Moins d’un mois après le décès à Kinshasa de son leader historique, Antoine Gizenga Fundji, le Palu lui a désigné un successeur intérimaire en la personne de son fils, Lugi Gizenga. L’événement a eu lieu lundi 18 mars 2019 au terme d’une réunion du bureau politique composée de 13 hauts-cadres coachés par Lugi Gizenga lui-même, jusque-là secrétaire permanent et porte-parole du parti créé par son père en 1964. Il en tiendra désormais les rênes jusqu’à la convocation du congrès, pour se conformer aux textes qui régissent cette formation politique. Ont pris part aux délibérations du 18 mars dernier, outre Lugi Gizenga, Martin Kabwelulu, Lambert Matuku Memas, Sylvain Ngabu, Godefroid Mayobo, Georgine Madiko, Kia Nzumba, Michel Lokola, Claude Matala, FabienBoko, Jacques Kamenga, Aurélie Batu¬mike, Didier Mamenga et Serge Lukoki le secrétaire particulier du patriarche défunt.
Dans ce parti politique déjà miné par la division, ainsi que l’opinion s’en est rendu compte avec la présentation de deux candidatures à la dernière élection présidentielle, celle d’Antoine Gizenga lui-même mais aussi celle d’Adolphe Muzito, premier ministre pour le compte du parti jusqu’à sa démission en mars 2012, la suite des événements après la disparition du demi-dieu bandundois ne paraît pas rassurante. De mauvaises langues rapportent que les décideurs du lundi 18 mars 2019 ne constitueraient qu’une ‘‘caste’’ qui avait pris Gizenga en otage depuis quelques années. Et serait déconnectée de la base du parti, largement acquise au renégat plein aux as, Adolphe Muzito.
Ces problèmes internes ont, ainsi qu’on pouvait s’y attendre, sérieusement impacté les résultats du PALU aux dernières élections. Sur¬tout sur les terres kwiloises qui l’avaient vu naître il y a plusieurs décennies, et qui ont constitué son principal vivier électoral jusqu’il y a quelques années encore. Au terme des premiers scrutins électoraux véritablement démocratiques, le parti gizengiste, allié à Joseph Kabila, s’en était tiré tant bien que mal, mais plutôt bien. Avec 34 députés nationaux élus dans l’hinterland bandundois, à quelques rares exceptions près. 5 ans plus tard, en 2011, on peut affirmer que le PALU, qui avait entretemps pris une part plus qu’active au pouvoir exécutif au cours de la législature précédente, a été sanctionné par sa base électorale. Il s’en est tiré avec 19 députés nationaux élus. Soit, 15 de moins qu’en 2006.
En 2018, le parti Gizengiste qui a enregistré l’une de ses plus grandes crises avec la défection de Muzito, était censé perdre des plumes dans cette lutte fratricide et parricide. Mais ce n’est pas tout à fait le cas parce qu’il affiche pratique¬ment le même résultat que précédemment.
Les scrutins combinés du 30 décembre 2018 auront en effet permis au Parti Lumumbiste Unifié de faire élire 18 députés nationaux et 20 provinciaux. Un score d’autant plus appréciable que le parti ne semble pas avoir trop souffert cette fois-ci de sa participation au pouvoir. Seulement, l’évolution ainsi observée s’accompagne d’un déplacement du vivier originel du parti gizengiste. L’ex-province du Bandundu, le Kwilu particulièrement, ne représente plus le vivier le plus important de ce parti nationaliste qui marque un net déplacement vers l’Est du territoire national. Au terme des dernières législatives, l’ancienne province d’origine du patriarche ne fournit au parti que 4 de ses élus nationaux : Sakata Moke T. Carry (Bagata), Mumbali Mamupot Mass (Bulungu), Makiashi Wil¬ly (Gungu) et Muzaza Owan Ngampo Thierry (Idiofa).
Les 14 autres proviennent des provinces de l’Est, notamment de l’ex-Katanga qui a envoyé à l’hémicycle Mwepu Kibanda Yvonne (Haut-Katanga/Kasanga), Ahert Joseph Kayumba (Haut- Katanga/Mituaba), Kabwika Mastaki Prospère (Lualaba/ Lubudi), Kabwelulu Kabilo Mar¬tin (Tanganyika/Manono) ; et du Nord Kivu, avec Mutiri wa Bashara Elvis (Goma), Kavira Mabero Jeannette (Lubero), et Safari Nganiza Jacques (Masisi).
Kinshasa la capitale n’a plébiscité cette fois-ci que deux élus gizengistes : Muyaya Katembwe Patrick (Funa) et Mbalata Mputu Freddy (Tshangu). Autant que la province du Kasaï (Mbaya Kan¬dudi/Tshikapa et Lubwebe Mayara Faustin/Ilebo). La province de l’Equateur vient à la rescousse des nationalistes avec l’élection de Henri Thomas Lokondo à Mbandaka bien que l’on sache que l’ancien mobutiste, indiscipliné notoire, avait jeté son dévolu sur le ticket Lamuka de Martin Fayulu à la dernière présidentielle. Et ne peut donc être compté parmi les produits les plus sûrs du parti, comme certains autres avec lui. Mais c’est ça aussi, le nouveau PALU & Alliés. Pour atteindre le score flatteur des dernières législatives, le parti de Gizenga a été contraint de se swahiliser et nouer des alliances parfois contre-nature qui lui ont permis une plus grande extension. Pour l’instant, sa survie passe par là.
JACQUES NSTHULA