Dans l’opinion publique à Kinshasa et un peu partout en RD Congo, beaucoup croient, enfin, voir clair dans ce qui trame derrière les manœuvres politiciennes du Comité Laïc de Coordination. Surtout depuis que les doutes se sont dissipés sur l’inéluctabilité des scrutins de décembre 2018 grâce à l’ouverture effective des bureaux d’enregistrement et de traitement des candidatures aux provinciales, et le dépôt effectif des listes des candidats à ses élections qui se tiendront le même jour que la présidentielle et les législatives par les partis politiques de la majorité, de l’opposition radicale et les indépendants. Seuls les caciques du CLC, cette nébuleuse créée à l’initiative du cardinal archevêque de Kinshasa, pour combattre Joseph Kabila. Et surtout, cela apparait de plus en plus clairement, perturber le processus électoral afin de permettre l’instauration d’une période de transition politique que l’ancien président de la Conférence Nationale Souveraine dans les années ’90, ne dédaignerait nullement de diriger.
Contre la convocation de l’électorat
Le 7 juillet 2018, deux semaines après la convocation formelle de l’électorat pour les scrutins de décembre prochain par la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) et l’ouverture des bureaux de réception et de traitement des candidatures aux élections provinciales, le CLC est remonté au créneau pour annoncer des manifestations insurrectionnelles dès le mois d’août prochain si ses exigences mirifiques (au nom d’on ne sait quelle légitimité ou droit) n’étaient pas respectées à la lettre. Parmi ces exigences sur lesquelles nul ne peut sensément se reposer figurent, entre autres, le retrait total et immédiat de la machine à voter, l’implication des experts internationaux dans l’accompagnement du processus électoral, la fin de l’instrumentalisation de l’appareil judiciaire, de la police et des services de sécurité. Des exigences chimériques pour torpiller un processus électoral que les agitateurs politiques du Cardinal kinois sont de plus en plus à torpiller.
Exigences mirifiques
Parce que sans machine à voter, point d’élections le 28 décembre prochain, et donc glissement vers une période de transition dont la durée reste inconnue, qui serait dirigée par des personnes non élues par les rd congolais. L’exigence de l’implication d’experts internationaux s’avère, elle aussi, un véritable attrape-nigaud, dans la mesure où le processus électoral en cours est accompagné par les experts onusiens (donc de la communauté internationale), des organisations régionales et sous régionales comme l’UA, la SADC, la CIRGL et la CEEAC, autant que par l’Organisation Internationale de la Francophonie qui a achevé il y a quelques semaines un audit sur le fichier électoral. Les experts internationaux du CLC, c’est l’immixtion d’une certaine communauté internationale qui revendique une sorte de paternité sur la vie politique et économique de la RD Congo, que Monsengwo et certains princes de l’église catholique romaine revendiquent. La fin de l’instrumentalisation de l’appareil judiciaire, de la police et des services de sécurité, également exigée par le CLC, repose elle aussi sur des illusions subjectives et irréalistes que nul sur cette terre des hommes ne saura jamais satisfaire. Surtout si par instrumentalisation de la justice par exemple, on voudrait en réalité jeter de la confusion dans les esprits sur les droits reconnus à la plupart de Chefs d’Etats modernes de nommer et de révoquer, si pas tous les hauts magistrats, un certain nombre parmi eux, ainsi que vient de le faire il y a une semaine seulement, Donald Trump, le président des Etats-Unis.
Chimères pour contourner le souverain primaire
Les chimères catholiques ne sont donc nullement annonciatrices d’augures célestes, se persuade-t-on désormais en RD Congo. Pas pour les quelque 80 millions des rd congolais parmi lesquels au moins la moitié en âge d’élire s’est inscrite sur les listes de la CENI pour se choisir librement ses dirigeants. De plus en plus d’observateurs soupçonnent certains prélats catholiques de convoiter carrément le pouvoir politique qui leur échappe, à eux et à leurs maîtres à penser occidentaux, depuis plusieurs années maintenant. « On ne peut pas expliquer autrement le fait que les évêques tentent d’obstruer le processus de démocratisation de la RD Congo au lieu de l’accompagner », explique à ce sujet un diplomate africain à Kinshasa. D’autres ont des avis encore plus tranchés sur la question et voient derrière l’agitation des catholiques kinois la main de l’archevêque local, le cardinal Monsengwo, qui a déjà prouvé dans un passé plus ou moins récent qu’il ne dédaignait nullement le top job au pays de Patrice Lumumba. Président du bureau provisoire et définitif de la Conférence Nationale Souveraine entre (CNS) 1991 et 1992, président du bureau du Haut Conseil de la République (HCR) de 1993 à 1994, initiateur de la désormais célèbre 3ème voie qui lui avait permis de neutraliser habilement les schémas de la CNS et du Conclave politique de Kinshasa en 1994, président du bureau du Haut Conseil de la République-Parlement de Transition (HCR-PT) entre 1994 et 1995, dont il est défenestré en 1995 à l’initiative des familles politiques constitutionnelles auto-proclamées Fpc (Forces politiques du conclave) et Usoral (Union sacrée de l’Opposition radicale et Alliés), l’alors Mgr Monsengwo rappliquera néanmoins précipitamment à Kinshasa en 1997 pour reprendre son poste dans le but de combler la vacance à la magistrature suprême en cas de démission, de décès ou d’empêchement définitif du Président de la République en fonction, en l’occurrence le Maréchal Mobutu. C’est ce que se plaisent à rappeler opportunément à l’opinion des observateurs comme Omer Nsongo die Lema, non sans pertinence. « C’est à deux doigts de la réalisation de son rêve que le prélat verra un certain Kabila, porte-parole de l’AFDL, lui barrer la route du Palais de la Nation », note-t-il en substance. Estimant que « depuis 2001, sa cible reste Joseph Kabila. Dont il conteste toutes les initiatives le mettant en bonne position : référendum constitutionnel de 2005, victoires électorales de 2006 et de 2011, programme des 5 Chantiers pour la République ». « Que le CLC soit apparu en décembre 2017 avec sa bénédiction n’a rien de surprenant. C’est sa machine, son char, son artillerie », conclut-il.
Pas de candidature de Joseph Kabila pour un nouveau mandat, retrait total et immédiat de la machine à voter, mise en œuvre des recommandations de l’OIF, implication par la CENI des experts internationaux dans l’accompagnement du processus électoral … c’est la voie ouverte vers le report des élections et l’instauration d’une période de transition dirigée par le cardinal kinois. Le CLC, c’est le lit de Monsengwo qu’il prépare.
J.N. AVEC Omer NSONGO D.L.