La dépouille mortelle de l’artiste-musiciens Bipoli na Fulu ou Mfumu Ntaku, de ses vrais noms Nkosi Tshando Pépé De Guimaraes arrive à Kinshasa jeudi 19 octobre 2017 à 20 heures. Dans la capitale de la RD Congo, que le défunt quittait il y a plusieurs années, d’aucuns s’interrogent sur le mal qui a cet ancien enfant terrible de Ndjili, cet incontestable berceau de la musique kinoise.
Des sources rapportent qu’alors qu’il était soumis à des séances chimiothéraphie, Bipoli avait confié à la presse qu’il souffrait d’un cancer de l’estomac qui n’avait pas encore atteint le niveau des métastases. Manifestement, les choses auront donc dû empirer.
Bipoli na Fulu, le sobriquet sous lequel le grand public le découvre dans l’orchestre Viva La Musica de Papa Wemba, est né dans et avec la musique, parce que vers 1972-1973, comme le fait Innocent Kiniema, un des amis d’enfance de l’illustre disparu, Mfumu Ntaku s’était déjà signalé dans l’orchestre « Sotoka Way » sur l’avenue Songi n° 46 au quartier 1 dans la commune de Ndjili, fondé par Nitu Mambu, un mécanicien très connu ces années-là. Trois ans après, Bipoli dont le succès dans les milieux ndjilois allait crescendo, quitta Sotoka pour créer sa propre formation musicale dénommée « Isoto l’Académie ». Le groupe se portait bien et voguait de succès en succès jusqu’au moment où le patron, Bipoli donc, décida de passer le test d’embauche devant Papa Wemba qui venait de monter son Viva La Musica en 1977.
L’ère Viva La Musica
Chez Papa Wemba, le teste de Bipoli est brillant. Le jeune chanteur fait partie de la toute première ossature de Viva La Musica. Avec Jadot Le cambodgien, Petit Aziza et autre Espérant Djenga Ka, ils constitueront l’attaque-chant qui consacrera le triomphe de Bokul après sa séparation d’avec ses amis de Yoka Lokole.
A l’orée des années ‘80, un conflit interne met en désaccord Bokul et une partie de ses musiciens. Espérant, Jadot le Cambodgien et Bipoli s’en vont créer « Karawa Musica » dans le but de rivaliser Viva La Musica. Et ce, alors que les variantes de la danse « Mokonyonyo » et une discographie améliorée par l’arrivée de King Kester Emeneya font des ravages parmi les mélomanes à travers toute la République du Zaïre.
En dépit de leurs talents artistiques incontestables, Jadot, Espérant et Bipoli n’ont pu tenir le coup avec Karawa Musica qui n’a vécu que l’espace d’un matin (moins de six mois). Les dissidents regagnèrent tous le bercail.
Bipoli et Victoria Eleison
Plusieurs mois plus tard, Viva La Musica au summum de sa gloire, sera frappé par un nouveau vent de départs en cascade. Bipoli et Kester Emeneya en tête, menèrent une révolution qui se soldera par des départs en masse. Les nouveaux dissidents quittent le village Molokaï à Matonge pour se réfugier sur l’avenue Commercial au quartier 1 dans la commune de Ndjili (juste à côté de la parcelle familiale de Bipoli). Mais le même sort dévastateur s’abat sur le nouveau groupe où un conflit éclate entre Bipoli et son ami King Kester. Mis en minorité par le groupe qui lui préfère King Kester en raison de moyens financiers qui lui fournissent les Ecuries Vévé, Bipoli est lâché. Resté seul, Kester Emeneya ne tarde pas à obtenir un équipement musical pimpant neuf des Ecuries Veve et monte son Victoria Eleison en 1982.
Bipoli, vice-président
Avec l’appui total des musiciens, Kester Emeneya sera déclaré fondateur et président de Victoria Eleison. Pour ne pas trop blesser son ami Mfumu Ntaku qui a contribué énormément à la création de cette nouvelle formation musicale, il lui sera confié le poste de Vice-président. Bipoli signe successivement deux titres sensationnels, « Bossey 1er » et « Kapangala » dont les succès sur le marché sont été éblouissants. Signalons que dans Viva, Bipoli avait sorti deux œuvres : « Nzengo Luzizila » et « Amisi Clara » (chantée avec Dindo et Kester).
1985, le départ
Au fils des mois, il s’avère que dans Victoria Eleison, Bipoli n’est qu’un vice-président faire-valoir. En réalité, il n’avait aucune préséance réelle sur qui ce soit et en était gêné au point de se retirer, pour garder sa dignité, disait-il.
Se confiant autrefois à la presse, De Guimaraes a révélé qu’après son départ de Victoria Eleison en 1985, il avait repris contact avec Papa Wemba. En bon père de famille, celui-ci aurait compati à son sort en lui procurant un titre de voyage Kin-Bruxelles, le visa et d’autres documents connexes qui ont permis à l’infortuné de s’installer en Europe. Bipoli y a passé 29 ans interrompus par son décès dimanche 1er octobre 2017.
Dernières confidences
Avant de rendre l’âme, Bipoli qui a souffert pendant 9 mois aurait déclaré que la musique ne lui avait rien rapporté. L’artiste envisageait, cependant, de créer une œuvre, la « Fondation Bipoli na Fulu », et monter une grande boulangerie dans sa commune, à Ndjili, pour approvisionner les mamans du quartier en pains. Bipoli est mort veuf et père de 3 enfants.
Zenga Ntu