En l’espace d’une dizaine de jours, le secrétaire général Jean-Marc Kabund recadre le porte-parole Paul Tshilumbu qui à son tour recadre son «re-cadreur» ! Manifestement, à quelques jours de l’échéance du 8 juillet 2018, le dépôt des dossiers de candidatures à la députation provinciale divise le parti de Félix Antoine Tshilombo…
Le 24 juin 2018, par la bouche de Paul Tshilumbu, son porte-parole, l’UDPS/Tshisekedi se dit « … prête à déposer la liste de ses candidats ». Le 25 juin 2018, Jean-Marc Kabund, le secrétaire général, nuance les propos du porte-parole : « Nos listes sont prêtes mais nous avons posé des préalables », déclare-t-il. Le 26 du même mois, Félix Antoine Tshilombo, le N°1 de cette aile du parti de Limete, faisait état de « six conditions pour la participation de l’UDPS » au processus électoral en cours. Mais quelques jours plus tard, le 3 juillet 2018, son collaborateur Paul Tshilumbu revenait à la charge et assurait que « … l’UDPS va déposer ses listes dans le délai ». Seulement, la date limite de dépôt des candidatures est fixée au 8 juillet 2018, c’est-à-dire 5 jours à dater du jour de la déclaration de l’udpsien.
A l’analyse, les propos les propos de chacun de ces trois dirigeants de l’UDPS/Tshisekedi paraissent contradictoires et irréalistes.
Le dimanche 24 juin 2018, date prévue dans le calendrier électoral pour l’ouverture des Bureaux de réception et de traitement des candidatures, Paul Tshilumbu déclare à Radio Okapi : « L’UDPS/Tshisekedi est prête à déposer la liste de ses candidats au niveau des bureaux de réception et traitement des candidatures (BRTC) et va payer leur caution en vue de leur participation aux élections provinciales ». Il précise : « Nous sélectionnions nos candidats à partir des structures de base. Au fait, ce sont nos sections dans toutes les provinces et les fédérations qui ont sélectionné les candidats du parti et ces candidats, après avoir été sélectionnés, leurs noms ont été envoyés au niveau de la commission électorale permanente dirigé par Maître Jacquemin Shabani ».
Le lundi 25 juin 2018, il se fait retoquer par Jean-Marc Kabund. « Nos listes sont déjà prêtes mais nous avons posé des préalables en amont. Il faut que la CENI clarifie la question de la machine à voter, que nous rejetons avec force, et celle du fichier électoral corrompu, et qu’il faille corriger, disait le Secrétaire général du parti de Tshilombo Tshisekedi avant d’ajouter : « Nous n’irons pas aux élections pour cautionner la fraude. Joseph Kabila veut nous amener à des élections où sa famille politique sort déjà gagnante d’avance avant même le scrutin. C’est clair, et nous on ne peut pas l’accepter ».
Le mardi 26 juin 2018, Félix Antoine Tshilombo a décliné les six conditions préalables de l’UDPS au dépôt des dossiers de ses candidats à la députation provinciale : « Remplacement de son délégué à la CENI, abandon de la machine à voter, nettoyage du fichier électoral pour y extirper tous les électeurs fictifs, institution d’une commission d’enquête indépendante afin d’effectuer un contrôle sur la gestion des fonds mis à la disposition de la CENI, respect par la CENI des règles et procédures en matières de passation des marchés publics et de gestion des fonds et organisation d’un audit externe par la Cour des comptes sur la gestion des fonds alloués aux opérations électorales ».
Et le mardi 3 juillet 2018, Paul Tshimbulu faisait de nouveau sensation en déclarant que « le dépôt de listes ne veut pas dire que l’UDPS a mis de côté ses préalables. Je voudrais seulement apaiser les cœurs de tous les congolais que l’UDPS va déposer les listes de ses candidats dans le délai, nous sommes en train de mettre la dernière main, soyez rassurés que nous allons déposer nos listes ». Il a ajouté : « ça, c’est la première étape, nous allons déposer nos listes et la pression va continuer afin qu’on puisse non seulement retirer la machine à voter mais qu’on puisse aussi nettoyer le fichier électoral ».
Quand et comment les six préalables seront-ils satisfaits avant la date limite de dépôt des candidatures à la députation provinciale ? Techniquement parlant, c’est quasiment impossible.
Différences dans des préalables
Ce qui ressemble à un ressaisissement de la part de l’UDPS peut s’expliquer par l’option levée le 1er juillet 2018 par « Ensemble pour le Changement », la plateforme électorale katumbiste, à partir de Bruxelles, de procéder d’abord au dépôt des dossiers de ses candidats aux provinciales « en dépit des incertitudes qui planent sur le processus électoral », a souligné Moïse Katumbi dans la déclaration rendue publique pour ce faire. Au paragraphe 4 de ce document, le dernier gouverneur de l’ex Katanga rappelle les déclarations de l’opposition du 11 avril et du 28 mai 2018 « exigeant notamment l’abandon par la CENI de la machine à voter non prévue dans le calendrier qu’elle veut imposer en violation de la loi, la publication immédiate des listes électorales provisoires sans les cas litigieux aux fins des corrections requises, l’application de toutes les mesures de décrispation politique contenues dans l’Accord de la Saint Sylvestre et la levée des restrictions politiques liées à la zone opérationnelle du Kasaï afin de garantir la bonne tenue des prochaines élections». En omettant délibérément de signaler qu’il l’a proprement charcutée, parce que le 28 mai dernier, la déclaration des radicaux exigeait encore «le départ immédiat de Monsieur Naanga, président de la CENI et la désignation toutes affaires cessantes d’un nouveau président de la CENI par la société civile (composante confessions religieuses) d’ici le 15 juin 2018 ».
Ainsi apparaissent de sérieuses divergences dans les préalables posés au niveau des formations politiques (ce qui est normal), mais aussi et surtout au niveau d’un même parti, l’UDPS de Félix Tshilombo (ce qui est anormal).
Unique parti ayant pignon sur rue mais qui n’est pas représenté dans les institutions où se prennent les décisions d’Etat parce que dépourvu de députés nationaux, de sénateurs, et de députés provinciaux, autant que de gouverneurs et de ministres provinciaux, l’UDPS/Tshilombo s’expose à un risque sérieux d’implosion si les ambitions de ses candidats aux provinciales sont mal gérées.
Etienne Tshisekedi, malgré toute l’aura dont il bénéficiait dans l’opinion, s’était avéré incapable de dissuader 33 des 41 députés nationaux du parti qui avaient décidé de siéger à l’Assemblée nationale. Félix Antoine Tshilombo, qui a pris sa succession, n’a ni la poigne ni le bagout de son père pour faire tête à une fronde des nombreux candidats aux provinciales dont les dossiers ne seraient pas présentés aux BRTC à l’échéance prévue.
Déjà, imprudemment (certainement mal conseillé), il voit des compagnons, pardon les « accompagnateurs » de son père basculer vers le Front commun pour la Congo (FCC) que le madré Joseph Kabila vient de créer, et encore, cela arrive au moment où la scène politique se recompose de fond en comble.
Privés de mandat pour les 5 prochaines années, les candidats UDPS aux provinciales peuvent, eux aussi, basculer vers d’autres plateformes. Les prochaines heures seront de toute évidence une épreuve pour le parti devenu coutumier de la politique de la chaise vide.
La difficulté pour Fatshi, Kabund et Tshilumbu d’harmoniser le langage n’est pas bon signe.
Omer Nsongo die Lema avec Le Maximum