La justice rd congolaise poursuit la firme minière KCC, filiale de Glencore, pour non-paiement des droits proportionnels sur l’augmentation du capital social de la société évalués à 89.200.442.335, 32 FC soit plus de 55 millions USD. L’affaire remonte au premier semestre 2018. Depuis, elle semble classée. Rien d’étonnant dans le secteur minier de la RD Congo.
D’autres actes générateurs des recettes se posent en clair-obscur malgré l’entrée en vigueur de la loi n°18/001 du 9 mars 2018 modifiant et complétant la loi n°007/2002 du 11 juillet 2002 portant code minier. Il s’agit notamment des pas-de-porte. De nouvelles entreprises minières ont annoncé leur entrée en production courant 2019. Mais, officiellement, seule Shiming mining a payé ‘un pas de porte de l’ordre de 16.614.328.100 FC, soit plus de 10,2 millions USD.
Aucune trace des pas-de-porte d’autres firmes qui se prétendent pourtant clean et se disent maniaques de gestion saine dans les affaires. Il s’agit notamment de la canadienne Aphamin qui doit exploiter l’étain dans la région de Bisié, territoire de Walikale, dans la province du Nord-Kivu. Ou encore de la joint-venture Lithium-Manono, créée par la firme australienne AVZ Minerals et le plus grand fabricant mondial d’électrolyte de batteries, le Chinois Guangzhou Tinci materials technology.
Pourtant, le code révisé stipule que les entreprises minières de l’Etat, Gécamines, Miba, Kisenge-Manganèse, Sokimo, etc., auront droit dès 2019 à 100 % de pas de porte sur tout gisement étudié, documenté et travaillé par elles.
La loi n°18/001 du 9 mars 2018 modifiant et complétant la loi n°007/2002 du 11 juillet 2002 portant code minier précise en son article 33 que « l’accès à l’exploitation d’un gisement étudié, documenté ou travaillé appartenant à l’Etat, obtenu par appel d’offres, est conditionné par le versement d’un pas-de-porte à ce dernier, représentant 1 % de la valeur en place dudit gisement. La valeur en place du gisement est définie comme étant le prix obtenu pour ledit gisement dans le cadre de l’appel d’offres. Lorsque le gisement a été étudié, documenté ou travaillé par une société commerciale appartenant à l’Etat, le pas-de-porte est réparti entre l’Etat et ladite société commerciale suivant les modalités déterminées par voie réglementaire ».
Pour autant, aucun chiffre n’a été avancé au ministère des Mines. Un pas de porte représente, en pratique, des revenus que les entreprises minières du portefeuille de l’Etat perçoivent de leurs joint-ventures minières au titre de droit d’entrer en affaires avec elles. Il sied de noter que le concept pas de porte n’a pas été repris dans le chapitre I portant sur les définitions des termes dans le Code de juillet 2002. Dans le Code révisé, le pas de porte est défini comme « une taxe non remboursable perçue par l’Etat, en cas d’appel d’offres, au titre de rémunération des efforts initialement consentis ou fournis par l’Etat ou une entreprise minière de son portefeuille pour découvrir un gisement considéré dès lors comme étudié, documenté et travaillé ou un gisement repris par l’Etat après extinction d’un droit minier d’exploitation, conformément aux dispositions du présent code».
Il y a près de 10 ans, lors d’une audition à l’Assemblée provinciale de l’ex-Katanga, l’alors Administrateur délégué général adjoint de la GECAMINES, M. Mukasa, s’est montré imaginatif à souhait en présentant le pas de porte est comme une sorte de pré dot dont au profit des parents de la mariée dans les us et coutumes du continent. Même si la pratique dans le secteur minier a longtemps fait l’objet d’une gestion opaque.
En 2009, à la suite de la revisitation des contrats miniers, la RD Congo avait récupéré quelque 315 millions USD en termes de pas de porte, selon le ministre des Mines, Martin Kabwelulu Labilo. Hélas, cet argent n’a jamais pris la direction du Trésor public, selon des rapports de différentes mouvances de la société rd congolaise.
En 2015, le gouvernement tablait sur des revenus de près de 20 milliards de FC (19.821.900.000 FC) de pas de porte sur revisitation des contrats miniers, mais aucun centime ne sera malheureusement versé au Trésor.
En 2016, le budget de l’Etat inscrit 14.262.358.553 FC, mais de nouveau, l’Etat ne percevra rien. L’on se rappellera notamment ces révélations de l’ONG britannique Global Witness, début 2017, selon lesquelles des pas de porte devant bénéficier à la Gécamines avaient pris la route des méandres avant de se retrouver dans des poches d’individus que l’ONG disait être proches du régime de Kinshasa, quelque 75 millions USD en tout. L’homme d’affaires israélien Dan Gertler fut singulièrement mis à l’index dans ce rapport. Global Witness atteste également que la firme suisse Glencore dont KCC , Kamoto Copper Compagny, est une des filiales, a déclaré avoir opéré des versements de pas de porte pour les exercices 2013, 2014, 2015 et 2016 à la firme Africa Horizons Investment Limited «conformément à l’instruction de paiement de Gécamines” et “des accords tripartites de royalties entre, Gécamines et AHIL“.
En 2018, alors que le budget de l’Etat colle le chiffre zéro dans la case des prévisions des recettes de pas de porte minier, la commission budgétaire du ministère des Mines fait part du « montant de 17.553.9000.000 FC (…) au titre de la quotité des pas de portes ». Dans le rapport de l’exécution de la Loi des finances 2017, la Direction générale des recettes administratives, judiciaires, domaniales et de participations, DGRAD, note que « la contre performance dans la réalisation des recettes non fiscales s’explique notamment par les difficultés d’encadrement des pas de porte et royalties, faute d’un acte réglementaire fixant la procédure de déclaration et les modalités de répartition».
POLD LEVI Maweja.