La RD Congo n’exportera pas du café, robusta ou arabica, cette année. Pas de contribution non plus de l’Office National de café, ONC, dans le budget 2017. L’Etat veut avant tout donner de la valeur ajoutée à son café.
Le café contribuait à plus de 35% du budget dans les années 50, avait confié le président du Sénat, Léon Kengo, dans un speech où il déplorait que la réforme des entreprises publiques ne ciblait guère le secteur-clé de l’économie nationale. La dernière fois que les recettes du café ont été comptabilisées dans le budget de l’Etat, c’était en 2015, moins de 170 millions de FC soit environ 200.000 dollars. L’Etat a visiblement changé de fusil d’épaule. Il veut avant tout donner de la valeur ajoutée au café national et répondre en priorité à la consommation locale. Le ministre de l’Agriculture, Georges Kabongo Kazadi, a, en effet, procédé mi-juillet 2017 au siège de l’ONC à Kinshasa-Limete à la pose de la 1ère pierre pour la construction de l’usine de torréfaction du café. Georges Kabongo Kazadi a indiqué que cette usine, dotée d’un équipement de la dernière technologie, permettra à l’ONC de produire en grande quantité du café moulu, prêt à la consommation. Le DG ai de l’ONC a également rappelé aux autorités l’obligation pour la RD Congo d’apporter une valeur ajoutée à ses produits d’exportation en vue de générer des recettes en devises. A cet effet, il a demandé au gouvernement de doter l’ONC de capacités nécessaires pour atteindre cet objectif, signalant que des exportations frauduleuses privent le pays d’une bonne partie de ses recettes. «La décote du café congolais est en grande partie liée à l’exportation frauduleuse du café sans certificat de l’ONC. Ceci donne un doute à la qualité du vendeur», a soutenu M. Bompate. Ce n’est plus qu’un secret de polichinelle, l’essentiel de la production du café est frauduleusement exporté vers l’Ouganda et comptabilisée comme production de ce pays. Lors des dernières accises des industriels du café à Kinshasa, des experts ont estimé à 45 millions de dollars le manque à gagner qu’enregistre le trésor public à chaque campagne de café et de cacao dans l’Est rd congolais. Dans l’ancienne région de l’Equateur, la contrebande du café fait plutôt les affaires du Congo d’en-face ou des commerçants centrafricains.
Organe de régulation en déliquescence
Face au scepticisme de certains travailleurs de l’ONC de voir le projet aboutir à l’image de la cimenterie de l’ex-Province orientale, le ministre de l’agriculture a précisé que la construction de l’usine est une réponse à la recommandation de l’Organisation Internationale du café (O.I.C) notamment en ce qui concerne la promotion de la consommation de la production locale et la réduction des exportations. Il a également déclaré que cette acquisition constitue un déclencheur de développement relevant de la détermination du gouvernement de relancer la production du café. Le ministre Kabongo a invité l’ONC à encourager les paysans et cultivateurs à reprendre cette culture en milieux ruraux, avant de souligner que ce geste d’une portée politique, sociale et économique importante apportera un soulagement à la situation sociale des agents et cadres de cet Office qui accuse des dizaines de mois d’arriérés des salaires.
L’ONC est, en pratique, le régulateur traditionnel dans le secteur du café et dans d’autres produits d’exportation comme le cacao, le quinquina, le thé, etc., la banane, la papaye, a rappelé le directeur général a.i de l’ONC, Guy Bompate Bo-Lounda. L’office, a-t-il ajouté, s’emploie notamment à encadrer paysans et agriculteurs du secteur de cultures pérennes.
Consommer rd congolais.
Le directeur de production de l’Office national de café, Boniface Tshiani Muana Kalala, a, quant à lui, vanté les qualités des machines à implanter pour une torréfaction moderne avec plusieurs mécanismes automatiques jusqu’à l’obtention du café moulu. Il a rapporté qu’un hangar couvrant 396 mètres abritera lesdites machines, ajoutant que les consommateurs préfèrent du café torréfié non moulu pour son arôme.
Fin juillet, le Directeur général de l’Office national de café, Guy Augustin Bompate Bo-Lounda, a annoncé lors de son séjour de travail à Goma, l’organisation d’une vaste campagne de vulgarisation de la caféiculture. Le marché du Chef-lieu de la province Nord-Kivu ainsi que ceux de plusieurs agglomérations de l’Est rd congolais sont, à ce jour, inondés du thé et café rwandais. L’initiative de l’ONC a été favorablement accueillie par le vice-gouverneur de la province, Feller Lutayichirwa Mulwahale. Malgré un retour graduel du climat de bon voisinage dans la région, un certain sentiment chauvin domine toujours une grande frange de l’opinion, notamment à Goma, où consommer rd congolais est un véritable acte de foi. La ville de Goma va, d’ailleurs, abriter une journée d’échanges devant mettre autour d’une même table l’ONC et ses partenaires intervenant dans la chaine de valeur des produits agricoles et d’envisager les voies et moyens pour la relance de cette culture très bénéfique en RD Congo dans les années 1960 et 1980.
Tracheomychose, la terreur des caféiculteurs.
Le directeur-général de l’ONC a notamment rassuré les caféiculteurs sur la maîtrise de la tracheomychose, cette maladie qui décime champs et plantations au Nord-Kivu. Guy Augustin Bompate a soutenu que tout est revenu à l’ordre et que le moment est venu pour que toutes les sensibilités s’impliquent dans la culture des produits pérennes à l’instar du café.
Le Congo, a-t-il poursuivi, a actuellement la meilleure qualité du café, l’ONC s’est assigné pour objectif d’informer et de vulgariser les nouvelles méthodes culturales, de traitement et de vente de ce produit dans des conditions idéales. Une étude révèle que le café «arabica» produit dans les collines surplombant le lac Kivu, dans les provinces du Nord et du Sud-Kivu, est coté de meilleure qualité. Ce café de première qualité est vendu à 10 dollars/kg et fait actuellement l’objet des sollicitations au niveau des marchés internationaux. Mais curieusement aucun franc n’a été versé au Trésor public, depuis 2016, pour le compte des exportations du café. L’ONC passant depuis des années comme une coquille vide.
POLD LEVI