Pour avoir juré «sur l’honneur que les renseignements» fournis lors du dépôt de ses candidatures en qualité successivement de député national, de député provincial et de gouverneur de province «sont sincères et exacts», l’homme a menti délibérément et compromis sa carrière politique…
C’est l’affaire la plus gênante qui soit à ce moment précis pour tout le monde. Avoir détenu la double nationalité pendant la période où il a exercé les fonctions de gouverneur de province au Katanga après avoir été élu successivement et plutôt brillamment député national et député provincial, Moïse Katumbi ne s’en est pas moins compliqué la vie. Avec une légèreté propre à un délinquant primaire. Parce que le gouverneur de l’ex. Katanga ne pouvait ignorer que la nationalité rd congolaise ne pouvait être détenue concurremment avec une autre. La Constitution – dont il se fait le défenseur attitré quand il s’agit de rappeler le nombre de mandat du Président de la République – stipule clairement aux alinéas 1 et 2 de son article 10 que : «La nationalité congolaise est une et exclusive. Elle ne peut être détenue concurremment avec aucune autre».
Jeune Afrique (JA) rapporte dans sa livraison du 22 mars 2018, que consultée, la mairie de San Vito dei Normanni en Italie «confirme que l’opposant – qui a choisi le nom de Moïse Katumbi d’Agnano lors de sa demande de naturalisation – a acquis la nationalité italienne le 3 octobre 2000, avant d’y renoncer le 13 janvier 2017». Ainsi, 17 ans durant, Katumbi se savait à la fois italien et congolais…
Le reste coule comme de source. Le Procureur Général de la République, Flory Kabange Numbi, a ouvert une information judiciaire le 27 mars 2018 «à charge de Moïse Katumbi pour que le moment venu, il puisse répondre de tous ces actes». «Comment voulez-vous qu’un individu se sachant de nationalité italienne puisse se présenter devant nos bureaux pour avoir le passeport, la carte d’électeur». Et de trancher : «Tout ce temps qu’il a passé à la tête de la province, il se prévalait des actes faux, de faux documents», déplore le premier flic de la RD Congo.
L’affaire Stoupis, pour laquelle l’ancien gouverneur avait déjà été condamnée par le tribunal de paix de Kamalondo à Lubumbashi en devient carrément banale, comparée à ce délit sur la nationalité. Tandis que l’autre affaire relative au recrutement des mercenaires semble pouvoir devenir plus grave encore . Même si dans le fond, les observateurs notent que la dernière affaire Katumbi, qui défraie la chronique depuis un peu plus d’une semaine, révèle plutôt l’homme tel qu’il est en lui-même : c’est Moïse Katumbi face à Moïse Katumbi, en fait.
Katumbi face à ses turpitudes
Une précision s’impose à ce stade : en 2000, lorsqu’il avait sollicité la nationalité italienne, l’homme n’exerçait aucune activité politique. Le Pprd avait été créé en 2002, en pleins travaux du Dialogue intercongolais à l’étape de Sun City I. Moïse Katumbi a rejoint ce parti en 2005, en prévision d’ailleurs des élections présidentielle, législatives et provinciales organisées entre juillet et octobre 2006.
Il est évident que chaque candidat savait ce qu’il en était par rapport à sa nationalité. Aucun parti, aucun regroupement ne pouvait savoir qui était congolais, qui ne l’était pas, qui était à la fois congolais et étranger.
Lorsqu’il avait déposé son dossier de candidature à la députation nationale, à la députation provinciale et au gouvernorat de province, Moïse Katumbi n’ignorait rien des dispositions de la Loi n° 06/006 du 09 mars 2006 portant organisation des élections présidentielle, législatives, provinciales, urbaines, municipales et locales, précisément en ce qui concerne les législatives (articles 120-121), les provinciales (articles 148-149) et les «gouvernorales» (articles 161-162).
Toutes ces dispositions astreignaient tout candidat à u on certain nombre de conditionnalités : «Etre de nationalité congolaise» (qui est une et indivisible) ; «jouir de la plénitude de ses droits civils et politiques», et ; présenter «une fiche d’identité suivie d’un curriculum vitae détaillé», le tout se terminant par la formule «‘Je jure sur l’honneur que les renseignements ci-dessus sont sincères et exacts’».
Moïse Katumbi Chapwe avait, par trois fois, fait la navette entre son domicile ou son bureau et le siège provincial de la CEI au Katanga tout en ayant conscience de fournir des renseignements qu’il savait faux !
Un geste posé à la légère qui s’avère fatal aujourd’hui.
Entré par effraction en politique, il en sort par infraction !
Reste à savoir qui a soufflé à Moïse Katumbi l’idée d’écrire officiellement en 2017 aux autorités italiennes pour renoncer à la nationalité obtenue en 2000, soit dix-sept ans plus tôt. L’aurait-il fait en 2006 au moment de l’enregistrement des candidatures pour les législatives qu’il aurait pu faire valoir des circonstances atténuantes. Mais non. Moïse Katumbi attendu 2017, et encore après avoir annoncé en 2015 sa candidature à la présidentielle pour tenter d’effacer l’erreur de 2006.
De deux choses alors l’une : Moïse Katumbi a soit été conseillé par un proche pouvant être un juriste de formation ou de profession, soit il s’est auto-conseillé.
Dans la première éventualité, on ne peut pas ne pas penser aux Christophe Lutundula, Georges Kapiamba, Delly Sessanga ou Francis Kalombo, les juristes patentés de la maison G7. Dans la seconde éventualité, Moïse Katumbi aura confirmé, si besoin est, qu’il n’a aucun sens d’Etat.
Au-delà de ces suppositions, l’évidence est que si cette affaire de nationalité italienne est vraie, l’ancien et dernier gouverneur du Katanga aura ruiné pour longtemps sa carrière politique. Au demeurant, la politique n’a jamais été son dada, avait-il déclaré par le passé. Le sien est dans le monde des affaires.
Entré donc par effraction en politique active, Moïse Katumbi en sort par une infraction de délinquant primaire.
Omer Nsongo die Lema avec Le Maximum