L’information est tombée dans les rédactions du Maximum mercredi tard dans la soirée, qui explique amplement l’activisme aussi bien surprenant qu’agressif d’un jeune ressortissant rd congolais, jusque-là connu plutôt pour son penchant pour les arts. Sindika Dokolo, le fils d’une norvégienne et d’un banquier Central Kongolais poussé à la faillite par la dictature mobutienne, exilé en Angola voisin où un mariage doré (les mauvaises langues ont parlé d’opportunisme) avec Isabel Dos Santos, la fille de l’alors tout puissant chef de l’Etat pétrolier, l’assurait d’un avenir tranquille.
Mercredi 15 novembre 2017, Joao Lourenço, le nouveau président de la République angolaise, a brutalement limogé la fille de son prédécesseur, Edouardo Dos Santos, de ses fonctions de Présidente du Conseil d’Administration du holding Sonangol, l’entreprise pétrolière d’Etat. Madame Sindika, ainsi que tout le staff dirigeant de cette entreprise, la plus grande du pays, fort de 8 personne ont été remplacés par Carlos Saturnino Guerra Sousa e Oliveira (PCA), Sebastaio Pai Querido Gaspar Martins (Administrateur Exécutif), Luis Ferreira de Nascimento José Maria (Administrateur Exécutif), Carlos Eduardo Ferrza de Carvalho Pinto (Administrateur Exécutif), Rosario Fernando Isaac (Administrateur Exécutif) Baltazar Agostinho Gonçalves Miguel (Administrateur Exécutif), Alice Marisa Leao Soupes Pinto da Cruz (Administratrice Exécutive), José Gime (Administrateur non exécutif), et André Lélo (Administrateur non exécutif).
La poule aux œufs d’or
Le limogeage d’Isabel Dos Santos, l’épouse Sindika Dokolo que le classement Forbes/Afrique présentait comme la femme la plus riche du continent intervient un mois et 20 jours seulement après la prestation de serment du nouveau chef d’Etat angolais le 26 septembre dernier. C’est connu, Joao Lourenço a hérité d’une situation économique difficile, marquée jusqu’à il y a peu par une forte récession économique à l’origine de la dépréciation spectaculaire de la monnaie nationale, le Kwanza. Les observateurs s’attendaient donc à ce que le nouvel homme fort de Luanda nettoie les écuries, avec eux, le jeune Sindika Dokolo, sans doute. « Il a dû flairer la fin des haricots », estime ce ressortissant rd congolais exilé à Luanda depuis une vingtaine d’années. Qui ajoute que « l’époux Isabel se préparait à changer de fusil d’épaules depuis l’annonce par son beau-père de son intention de rendre le tablier ». L’activisme politique récent du fils Dokolo contre les dirigeants du pays de son père, et particulièrement le premier d’entre eux, Joseph Kabila, semble lui donner raison.
Philanthrope de la dernière heure
Le Congolais lambda a en effet découvert le fils d’Augustin Dokolo Sanu fin mai dernier, lorsque des dizaines de milliers de kasaiens avaient trouvé refuge en Angola pour échapper aux affres du phénomène Kamwina Nsapu. Sindika, qui se contentait jusque-là de messages laconiques sur les réseaux sociaux avait alors crevé le plafond pour voler « au secours de mes compatriotes », selon ses propos. 200 tonnes de vivres sont ainsi ostentatoirement offerts aux malheureux réfugiés, ce qui offrit à ce philanthrope de fraîche date l’occasion de s’en prendre, non pas aux terroristes responsables des malheurs des réfugiés, mais au pouvoir en place à Kinshasa. L’homme a multiplié depuis lors des saillies médiatiques de plus en plus agressives où il est question, pêle-mêle, de la compassion pour ses compatriotes qui l’inciterait à l’action et de l’existence à Kinshasa d’un pouvoir auquel il aurait décidé de mettre fin, le rendant coupable un peu de tout à la fois, dans le pur style de l’opposition dite radicale congolaise…
Rubicon franchi un peu tôt
Samedi 18 août 2017, Sindika Dokolo franchira carrément le Rubicon en patronnant la signature dans la banlieue parisienne en France d’un « Manifeste du citoyen Congolais » prônant le départ de Joseph Kabila du pouvoir avant le 31 décembre 2017 comme l’exigeaient des opposants comme Félix Tshisekedi et Moïse Katumbi qui avaient le vent en poupe outre Atlantique. Le document signé par des « acteurs de la société civile », en fait des opposants bons teints à la majorité présidentielle au pouvoir à Kinshasa depuis 2011, n’était en réalité qu’une réplique de celui signé quelques mois plus tôt, en Belgique, par des acteurs de cette frange extrémiste de l’opposition nourris à la mamelle par le richissime ancien gouverneur de l’ex Katanga, Moïse Katumbi Chapwe.
Nombre d’observateurs, en RD Congo et sur le continent, voient donc dans l’activisme soudain du jeune Sindika Dokolo une sorte de tentative de repositionnement territorial opportuniste, dicté par sa situation personnelle en Angola. « Il tente sa chance une nouvelle fois comme le font la plupart des aventuriers congolais après avoir épuisé leur capital-ressource quelque part », estime un universitaire kinois. Tout se passe, en effet, comme si le fils Dokolo Sanu savait que les temps des vaches maigres pointait à l’horizon pour lui, aussitôt « Zedu », son puissant beau-père, retiré des affaires politiques à la tête de l’eldorado angolais. Le limogeage mercredi dernier d’Isabel Dos Santos de la tête de Sonangol est une indication qu’il n’avait pas tort.
J.N.