de l’UA, alors que je me trouvais depuis la matinée à ma ferme de Menkao, à une soixantaine kilomètres de la ville», révèle Lambert Mende aux médias à Kinshasa. « J’ai pu néanmoins appeler les services de la présidence pour m’excuser et il me semble que mon message est arrivé à bon port car le chef de l’Etat a déclaré qu’il l’avait reçu et allait également me recevoir », se console néanmoins l’ancien porte-voix de Joseph Kabila.
Lapsus politicien révélateur
Cette espèce de lapsus politique sankurois dont Basile Olongo n’est que la face immergée de l’iceberg n’en révèle pas moins le nœud des problèmes politiques qui rongent la province d’origine de Patrice-Emery Lumumba : c’est la chicanerie, l’exclusion et le refus de la compétition politique loyale. « Alors que ses détracteurs lui reprochent d’être le candidat unique à l’élection du gouverneur du Sankuru (sans apporter la preuve qu’il ait empêché quiconque de postuler à ces fonctions), ils brillent eux-mêmes par des pratiques d’exclusion qui donnent la nausée », confie ainsi à nos rédactions un des notables reçus mardi dernier par le chef de l’Etat. Qui s’indigne de la ’’solution’’ paradoxale proposée par les adversaires du candidat unique Lambert Mende : «Ils proposent à ce dernier de se retirer de la course pour que la paix revienne mais ne se rendent même pas compte que cela reviendrait non seulement à permettre à son rival, une personne détenant la nationalité étrangère, de compétir, en violation de la constitution, mais aussi de devenir à son tour … candidat unique ! De qui se moque-t-on ?»
Depuis l’audience chez le chef de l’Etat, il est apparu aux yeux de tous que ce ne sont guère les populations du Sankuru qui ne veulent pas de la candidature de Lambert Mende (du reste tout à fait légale), mais un quarteron de personnalités politiques de la province tapies à Kinshasa. La candidature de Lambert Mende à la tête de la province du Sankuru ne fait pas problème parce qu’elle est unique et attentatoire à la démocratie, pas plus que ceux de Jea-nine Mabunda, Jean-Marc Kabund et autres à la tête du bureau de la chambre basse du parlement congolais il y a quelques jours. Ni en raison de prétendus et fallacieux problèmes sécuritaires qui, du reste, ne datent ni d’hier ni d’aujourd’hui dans cette partie de la République. La candidature de Mende à l’élection de gouverneur du Sankuru fait problème pour un groupe de caciques de la politique de la région qui tremblent à l’idée que le lumumbiste dont on connait l’activisme et le leadership apprécié des masses ne leur fasse définitivement ombrage.
J.N.
Une démarche politicienne