Six mois après les derniers sondages du tandem Jason Stearns (GEC) – Olivier Kamitatu (BERCI), l’institut d’études qui s’affiche comme une sorte d’extension de l’université de New York – ça fait plus sérieux – revient à la charge. Mardi 30 octobre 2018, GEC-BERCI a rendu public (précipitamment, rapportent des sources, pour rattraper un diplomate qui avait déjà largué les résultats sur les réseaux sociaux) les résultats d’un sondage réalisé du 29 septembre au 15 octobre 2018. L’étude effectuée après la publication de la liste définitive des candidats à la présidentielle 2018 porte sur 1.179 personnes âgées de 18 ans et plus et réparties dans les 26 provinces du pays. Mais elle ne surprend ni ne convainc pas beaucoup.
Comme en les résultats des sondages publiés le 2 mars 2018, ceux de septembre, près de 6 mois plus tard, n’en diffèrent que très peu. L’ancien employé onusien viré de la RD Congo par Kinshasa, Jason Stearn, et le porte-parole de Moïse Katumbi, Olivier Kamitatu, font la part belle à l’opposition. Selon leurs sondages, Moïse Katumbi et Jean-Pierre Bemba viennent en tête sur la liste des personnalités politiques populaires de la RD Congo, selon le millier de personnes interrogées qui du reste désapprouvent l’invalidation de leurs candidatures.
Face à face Tshilombo – Kamerhe
Avec 36 et 17 % d’intentions de vote chacun, Félix Tshilombo Tshisekedi et Vital Kamerhe caracoleraient en tête du peloton des candidats à la prochaine présidentielle. Suivis d’Emmanuel Ramazani Shadary du FCC crédité de quelque 16 % d’intention de vote, et surprise, de Martin Fayulu Madidi. Le candidat de la Dynamique de l’Opposition (DO) aurait réussi une percée dans son Bandundu d’origine au point de devancer, dans cette région où il n’a jamais réussi à faire élire le moindre candidat depuis 2006, les Freddy Matungulu, Kin Kiey Mulumba, autres Mabaya Gizi Amine, également candidat au Top Job rd congolais.
Cela va de soi, très peu parmi les acteurs politiques rd congolais, à l’opposition comme au sein de la majorité au pouvoir, n’accorde crédit aux proclamations de ces katumbistes. Sur son compte Twitter, Kin Kiey Mulumba étale tout son mépris vis-à-vis de ces projections pour le moins fantaisistes. « Face aux sondages d’opinion dans le monde, j’ai toujours observé une attitude amusée. Qui ne connaît les désastres de ces travaux ? Quant à ceux du Congo, c’est comme les écrits, je me garde de les commenter », écrit-il dédaigneusement.
Les autres réactions à la publication des résultats des sondages GEC-BERCI sont moins réservées. Dans les travées de l’opposition, particulièrement, où ces travaux katumbistes pourraient entraîner un véritable carnage et désarticuler durablement les travées des adversaires de Joseph Kabila et du Front Commun pour le Congo, sa gigantesque plateforme électorale.
A l’UDPS/T dont le candidat à la prochaine présidentielle est plébiscité par les résultats du sondage, Augustin Kabuya en profite pour relever que c’est l’opinion publique nationale qui se montre ainsi favorable à la désignation de Félix Tshisekedi comme candidat unique de l’opposition à la présidentielle de décembre 2018.
Sondages pour booster Fayulu ?
Au G7 Katumbiste, on attribue au député Muhindo Nzangi la révélation des faveurs de la plateforme pour la candidature de … Martin Fayulu, que GEC-BERCI ont opportunément propulsé au sommet des intentions de vote dans l’ex. Bandundu. « Fayulu s’est mis d’accord sur certains points avec Jean-Pierre Bemba et Moïse Katumbi », rapportaient des médias en ligne mercredi 31 octobre à Kinshasa. Alors que les mêmes sondages créditaient Vital Kamerhe de l’UNC d’une percée dans les Kivu et dans l’ex province Orientale. Mais on sait que l’ancien speaker de l’Assemblée Nationale n’a vraiment jamais été en odeur de sainteté auprès de Jean-Pierre Bemba qui aurait récemment déclaré à des proches qu’il ne soutiendrait jamais un candidat président de la République originaire de l’Est du pays. Tout autant qu’entre le 3ème à la présidentielle 2011 et le dernier gouverneur du Katanga qui a littéralement saigné son parti politique, c’est je t’aime moi non plus, malgré les apparences affichées.
Félix Tshilombo Tshisekedi conforté dans ses ambitions à la candidature unique de l’opposition, envers et contre tous ; Fayulu dressé contre Vital Kamerhe comme aux bons vieux temps de la création de la Dynamique de l’opposition dont ils se disputèrent farouchement le leadership ; les sondages GEC-BERCI semblent répondre d’un projet de désarticulation complète de l’opposition politique à Joseph Kabila avant décembre 2018, selon certains critiques.
Sondages pour influencer l’opinion
Du côté de la majorité présidentielle et du Front Commun pour le Congo également, il s’en trouve très peu qui croient aux projections publiées mardi dernier. Michaël Sakombi y réagit par un posting qui en dit long : « Sondage téléphonique dans un pays dont couverture n’atteint pas 50 % population est biaisé car échantillon faussé. Sans y ajouter l’impossibilité catégorisation socio-économique. @jasonkstearns a mieux à faire, surtout pas avec Berci », écrit-il sur son compte Twitter.
La réaction du PPRD Adolphe Lumanu Bwana Nsefu n’est pas non plus très flatteuse pour le tandem Stearns-Kamitatu : « ce sondage n’est qu’une façon de préparer l’opinion. Ils veulent conditionner l’électoral mais ça ne marchera pas ! », fulmine-t-il en répondant à nos confrères de Jeune Afrique qui l’ont interrogé sur la question. « Au sein du FCC, nous sommes sereins et confiants. Nous ne croyons pas du tout à cette mise en scène concoctée depuis l’étranger. Je n’ai pas vu, par exemple, les enquêteurs du GEC chez moi, à Idiofa », explique encore Adolphe Lumanu.
De nombreuses autres critiques circulent sur ces réseaux sociaux dont raffolent ceux des RD Congolais qui y ont accès, et qui notent que les interviewés (par téléphones portables) n’ont rien semblable avec les millions d’électeurs qui n’ont pas accès à cet outil de communication ; ou encore que les réponses des interviewés n’ont pas varié depuis 5 sondages, prouvant par-là que Berci disposent d’une réserve de personnes-sources qui ont des opinions arrêtées déjà connues …
Faute de convaincre, les sondages GEC-BERCI sont un poison mortel pour l’opposition, selon les observateurs.
J.N.