Adoptée par l’Assemblée Nationale le 5 décembre 2017, puis par le Sénat 10 jours plus tard, le 15 décembre, la loi électorale a été promulguée par le président de la République le 25 du même mois. Une célérité manifeste, qui s’explique par l’urgence de doter la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) de l’arsenal juridique qui conditionne le respect des délais électoraux. La nouvelle loi promulguée se caractérise, notamment, par la fixation d’un seuil électoral arrêté à 1 % de l’électorat au niveau national. Une option qui a emporté les votes dans les deux chambres du parlement rd congolais en raison du fait qu’en réduisant le nombre de partis politiques (plus de 700 légalement reconnus), elle facilitait certaines opérations électorales, notamment, l’impression des bulletins de vote déjà kilométriques aux dernières élections.
Lundi 15 janvier dernier, un groupe de sénateurs et députés (une soixantaine aurait signé une requête), essentiellement de l’opposition en fait, ont adressé un recours en annulation de la loi promulguée à la Cour Constitutionnelle. La nouvelle loi violerait, selon les requérants, certaines dispositions de la constitution. En réalité, ces législateur tentent de contourner une procédure parlementaire au terme de laquelle ils ont été battu à la régulière : par un vote en plénière. « Nous ne pouvons pas accepter cela. Il s’agit notamment de la question du seuil de représentativité, de la problématique des candidatures des indépendants, etc », a expliqué le député Ekombe Mpetshi. Henri Thomas Lokondo (MP), connu comme un « électron libre au sein de la majorité », a pour sa part, précisé que « nous demandons à la Cour Constitutionnelle de déclarer certaines dispositions de la loi électorale inconstitutionnelles ».
Force est de constater que le vrai problème qui motive cette démarche que d’aucuns jugent anti-démocratique est celui du seuil de représentativité. Nombre des signataires de la requête tendant à faire invalider la nouvelle loi électorale émargent des listes de petits partis politiques menacés par les prochaines joutes électorales et appelés par la force des choses, soit à mettre la clef sous la paillasson faute d’atteindre le seuil de représentativité, soit à se fédérer pour former de plus importants regroupements et espérer atteindre ce seuil pour survivre. « C’est ce qui explique la présence d’une Odette Babandoa ou d’un Henri-Thomas Lokondo ou encore de Christophe Lutundula dans ce groupe. Tous font partie de partis politiques dont ils sont à la fois les présidents fondateurs et les seuls élus », explique au Maximum un élu PPRD goguenard.
Membre de l’UNC de Vital Kamerhe jusqu’à il y a peu, Odette Babandoa a abandonné cette formation politique disposant d’un certain nombre d’élus sur un coup de tête pour son Union des Patriotes Républicains (UPR), un parti politique enregistré en 2004, qui ne compte aucun élu et qui a peu de chances aux prochains scrutins d’afficher plus de 1% de l’ensemble des électeurs effectifs sur le territoire de la RDC. Il en est de même d’Henri-Thomas Lokondo dont le parti politique, l’Union Congolais pour la Liberté a son siège à la 14ème rue Limete. Il ne compte qu’un élu national, lui-même. A la tête du Mouvement Solidarité pour la Démocratie et le Développement (MSDD), le G7 Christophe Lutundula est bien lui aussi l’unique élu de ce parti politique dans son fief sankurois de Katako-Kombe.
Les signataires de la requête déposée lundi dernier à la Cour Constitutionnelle sont donc des condamnés à la mort politique si les articles de la nouvelle loi électorale relatifs au seuil de représentativité ne sont pas abrogés. Et il y a peu de chances qu’ils le soient, selon certains observateurs qui notent qu’en l’espèce, l’initiative de ces élus met à mal le sacro-saint principe de la séparation des pouvoirs. « On voit mal comment la cour constitutionnelle prendrait une décision qui infirme des procédures parlementaires par ailleurs réputées conformes au règlement d’ordre intérieur et à la constitution », explique ce juge dans un tribunal de Kinshasa.
J.N.