Après Genval en Belgique, Chantilly, en France, vient de regrouper des activistes dits de la société civile, dont la CENCO, Conférence Episcopale Nationale du Congo, pour un plan d’actions politiques visant le renversement de Joseph Kabila et l’instauration d’une « transition citoyenne », d’une troisième transition, donc. Si, à Genval, les lobbies politico-affairistes occidentaux ont agi autour de Moïse Katumbi, à Chantilly l’attelage se monte autour de Sindika Dokolo, le gendre du Chef de l’Etat Angolais Edouardo Dos Santos. Autour d’eux, des acteurs traditionnels de l’insurrection en RD Congo : l’Open Society Foundation (OSF) de George Soros coachant la FIDH (Fédération Internationale des Droits de l’Homme), et l’inénarrable Human Rights Watch (HRW), mais aussi « Y’en a marre », un mouvement citoyen sénégalais dont le meneur avait dû être expulsé de Kinshasa il y a quelques années, etc.
Pas besoin d’un dessin pour comprendre ce qui s’est passé la semaine dernière dans un hôtel cossu (L’hôtel Dolce) au cœur de la forêt de Chantilly, dans la région parisienne, où des associations et mouvements congolais dits « citoyens » (sic !) ont été réunis pour constituer ce qu’à Genval, en Belgique, des lobbies occidentaux ont perpétré avec, cette fois-là, avec des partis et regroupements politiques. Les encablures de temps, les acteurs et les agendas se croisent tellement qu’on croirait à des copier-coller.
Les acteurs d’abord.
A Chantilly, la « messe » a, officiellement, été organisée par la Fédération Internationale des Droits de l’Homme (FIDH) qui avait lancé les invitations. C’est dans les locaux de la FIDH qu’a été signé le « manifeste » issu des trois jours de cogitations à Chantilly. Mais il appert de plus en plus clairement que la FIDH, un regroupement d’au moins 178 ONG à travers le monde, n’est qu’un paravent pour faire exécuter l’agenda stratégique du milliardaire américain d’origine hongroise, George Soros, patron de l’Open Society Fondation, qui est l’un des gros financiers de la FIDH. Celle-ci n’en est, d’ailleurs, pas à sa première implication dans l’entrelacement hétéroclite des lobbies politico-affairistes occidentaux avec des groupes politiques et de la société civile de la RD Congo. C’est, en effet, la FIDH qui avait placé sous sa protection la juge Chantal Ramazani. La même qui avait condamné Moïse Katumbi Chapwe à trois ans de prison ferme au Tribunal de paix de Lubumbashi/Kamalondo dans l’affaire opposant l’ancien Gouverneur de l’ex-province du Katanga au grec Stoupis.
Exfiltrée à grand frais de Lubumbashi, Chantal Ramazani se retrouvera en Belgique, aux côtés de Moïse Katumbi qui avait financé son voyage, qui la confiera ensuite au « babysitting » de sa complice Cécile Kienge, laquelle se déchargera de ce fardeau (la dame serait aussi inconstante qu’exigeante) sur la FIDH. Cécile Kienge est, pour sa part, l’une des coaches dans le dispositif de lobbying politico-diplomatique en faveur de Moïse Katumbi en Occident. Les deux sont des partenaires, notamment dans une ONG de droit américain créée aux USA en 2015 par l’ancien gouverneur du Katanga qui décida un jour de devenir Calife à la place du Calife en RD Congo au profit des intérêts d’une bande interlope d’affairistes occidentaux…
Ce n’est pas tout.
Autour des associations et mouvements dits « citoyens » se sont retrouvés d’autres organisations comme Human Rights Watch, également grassement financée par l’Open Society Foundation, à travers sa directrice Afrique, Ida Sawyer. La même. Comme à Genval, en Belgique, le Gouvernement français n’a pas fait qu’offrir son hospitalité et des petits souvenirs aux visiteurs congolais de Chantilly. Paris les a aussi accompagné de déclarations de ses officiels faisant pression pour soutenir la tenue impérative des élections « en décembre 2017 conformément aux prescrits de l’Accord du 31 décembre 2017 », ignorant superbement les dispositions dudit accord qui prévoient un report éventuel à convenir unanimement par le Conseil national de suivi de l’accord, le Gouvernement et la Commission électorale congolaise. Anne Guégen, la représentante adjointe de la France à l’ONU, s’y est, en effet, employée lors du débat au Conseil de sécurité sur les enquêtes en RD Congo, pendant que des Congolais se faisaient endoctriner à Chantilly.
CENCO : engagement politique confirmé
Côté congolais, l’on ne peut pas ne pas épingler la présence de la CENCO qui, cette fois-ci, n’aura eu aucun prétexte pour se défiler devant ce nouvel engagement. Déjà présente à l’île de Gorée, les radicaux anti kabilistes de l’Eglise catholique romaine s’en étaient retirés au motif que les objectifs y poursuivis « ne correspondaient pas avec l’objet mentionné dans les invitations ». A la Cité de l’Union africaine à Kinshasa, la CENCO s’était également débinée, sous prétexte de « faire le deuil des victimes des manifestations de septembre 2016 », avant de se retrouver à Limete au conclave du Rassemblement de l’Opposition pro-occidentale.
Aujourd’hui donc, l’Eglise catholique a officiellement quitté le milieu du village pour s’afficher, tout aussi officiellement, comme protagoniste dans l’arène politique congolais. Les masques sont donc tombés…
A mentionner également André Mbata, professeur à l’Unikin et président d’une ONG-appendice de l’aile katumbiste de l’opposition rd congolaise. Bien connu pour ses opinions tranchées sur la politique en RD Congo où s’il ne tenait qu’à lui, Joseph Kabila aurait déjà disparu du monde des vivants, André Mbata se rapproche aussi épisodiquement de l’UNC de Vital Kamerhe, du moins chaque fois que l’imprévisible ex. Speaker de la chambre basse du parlement prend ses distances par rapport au président Kabila.
Par ailleurs, si à Genval, le coaching côté rd congolais du mouvement politique qui en sortit avait été assuré par Moïse Katumbi Chapwe, à Chantilly, cette fois-ci, la tâche est revenu à un novice dans le milieu : Sindika Dokolo. Le même qui, il y a dix jours, revendiquait sans rires un statut de « sauveur » de la Nation congolaise en danger en créant à Londres (Grande Bretagne) un mouvement dénommé « Congolais debout ». Katumbi Chapwe et Sindika Dokolo ont en commun des affaires plus ou moins opaques, le premier grâce à ses combines avec les entreprises minières katangaises du temps sa splendeur de « Roi du Katanga », et le second grâce à son mariage avec la fille du futur ex. président angolais José Eduardo Dos Santos, après que Mobutu eut acculé son père à la faillite. Ils ont aussi en commun le fait de n’appartenir à aucune organisation et de mobiliser les autres partis et associations existantes à leur propre cause. Last but not least, Katumbi et Sindika n’ont pas d’ancrage nationaux en RD Congo, ayant choisi de se mettre résolument au service des capitales et des lobbies occidentaux. De quoi pourrait-on rêver de plus ?
Cet attelage autour des mouvements de la société civile n’en est pas à son coup d’essai. Déjà en 2015, l’USAID (Agence américaine de développement) avait réuni, sur financement entre autres de l’Open Society Fondation, un groupe de jeunes congolais à la Tshangu (Est de Kinshasa) pour un encadrement et des formations assurées par des émissaires des mouvements « Y’en a marre » et « Balai citoyen » venus du Sénégal et du Burkina Faso. Puis vint l’étape de l’île de Gorée et, enfin, Genval où se retrouvèrent également des activistes de la société civile sous le même coaching et dans la même démarche.
strong>Un discours autour de l’«alternance » façonné à l’étranger
Comme à Genval, les « conjurés » de Chantilly ne sont pas allés loin pour trouver leur discours politique autour des élections avec comme différence la base politique qui, aujourd’hui, est l’Accord de la St Sylvestre. Mais à cette différence que, si Genval avait tablé sur un dialogue interne en vue des élections, Chantilly se montre plus radical et opte pour le déboulonnement sans autre forme de procédure de Joseph Kabila en vue d’une « transition citoyenne ».
Mais, entre les deux, il n’y a pas tellement de différence puisque les « genvalistes » du Rassop/Limete tiennent déjà le même discours, preuve qu’ils s’abreuvent à la même source d’inspiration.
Et le contexte de ce genre d’initiative ne tourne qu’autour des élections sous le prétexte de l’objectif final que serait l’alternance au pouvoir. Aujourd’hui, alors que, de l’intérieur, les choses semblent s’organiser autour du triangle CENI – CNSA – Gouvernement pour un nouveau balisage du processus électoral, la conjuration de Chantilly se présente comme un coup de pied dans la termitière dans l’objectif de tout faire capoter au profit d’une autre logique plutôt conflictuelle. Exactement comme lorsque des « souffleurs » occidentaux décidèrent en 2016 de saboter la facilitation de l’Union africaine menée de main de maître par Edem Kodjo à qui l’on fit attendre pendant 4 mois, une « liste de participants » qu’Etienne Tshisekedi s’était pourtant personnellement engagé à remettre en mains propres à l’ancien Premier Ministre Togolais. Une liste qui ne fut jamais remise jusqu’aux manifestations sanglantes grâce auxquelles les conjurés de Genval avaient cru « dégager » Joseph Kabila. En vain.
Le dossier reste ouvert…
Pascal Debré Mpoko et Le Maximum