Le sommet des Chefs d’Etat des organisations sous régionales comprenant la RD Congo, la SADC, la CEEAC, et la CIRGL, convoqué par l’Angolais Joao Lourenço à Luanda en Angola, mardi 14 août 2018 a vécu. Et accouché d’une souris, ou presque. Sur les Chefs d’Etat en fonction attendus dans la capitale de ce voisin de RD Congo, seulement deux ont été présents dans la capitale angolaise, le Brazza-Congolais Denis Sassou Ngouesso, qui préside aux destinées la CIRGL (Conférence Internationale pour la Région des Grands Lacs) et le Gabonais Ali Bongo Ondimba, fils de son père, Omar Bongo, qui dirige le CEEAC (Communauté Economique des Etats de l’Afrique Centrale). Egalement attendus, l’Ougandais Yoweri Kaguta Museveni et le Rwandais Paul Kagame n’ont pas effectué le déplacement de Luanda. Ni, non plus, le RD Congolais Joseph Kabila et le Sud-Soudanais, Salva Kiir Mayardit, dont le sommet était sensé examiner les situations politiques dans leurs Etats respectifs.
Dans la foulée des pressions pour influer sur l’avenir politique immédiat de la RD Congo, Luanda était présenté comme une sorte de tribunal des pairs pour les Chefs d’Etats rd congolais et Sud-Soudanais, invités pour rendre compte, quasiment. Convoqué par Joao Lourenço, la rencontre devait analyser les situations qui prévalent en RD Congo, au Soudan du Sud et en République Centrafricaine, s’était vanté, quelques jours plus tôt, le patron de la diplomatie angolaise, Manuel Augusto.
Seulement, examiner les situations politiques de pays membres d’organisations sous-régionales impliquait passablement des immixtions dans les affaires intérieures d’Etats, par ailleurs souverains. Et cela ne semble pas avoir arrangé tout le monde. D’autant plus que dans la gestion des dossiers RD Congolais et Sud-Soudanais, Joao Lourenço semblait jouer la carte de la défense des intérêts occidentaux plutôt qu’Africains en mettant en avant la thèse des impératifs sécuritaires régionaux, présentés comme s’ils étaient prioritaires par rapport aux impératifs sécuritaires et politiques des pays concernés.
Convié à Paris et à Bruxelles fin mai 2018, le Chef de l’Etat angolais a manifestement pris fait et cause pour les immixtions occidentales dans la politique intérieure de la RD Congo, puisqu’il y a discuté avec un Chef d’Etat du continent européen de la situation politique dans un Etat membre de la SADC. Kinshasa n’avait pas aimé. Et l’a fait savoir bruyamment en convoquant les ambassadeurs des pays concernés à Kinshasa aux fins d’obtenir des explications sur ces usages diplomatiques inusités. Acculé, le successeur d’Edouardo Dos Santos avait prétendu que les sujets abordés avec ses interlocuteurs Européens n’avaient rien de secret. Mais rien n’y a fait.
Le 9 août 2018, dans la foulée des réactions à l’annonce de la désignation d’un candidat président de la République par Joseph Kabila, des sources diplomatiques en France se sont empressées de vanter la politique du nouveau locataire de l’Elysée, Emmanuel Macron. Elle consisterait en une approche diplomatique discrète et « … d’engagement avec les acteurs, notamment régionaux ». « Ce qui a fonctionné ce sont surtout les messages venant de la région », se vantent des sources citées par la presse.
L’Angolais Joao Lourenço compte donc parmi ces leviers occidentaux sur le continent, comme beaucoup d’autres avant lui, par lequel filtrent les injonctions d’anciennes puissances coloniales du continent. Dans la région, beaucoup de ses pairs s’en sont rendus compte, sans doute. Et ont zappé le sommet néocolonialiste de la capitale angolaise. Qui en a été réduit à se répandre en déclarations de satisfaction sur l’évolution positive de la situation politique rd congolaise depuis, notamment, que Joseph Kabila a tenu sa promesse de respect de la constitution. En présence du Brazza-Congolais Denis Sassou Ngouesso, qui lui a allègrement charcuté la constitution de son pays pour prolonger son bail au sommet de cet Etat de l’Afrique Centrale, et du Gabonais Omar Bongo qui, bien que formellement élu, n’en trône pas moins sur le fauteuil légué par son défunt père, Omar Bongo Ondimba, il était impossible de ne pas noter l’acte révolutionnaire posé par Joseph Kabila en RD Congo.
Mais à Luanda, le sommet de Joao Lourenço n’avait connu ni ouverture solennelle ni clôture officielle. Le programme des manifestations en pompe, rendu public comme d’usage plusieurs jours auparavant, a été bouleversé en dernière minute. A Luanda le 14 août 2018, ce fut échec et mat.
J.N.