Fin des instructions ouvertes dans le cadre du procès contre les rebelles ougandais de l’ADF par la Cour Militaire Opérationnelle du Nord-Kivu. Au terme de 238 audiences en chambre foraine qui se sont étalés sur 17 mois depuis le 20 août 2016, plus ou moins 53 arrêts ont rendus, 134 des 179 prévenus condamnés et 45 acquittés.
La dernière audience, lundi 22 janvier 2018, a été sanctionnée par l’arrêt rendu dans le dossier RP.169/2017, opposant le Ministère Public à 3 combattants ADF de nationalité Ougandaise capturés au front et poursuivis pour participation à un mouvement insurrectionnel et association des malfaiteurs. Le prévenu Youssouf Dongo Amala (évadé) a été condamné par défaut à la peine de mort ; Adam Mike alias Adamu Mike et Peter Sudayis Moussa alias Pita Sudayis Musa ont été condamnés chacun à 10 ans de prison.
Samedi 20 janvier 2018, la Cour a prononcé le verdict dans la cause inscrite sous RP.243/2018, fixant le sort de 3 prévenus poursuivis pour participation à une entreprise visant la démoralisation de l’armée en vue de nuire à la défense nationale. Mathe Nyamwesa Prosper (Président de l’association culturelle Nande Kyanghanda-Yira/Beni) ; Kasusa Siwako Valérie (Présidente de la société civile/Batngi-Bingo) et Kasereke Biondi Jules Alias Chicotte (ancien-chef de cité-adjoint de Mangina, en Territoire de Beni). Il leur était reproché d’avoir monté une cabale visant à discréditer les Autorités politico-administratives et militaires qu’ils ont présenté à l’opinion comme auteurs des massacres des civils en Ville et en Territoire de Beni. «En substance, avoir, en décembre 2015 à la prison de Kangbayi, contacté et persuadé le prisonnier Paluku Kishofere à venir se présenter au procès comme étant le Coordonnateur des massacres de BENI, massacres organisés en complicité avec les Autorités (à l’occurrence le Gouverneur de Province du Nord-Kivu, le Maire de la Ville de BENI, le Chef de Secteur de Beni-Mbau et le Chef de Chefferie des Watalinga ainsi que plusieurs Officiers supérieurs des FARDC établis en son temps à Beni)». La Cour a reconnu les 3 prévenus coupables et les a condamnés avec des circonstances atténuantes à 7 ans de servitude pénale pour Mathe Nyamwesa et Kasusa Siwako, et à 3 ans pour Kasereka Biondi Jules. Ils ont en outre été condamnés au paiement des frais d’instance. Mathe Nyamwesa qui comparaissait en prévenu libre ne s’est pas présenté le jour du prononcé. Il est recherché par le Ministère Public pour purger sa peine.
Vendredi 19 janvier, la Cour a rendu son verdict dans le dossier instruit sous RP.172/2017 contre 30 prévenus accusés par le Ministère Public comme étant des ADF ou des collaborateurs de ceux-ci. Parmi eux, 3 grands chefs coutumiers et un un colonel FARDC. Deux des chefs coutumiers ont écopé de la peine de mort et l’officier supérieur FARDC a été condamné à 4 ans de servitude pénale.
C’est dans ce dossier que l’Organe de la loi (le Ministère Public) a étayé la théorie du Triangle à 3 sommets, expliquant que trois grands chefs coutumiers de BENI ont joué un rôle déterminant dans la coordination des massacres des civils par les ADF et des milices qui leur sont alliées. L’Officier du Ministère Public a soutenu que les 3 grands chefs coutumiers avaient conspiré avec les tueurs.
Dans sa sentence, la Cour a condamné 14 prévenus sans circonstances atténuantes à la peine capitale ; elle a acquitté 7 autres pour faits non établis ou pour doute ; exempté de toute peine 1 prévenu et infligé à 9 autres des peines avec circonstances atténuantes variant entre 2 à 20 ans de servitude pénale. Les 14 condamnés à morts sont : Mwami Mbunguma Kitobi André, Mwami Boroso Bin Bendera II Undelema ; Kasereka Balabala Pharaon, Kahindo Kangeneti et Kasereka Bahwee Grâce. Adrien Muhumuza, Thomas Salongo, Kasereka Shahetera Salomon, Kakule Mbimba, Katembo Kapisa, Kasereke Kayikolo alias Kaskas, Paluku Mbowa Charles, et Mumbere Selemani ont été condamnés par défaut.
Mbusa Salimboko Henri a incombé de 20 ans de servitude pénale, le Colonel Muhindo Lusenge David (4 ans), Kakule Baraka alias Mboma (4 ans), Kakule Sibendire alias BKF (4 asn), Nkayalwa Etienne alias Muganda (3 ans), Mbula Olenga Jean-Marie (2 ans), Mutokambali Sivirwa Yes (2 ansl), Mwami Bulemo Ando Kizire (2 ans) . Le Mwami Saambili Bamkoka a été exempté de toute peine.
7 prévenus ont été acquittés : Bakola Motela Jean-Pierre ; Bitwin Ngombenyama, Kamundu Mapoli, Kambale Saliboko Lambert, Valindawa Christian, Okabo Mabruki et Musabao Basturana Mupepe ont été immédiatement libérés. La Cour militaire opérationnelle a alloué des dommages intérêts de plus de 300 mille dollars à environs 45 parties civiles formellement constituées.
Jeudi 18 janvier, la Cour avait prononcé deux arrêts dans les causes instruites sous RP: 197/2017 et 209/2017.
Dans la première affaire, la Cour a condamné à la peine de mort le Seigneur de guerre Muhindo Nguba David, un des chefs du groupe armé dénommé APCLS, reconnu coupable de direction/commandement d’un mouvement insurrectionnel et détention illégale d’armes et munitions de guerre. Il est reproché à Muhindo Nguba des contacts avec les chefs de plusieurs groupes armés du Grand-nord (dont le redoutable David Maranata des mai mai Corps du Christ) dans le but de mettre en péril les institutions de la République.
Dans l’arrêt sous RP.209/2017 la Cour militaire Opérationnelle a condamné 8 prévenus de la milice «May-May Diacre » pour participation à un mouvement insurrectionnel et association des malfaiteurs. Cette milice à caractère tribalo-religieux mise sur pied par le Masubili Sept avait recruté des jeunes (à Beni et Oicha) sous prétexte de combattre les égorgeurs ADF. Mais dans les faits, les responsables de la milice ont planifié des attaques contre l’auditorat militaire de garnison de Beni et et le Quartier Général de la MONUSCO de Mavivi.
La Cour a condamné, sans circonstances atténuantes 5 prévenus en fuite à la peine de mort et ordonné leur arrestation immédiate (Kambale Tuliza Safari, Mumbere Pilipili, Kambale Kamabu, Kakule Liso et Kambale Visunga). Quant aux 3 autres prévenus dans la même cause, la Cour leur a accordé des circonstances atténuantes tout en les condamnant à des peines allant de 5 à 3 ans de servitude pénale.
J.N. AVEC LE CEPHADO