En désignant, au terme d’âpres tractations qui ont permis de museler Vital Kamerhe et Félix Tshilombo, Martin Fayulu chef de file de la nouvelle opposition politique en RD Congo, dimanche 11 novembre 2018, les tireurs de ficelle des perturbations politiques ont été contraints d’apparaître au grand jour. Tout au moins partiellement. Bruxelles, la capitale de tous les complots contre la majorité au pouvoir en RD Congo, a été dédaignée au profit de Genève en Suisse. Parce que dans la capitale belge, de plus en plus de voix s’élèvent contre l’interventionnisme des libéraux au pouvoir dans la politique intérieure de l’ancienne colonie. C’est un cadre hôtelier huppé de la capitale helvétique qui a hébergé, du 9 au 11 novembre, les discussions pour désigner le candidat unique de l’opposition à la prochaine présidentielle. Ou, pour dire plus vrai, pour mettre un terme à la dynamique électorale en cours au pays de Patrice Emery Lumumba.
C’est le britannique Alan Doss et la Fondation Kofi Annan, un ancien de la MONUSCO qui se trouve soudain à la tête de cette nébuleuse ONG chargée en fait de la défense et de la promotion d’intérêts occidentaux sur le continent noir sous prétexte « des solutions pacifiques et équitables à des problèmes mondiaux critiques par le biais de la médiation, du mentorat politique, du plaidoyer et des conseils », qui ont été chargés de chaperonner fermement les acteurs politiques RD Congolais. Alan Doss n’est pas un inconnu dans l’évolution de la situation politique rd congolaise de ces dernières années. L’ancien patron de la mission onusienne est déjà connu pour avoir tenté de torpiller, à la dernière minute, la présidentielle et les législatives 2011. C’est l’homme qui avait retiré le soutien logistique onusien sous les pieds de la CENI du révérend pasteur Ngoy Mulunda Nyanga et de Jacques Djoli, après avoir instamment incité le premier cité à reporter les élections préparées depuis plusieurs mois. Représentant du Secrétaire Général des Nations-Unies, le successeur de l’Américain William Swing avait transformé les installations onusiennes à Kinshasa en couloirs pour les opposants au régime, se souvient ce diplomate africain installé à Kinshasa depuis près d’une décennie.
A l’hôtel Warwick, à quelques encablures de la gare de Genève, Félix Tshilombo Tshisekedi, Martin Fayulu, Vital Kamerhe, Freddy Matungulu, Jean-Pierre Bemba, Moïse Katumbi et Adolphe Muzito ont été mis dans le bain des injonctions aussitôt gagné la capitale helvétique, jeudi dernier. Dès la première réunion à huis clos, il est apparu aux observateurs que les chevaux non-partants à la prochaine présidentielle avaient les préférences des organisateurs. Ce sont bien Jean-Pierre Bemba Gombo et Moïse Katumbi qui tenaient les manettes en se faisant accompagner d’un nombre de collaborateurs plus importants que les autres aux discussions. Le premier s’associant Eve Bazaïba et son fils aîné, le second se faisant accompagner notamment de Christophe Lutundula Apala, le juriste-maison du G7.
Les échanges autour de la candidature unique de l’opposition ont été substitué à deux face-à-face : le premier, entre les 7 leaders de l’opposition, qui n’a guère duré pour permettre de dégager quelque consensus que ce soit sur la question ; et le second, qui a soumis les candidats encore en lice pour la présidentielle à une sorte d’examen d’aptitude devant les non-partants.
En dehors de ces rencontres formelles, Genève aura été dominé par cette délocalisation des discussions qui a vu les 7 leaders politiques de l’opposition se réunir à l’abri des regards en dehors de l’Hôtel Warwick, samedi 10 novembre 2018. Sans parvenir à se convenir sur une candidature unique puisqu’aucune communication n’avait filtré sur le sujet. C’est à peine si on parlait d’un consensus sur la déclaration commune à publier, ou sur l’agenda commun des opposants. Dimanche 11 novembre jusqu’en fin d’avant-midi, il ne semblait pas non plus que la moindre avancée quant à la désignation de l’oiseau rare de l’opposition politique eût été trouvée.
Il avait fallu attendre la conférence de presse animée dans l’après-midi pour apprendre la désignation de Martin Fayulu, par vote de Moïse Katumbi, Jean-Pierre Bemba, Freddy Matungulu, Adolphe Muzito, et Mbusa Nyamwisi : les dés étaient de toute évidence pipés depuis longtemps.
J.N.