Passé les premiers instants de surprise, Genève, la ville Suisse qui a abrité du 9 au 11 novembre 2018, fut une vaste conspiration contre la constitution de la RD Congo. C’est ce que révèle, au-delà de l’autre véritable « coup d’Etat » qui a substitué à deux poids lourds un poids mouche de l’opposition politique, les documents qui scellent les engagements pris sous la férule de la Fondation Koffi Annan et son directeur, le Britannique Alan Doss.
A Kinshasa, l’opinion se réveille, petit à petit, comme d’une paralysante torpeur. Non seulement Genève a accouché d’une souris naine, en terme de candidat commun de l’opposition capable de tenir tête au rouleau compresseur du candidat du Front Commun pour le Congo (FCC), mais pire, les objectifs poursuivis par l’opposition jusque-là ont été vidés de toute substance. Sans le moindre état d’âme apparemment.
L’Accord politique signé le 11 novembre dernier par le groupe de sept leaders de l’opposition est révélateur de ce complot habillé d’une terminologie lénifiante. Les conjurés des rives du Lac Léman ont convenu de provoquer « une alternance à la tête du pays et des institutions de la République… » afin d’établir ce qu’ils appellent un « Etat de droit démocratique ». Alternance à la tête du pays ? Mais c’est ce que visent précisément les élections prévues le plus régulièrement du monde au mois de décembre 2018, se dit-on dans l’opinion.
Une autre forme d’alternance
Genève visait donc en réalité une autre forme d’alternance, ainsi que l’atteste le projet funeste d’élargir ce changement à la tête des institutions du pays. « C’est très grave. Un groupe de sept politiciens réunis à l’étranger a pris la décision de bousculer tout, les institutions de la République y compris, c’est-à-dire de manipuler la constitution. C’est un coup d’Etat qui ne dit pas son nom », commentait, mardi 13 novembre à Kinshasa, un fonctionnaire du ministère de la Justice. L’homme venait de prendre connaissance du texte intégral de l’accord politique genevois. Un document qui astreint drastiquement le « candidat commun » de l’opposition au respect et à la fidèle application de ses clauses.
Le programme commun des conspirateurs de Genève est encore plus clair quant à leurs desseins politiques réels. Le projet politique principal du groupe des sept leaders politiques rassemblés à l’Hôtel Warwick vise à « restaurer et consolider la démocratie ainsi que l’ordre constitutionnel issus de l’Accord global et inclusif de Sun City en 2002 ». Derrière ces phrases ronflantes se dissimule maladroitement un projet de modification constitutionnelle qui ne dit ni son nom, ni de quelle manière il s’effectuera sans heurter les règles en vigueur en RD Congo. Parce qu’une modification de la constitution n’est possible que par un vote au parlement ou par un referendum, or il n’y aura pas de parlement si les élections ne se tiennent pas en décembre prochain. Et même si elles se tenaient et consacraient l’accession au pouvoir du candidat unique de l’opposition à la présidence de la République, il faudra encore faire avaliser une modification du calendrier électoral pour organiser un referendum constitutionnel.
L’ombre d’un ancien chef de guerre nostalgique
Mais il y a pire que ces perspectives démocratiques. Parce que derrière le projet de restauration de l’ordre constitutionnel issu des belligérances de triste mémoire des années ‘2000 on trouve bien l’ombre de l’ancien chef de guerre et ancien vice-président de la République Jean-Pierre Bemba Gombo du MLC, estiment nombre d’observateurs. « 10 ans de détention à la Cour pénale internationale pour faits de belligérance ne semblent pas l’avoir assagi. Apparemment, l’ancien chef de guerre tient à conserver et consommer jusqu’au bout l’intégralité du butin qui lui a échu en 2002 », commente un diplomate africain en poste à Kinshasa.
Pour parvenir, au plus tôt, à leurs fins, les conclavistes de Genève ont obligé leur « candidat commun » à accepter de réduire de sa propre initiative son mandat à la tête de la RD Congo à… deux ans, et non à cinq ans comme le stipule la constitution votée par referendum par l’ensemble des Congolais la même année 2002. Encore une violation constitutionnelle en vue, donc. « On se demande de quel droit quelques individus peuvent se permettre de prendre autant de liberté avec la loi fondamentale », peste un politologue de l’Université de Kinshasa.
Ça crève les yeux, de plus en plus : Genève fut le rendez-vous d’un conglomérat d’anarcho-fascistes. Rien de plus. Et, même s’ils s’en défendent depuis quelques jours, effarouchés par les réactions spontanées de ceux qui, dans les rues kinoises, exposent parfois leurs vies pour les soutenir, Vital Kamerhe et Félix Tshilombo Tshisekedi se rangent dans cette catégorie d’acteurs politiques peu recommandables. Par le simple fait qu’ils ont consenti à apposer leurs seings au bas l’accord félon de Genève. « L’un d’entre ces deux candidats président aurait été désigné candidat commun de l’opposition qu’il n’aurait rien eu à redire de ces projets funestes de coup d’Etat contre la constitution », peste encore ce politologue.
J.N.